Réalisé par Joe Carnahan
Avec
Jason Patric, Ray Liotta et Busta Rhymes
Édité par M6 Vidéo
4 lettres qui claquent comme le contact d’un fouet sur une
peau tendre et vierge. Comparaison étrange ? Méritée
puisque le film gifle à la fois nos certitudes et les
conventions du film policier. Ni méchant, ni gentil,
Narc
est un enfer, celui de la came ruinant les vies de ce qui y
touchent de près ou de loin. Flics ou Toxico, la came souille
les âmes, englue les esprits et flétrit les corps, décharnés
à son contact. Elle n’a qu’une seule couleur, bleu acier,
celle du désespoir ! Dominante d’une pellicule nerveuse
que l’overdose guette à tout moment. Comment lui
résister ? Filmer la famille, le cercle protecteur, ou
bien alors se shooter ! Surexposition, kaléidoscope de
couleurs vives…le shoot fait retrouver la sensation
première, le flash de départ. Idée fabriquée d’un Nirvana
certain. Carnahan réutilise l’insert des deux aiguilles
plantées dans la came ; présence démoniaque, transitions
habiles avant un noeud dramatique et / ou une scène d’action.
Tout est la cause de ce premier flash, trop plein d’énergie
indélébile, ineffable que jamais aucun autre shoot ne
reproduira. Le bleu, c’est l’après, la grisaille immuable
dans laquelle évolue cet univers que les sensations du
premier flash ont trop tôt, trop vite abandonné. On lutte, on
court, on inculpe, on arrête en vain. C’est une guerre perdue
d’avance. Un seul gagnant : la came qui corrompt tout,
jusqu’aux flics qui la combattent.
« Narc » est l’héritier de 2 autres polars précurseurs. Le
premier est French Connection à qui il emprunte sa
poésie réaliste voire surréaliste. Moments forts,
dangereusement fascinants, fruits empoisonnés de la plus
terrible des violences. (cf la scène du cadavre dans la
baignoire, celle de l’interpellation d’un suspect qui a tenté
de défigurer sa petite amie). Tableaux baudelairiens d’une
déchéance sociale et humaine consommées. Comme lui, il
dépeint alors l’univers policier, nourri au sein de cette
atrocité endémique. Les flics : mal payés, mal préparés,
mal armés, somme toute impuissants, contraints à se sacrifier
pour donner le change auprès du citoyen lambda…poursuivre
ainsi la folle illusion d’une répression salvatrice. Sauver
des vies pour sauver la face…à chacun son héro ! Au
flic le service, aux dealers le crack. De maigres résultats à
la clé que réduisent à néant une armada d’avocats et de ronds
de cuir à coups de commissions, d’ordres, de contre-ordres,
d’enquêtes et de contre-enquêtes quand ce qui les attend
n’est pas le plomb d’une balle. Hasard putride de ses vies
qu’on envoie faire le sale travail. Qu’on désavoue
après…comme pour se laver les mains d’avoir exiger que les
rues fussent « nettoyés ». Le dealer en victime, le flic en
bourreau…mais quand l’enfer frappe à nos portes alors le
bourreau devient héros…il faut tuer pour notre
liberté…tuer pour nos vies qui ne valent pas les
leurs…ces flics que la drogue a détruit et qui l’acceptent
parce qu’ils ne savent plus trop quoi faire…en quoi être
utile…ce qu’on attend d’eux. Ils ont vu l’enfer et en sont
revenus…mais la peur au ventre que cette saloperie dévore
le monde, leurs villes, leurs quartiers. Combattre la drogue
pour les autres ou pour eux-mêmes. Juste la combattre sans
avoir l’infime espoir de l’emporter. Voilà de quoi parle
« Narc », de cet inextinguible enfer, de la cause, du Mal avec
un grand « M » qui poursuit sans relâche de pourrir l’homme
et son univers.
« Narc » évite soigneusement le traitement de ces films
précautionneux, expurgeant ainsi la platitude et le
neuneuisme dont nous gratifie abondamment tout bon polar
hollywoodien. Oui…la dope est un problème !
Oui…quelques policiers s’acharnent à la combattre !
Certes ces hommes ont du courage mais ils sont
faillibles ! Non…la hargne et la détermination qu’ils
y mettent ne viendront pas à bout de ce fléau ! Si vous
croyez que tout ceci va se terminer par un gentil petit happy
end…pas la peine de continuer…hâtez-vous, vous risquez de
manquer le dernier épisode des « Experts » ou de « Hooker ».
Ici, politiquement correct, diplomatie, connais pas !
« Narc » leur préfère sens du rythme et maîtrise du sujet.
Première scène : le calme avant la tempête. Transition
flash puis scène d’action en ouverture digne de Spielberg et
de son Il faut sauver le soldat Ryan. Caméra à l’épaule,
bruits de pas, de sueur et souffle haletant…on est dans
l’ambiance. Le plan-séquence dans toute sa splendeur avec
pour seules lignes force violence et vélocité. Climax pour
clore. On passe à la scène suivante, le film semble prendre
une courte pause. Je dis bien « semble » parce
qu’immédiatement, le flash back (ennemi juré des bluettes
hollywoodiennes) prend le relais, écrouant le spectateur dans
cette geôle qu’est le commissariat aux murs grisâtres, à
l’atmosphère étouffante, sale et malsaine. On y respire les
miasmes (bleu acier) du désespoir. Puis vient l’enquête ou
devrais-je dire la quête. Se forme alors l’un des tandems les
plus réussis du 7ème Art. Face à face au sommet entre Jason
Patrick, officier revenu de l’enfer qu’est l’infiltration
chez les dealers, et Ray Liotta, massif, musculeux, concentré
d’amour, de haine et de brutalité. Deux extrêmes, deux
figures…chacun à un bout de cette grande chaîne qu’est
l’éventail des effectifs de police. Ensemble, ils allient
force et intelligence, enquête et répression, circonstances
atténuantes et sanctions.
Sybillin est le regard que chacun d’eux portent sur leur
« onfrérie » ! Il haïssent le système policier
conventionnel…celui qui triomphe, qui se veut moderne,
celui qui passe bien à la télé…foutre des PV aux
automobilistes, patrouiller dans des quartiers où ils ne
risquent rien, faire bonne figure devant les commissions
d’enquête, ils laissent ça aux arrivistes. Eux appartiennent
à une classe supérieure ; celles des hommes à principe,
francs, honnêtes et droits. « Narc » est un film engagé,
radical…extrême par certains côtés. Désobéir aux ordres
pour appliquer la justice, mentir pour défendre ce à quoi on
croit, flinguer l’innocence aveugle d’un monde à la dérive.
D’une Humanité qui s’arrange de boniments politiques et d’un
fragile sentiment de sécurité. (cf la scène dans le bureau du
Commissaire). Surtout pas de vague, la vérité on s’en balance
d’autant qu’elle serait inacceptable à entendre…parce qu’il
n’y a aucune solution, aucune issue, aucune légale en tout
cas et que rien (ni enquête, ni procès, ni sanction) ne
serait satisfaisant. Alors, on suit une piste, n’importe
laquelle, on trouve un bouc émissaire (mort de préférence)
pour lui coller les maux de la terre entière. Affaire
classée, maintenant qu’on nous foute la paix !!! 13 ans
après Rush (second film à légitimement réclamer la
paternité de « Narc »), Joe Carnahan, illustre inconnu, sorti
de l’anonymat par un Tom Cruise tout puissant, prend la suite
de Lili Fini Zanuck pour signer un film terrible sur le Mal
qui infeste nos sociétés : mensonge, orgueil, avidité
humaine, concentré en un seul mot : la drogue !
« Narc » est l’histoire vraie de ces hommes, victimes et
bourreaux, qui gravitent autour de la drogue…se déchirent,
s’entretuent en un rituel sacrificiel. Certains pour la
combattre, d’autres pour en obtenir. Narration à tiroir, mise
en scène dépouillée. Retour au film noir des années 70 et ses
3 fondements : Interprétation, suspens, rebondissements.
Le tout sous l’oeil indiscret d’une caméra expressive,
toujours là où elle doit être, ni trop près ni trop loin,
constamment en mouvement. Juste ce qu’il faut pour voir,
entendre et imaginer une haletante intrigue servie par les
nerveux soubresauts d’une réalisation intense. » Narc » filme
le monde dans toute sa laideur et toute sa nudité,. Ni
romantique, ni héroïque, ni cinématographique…ce monde
hurle la sincérité…sincérité à côté de laquelle nous sommes
passés en refusant trop souvent de mettre le nez dans nos
poubelles.
Ne dites pas que vous ne saviez pas mais bien plutôt que vous
vous en foutiez… « Narc » témoigne, dérange,
accuse !!! Alors les » c’est la vie, c’est comme ça » on
s’en passe…laissez ça aux faibles, aux lâches, aux
coupables que « Narc » dépeint et condamne…c’est à eux
qu’on doit cet enfer…ceux qui ne veulent jamais rien voir
pour être sûrs de ne pas s’impliquer ! Intransigeant,
indépendant, brillant, fascinant…le film prend des risques,
cingle les conventions, gifle le système et frappe à terre
ceux qui se risqueraient à trouver en lui un simple
divertissement…réalisation magistrale à l’appui, les
cinéphiles apprécieront… « Narc » franchit la barre du
simple film culte pour se voir propulser (selon Friedkin) au
rang de chef d’oeuvre… A voir impérativement !
Pas la peine de tergiverser, « Narc » est la Rolls de ce
qui se fait aujourd’hui en DVD. Menus somptueusement
dessinés et animés avec extraits du film et transitions ultra
léchées. Visuels expressifs soulignés par les accords
syncopés d’une musique discrète mais obsédante. Image est son
éblouissants au-delà du simple exercice scolaire et appliqué.
Sur une seule et même galette, H2F réussit une édition
collector aux allures d’ultimate. Que demander
d’autre ?
Côté bonus, c’est le Nirvana avec 3 making of, 5 interviews,
bande-annonce, autopsie d’une scène…bref, tout ce que vous
avez envie de savoir sur le film (sans jamais avoir osé le
demander), vous le saurez. » Narc » est un bijou d’édition
DVD que beaucoup d’entre vous auront à coeur (et on les
comprend) de s’arracher !!!
Des éditions DVD comme celle de « Narc », on ne peut qu’en
souhaiter davantage. L’éditeur a bien compris l’enjeu du
support. Faire vivre à nouveau des oeuvres en vidéo, même si
elles n’ont pas rencontré le succès en salles. Dans le cas de
» Narc « , cet ouvrage de tout premier ordre est absolument
nécessaire pour décortiquer et honorer l’un des polars les
plus marquants de ces 10 dernières années.
5 est encore trop peu pour célébrer la prolixité de cette
décidément fort belle édition. Vous en connaissez beaucoup
des DVD avec 3 making of, interviews, bandes-annonces avec en
prime l’autopsie d’une scène ? On les compte sur les
doigts de la main. Un dizaine tout au plus parmi lesquelles
figure Le Seigneur des Anneaux : Les Deux Tours. Parce qu’il faut
aussi préciser que non seulement l’éditeur nous gratifie de 3
making of mais qu’ils ont en plus le bon goût de ne pas se
limiter à de la promotion bassement commerciale. Pas un des
suppléments ne fait office de gentille petite featurette.
Tous (excepté Tom Cruise) multiplient les remarques
judicieuses à propos de ce film avec une touchante sincérité.
« Ca ne me gêne pas que dans 20 ans, on ait oublié « Narc »
confie Joe Carnahan. L’important est le bonheur qu’il nous
a procuré sur le moment ». Séquence humilité, témoignages
vérités. Ca se regarde, ça s’écoute et ça
s’apprécie !!!
Interviews (12’00 environ - VOST)
C’est le genre de supplément qu’il vaut mieux regarder avant
le film. Bien que son contenu soit essentiellement dirigé
vers la promotion et que les interviews qu’ils proposent
soient beaucoup trop rapides pour être constructives, ce
bonus montre l’état d’esprit dans lequel les participants ont
abordé le film. La plus intéressante de toutes est celle de
Jason Patrick qui ne fait aucune concession au gotha
hollywoodien et défend ostensiblement ses choix d’artiste. 5
interviews qui donnent un léger mais savoureux avant-goût de
ce qui va suivre :
- Ray Liotta (4’06)
- Jason Patrick (2’01)
- Busta Rhymes (1’48)
- Joe Carnahan (3’55)I
- Tom Cruise (2’24)
1er Making of : Montage de la Production (13’18
VOST)
Mené tambour battant, ce making of nous explique de fond en
comble la manière dont le projet a vu le jour puis s’est
concrétisé. 13 minutes fascinantes qui montrent que ce film a
connu les pires difficultés pour se faire. Que son
réalisateur a immédiatement bénéficié du soutien de Ray
Liotta et de sa femme (premier producteur du film) et que
malgré ce soutien indéfectible, « Narc » a failli 100 fois
capoter par manque d’argent. Premier à en pâtir, le choix du
lieu de tournage : 1 jour à Détroit, le reste à
Vancouver…mais au lieu de se décourager, le réalisateur et
son équipe ont contourné le problème et transformé cette
faiblesse en véritable force. Imaginatif, » Narc » évite les
affres du formatage pour adopter un ton libre et
indépendant…making of aux allures de film dans le film
épique et captivant !
2ème making of : Le Tournage (19’24 VOST)
Loin, très loin, à des kilomètres même de la featurette
promotionnelle, ce making of vous plonge sans attendre au
coeur de cette aventure qu’est le tournage de « Narc ». 28
jours de tournage. Au bout de 8 jours, plus d’argent. Des
techniciens en colère , des acteurs qui poursuivent prises
après prises, l’incertitude au ventre avec pour seul
réconfort la détermination en béton armé d’un talentueux
réalisateur et l’espoir que le projet, s’il voit le jour,
finisse par les rendre fiers de ce qu’ils ont fait. Mais ce
making of va au-delà de la simple » love story » puisqu’on
s’attache aux moments forts du film pour les décortiquer et
en extraire l’essence d’une réalisation à la fois sobre et
complexe. Scène d’ouverture, flashs back, l’enquête, descente
à l’entrepôt et bien évidemment la fin sont tour à tour
passés en revue avec le sérieux et la rigueur des « Cahiers
du Cinéma ». On termine par le rattrapage puis
l’appropriation de « Narc » par la Paramount. Ni amertume, ni
cynisme, juste les faits. Le temps encore d’un hommage à
William Friedkin et son French Connection puis
voilà clos ce deuxième making of, tout aussi passionnant que
le premier.
3ème making of : Les effets spéciaux (12’56
VOST)
Entièrement consacré à l’aspect visuel du film, ce 3ème et
dernier making of entre dans le détail pour nous dévoiler (en
toute simplicité et humilité) étapes par étapes la
fabrication de « Narc ». De la photographie au montage en
passant par la composition et la musique, rien n’a été laissé
de côté. Et c’est ce qui rend ce « voyage visuel » si
percutant et passionnant (Oui 3ème !). Joe Carnahan nous
expose avec infiniment de modestie un sens inné et inhabituel
de la réalisation ainsi qu’une vraie prédilection pour
l’indépendance. Gonflé, visionnaire, brillant, son équipe et
lui donnent à travers ce supplément court mais intense une
vraie leçon de cinéma dont nombre de réalisateurs devraient
peut-être s’inspirer. Les cinéphiles apprécieront…et
n’auront de cesse de se repasser la section.
La Connection Friedkin (9’48 VOST)
Voici un supplément tout-à-fait inhabituel dans lequel
William Friedkin, légende vivante du cinéma américain, vient
établir un parallèle entre son travail et celui d’un jeune
réalisateur, inconnu du grand public, Joe Carnahan. De prime
abord, ça semble suspect. On connaît les penchants de
Friedkin pour les débordements affectifs un brin théâtraux.
Mais très vite son discours séduit par sa passion et sa
sincérité à l’égard d’un auteur qu’il considère comme son
héritier. Héritage réclamé, paternité assumée, que demander
d’autres ? Un sentiment sur le positionnement de
l’oeuvre par rapport au cinéma hollywoodien…et là Friedkin
ne déçoit pas non plus ! Il parle d’un film honnête, ce
qui est rare. D’un film sincère et réaliste qui aborde, entre
autres thèmes, l’extrême difficulté pour ces policiers de
faire leur travail. Friedkin en profite pour égratigner le
politiquement correct et s’en prend au formatage des films
hollywoodiens. Puis il termine en ces termes : « Narc »
est un film important (…) le public n’est plus toujours en
phase avec ce genre de film (…) mais celui-ci restera très
certainement gravé dans les mémoires « . Le mot « chef
d’oeuvre » sera même cité. Hommage d’un grand homme qui porte
un regard clair et actuel sur le cinéma et son devenir.
Autopsie d’une scène (21’57 VOST)
Autre supplément inhabituel qu’on aimerait retrouver sur un
peu plus d’éditions DVD, l’autopsie d’une scène est un
documentaire captivant, produit par Sundance Channel, qui se
consacre à décortiquer de part en part l’une des scènes clés
de « Narc ». Morceau choisi, la scène de la baignoire lors de
laquelle Jason Patrick et Ray Liotta se retrouvent à
autopsier le cadavre d’un suspect décapité par la
déflagration d’un fusil à pompe. Image, interprétation,
lumière, montage, rien n’échappe à ce documentaire qui
officie à la manière d’un médecin légiste. Par petites
touches successives, réalisateurs, acteurs, monteurs
dévoilent tous les ressorts utilisés pour cette apparemment
simple scène et livrent sons sens caché. Seul regret !
Que toutes les scènes clés du film n’aient pas subi le même
traitement…non je plaisante ! Sans aucune pudeur, le
réalisateur et son équipe dévoilent ici quelques uns des
secrets de fabrication de » Narc « . Un exemple dont on
aimerait assez que beaucoup d’autres réalisateurs talentueux
s’inspirent. L’autopsie d’une scène parachève ce voyage au
coeur des coulisses de « Narc ». Un voyage complet,
instructif et fascinant…qui vaut à lui seul l’achat du
DVD.
Bande-annonce (2’19 VOST)
C’est l’unique déception de cette édition DVD. Malgré le
bonheur que procure sa présence, on ne peut s’empêcher d’être
déçu face à sa qualité d’image plus que médiocre. Pâlichonne,
grêlée de points blancs, et comble de l’horreur en VF, sa
vision finit par agacer. D’autant plus qu’il est rare de voir
une bande-annonce aussi mal réalisée. Au lieu de s’appesantir
lourdement sur la confrontation entre Jason Patrick et Ray
Liotta (et nous dévoiler quasiment le dénouement), elle
aurait mieux fait de pointer l’ambiance surréaliste de
« Narc ». Voilà une bande-annonce qui rate totalement son
sujet…
« Narc » signe le grand retour du polar noir, voie royale qui
a conduit nombre de monstres sacrés de la réalisation là où
ils sont ; Friedkin, Coppola, Scorcese,…Ce genre est
également très ancré dans une époque où le flashy…avait
tendance à guider la palette des chefs opérateurs dans les
années 70. Ici, pas de couleurs flashy mais une
interpénétration subtile entre deux dominantes ; le bleu
et le rouge. A noter aussi l’utilisation de plusieurs types
de pellicules ainsi que de nombreux traitements qui donnent
cette teinte si particulière à l’écran, à la fois terne et
brillante, contrastée puis délavée.
Au fur et à mesure que le film avance, le bleu envahit les
lieux, uniformisant tout, y compris le foyer de Jason
Patrick. Les ambiances sont étonnantes de contraste et de
précision. Le passage d’une pellicule à l’autre se distingue
sans jurer. Atmosphère visuelle composite, ultra complexe et
très réussie. Floutés, scène d’action caméra à l’épaule,
ombrés, surexposition…l’image évite tous les pièges tendus
par une réalisation qui repousse les limites du possible.
Quant à d’éventuelles tâches, point blancs, grains de
compression, on oublie avec cette édition exempt de toute
imperfection. Prendre en défaut une image comme celle de
« Narc » relève de l’exploit ou de la mauvaise fois, je vous en
laisse seuls juges.
Amis de la bande-son qui décoiffe, préparez-vous à passer un
nouveau cap. Celle de la bande-son qui laisse K.O. Jamais
coups de feu n’auront eu une telle intensité. Eclats de voix,
pleurs, cris, vous distinguerez jusqu’au bruit des douilles
fracassées au sol dans une fureur que cette traque
impitoyable contre la drogue justifie. Le calme de la
première scène passé arrive la fameuse scène d’ouverture.
Bruits de pas, cris, détonations sans oublier le souffle
haletant qui nous plonge au coeur de l’action. Après l’image,
Carnahan offre au son cette même texture composite, tout
aussi travaillée, tout aussi réussie.
Puis, elle s’enrichit d’une partition musicale signée Cliff
Martinez (également auteur de celle de Traffic de
Steven Soderbergh). Obsession et discrétion en sont les deux
lignes forces. Le son vient alors habilement faire corps avec
l’image jusqu’à atteindre cette dimension fusionnelle qui
renforce le souci d’authenticité et de sensibilité de » Narc
« .
Côté format, le choix est étendu. VF dolby Digital 5.1 et DTS
5.1. Légère avantage pour le DTS plus fourni, plus clair,
plus détaillé. Mais aucune de ces deux pistes n’arrivent à la
cheville de la V.O. Dolby Digital 5.1. Incontestablement plus
étoffée, plus précise aussi avec un relief et une clarté en
matière de voix inégalés. La VO procure un rapport viscéral
au film, mélange de sensualité et de brutalité. Surrounds
tapageurs, basses sur-boostées, l’éditeur signe un mixage qui
termine en beauté une édition promise d’ores et déjà à un
véritable succès.
A très bientôt dans l’enfer de NARC !