Love Exposure (2008) : le test complet du Blu-ray

Yû a perdu sa mère, fervente catholique. Il a maintenant 17 ans. Tetsu, son père, a été ordonné prêtre. Yû invente d’abord les péchés qu’il doit lui confesser quotidiennement. Ce qui finit par l’inciter à passer de la fiction à la réalité en rejoignant une bande de voyous. Un pas de plus pour commettre le péché des péchés, celui de la chair. L’idée lui vient de photographier les petites culottes des filles sous leurs jupes. Mais tout cela laisse Yû de marbre : il est incapable de la moindre érection ! Jusqu’au jour où, déguisé en femme, il vient au secours de Yôko, agressée par un groupe de garçons. Il suffira que la minijupe de Yôko se soulève une fraction de seconde pour que Yû soit, visiblement, très émoustillé ! Le coup de foudre est réciproque, à une douloureuse épine près : Yôko hait les garçons…

Love Exposure nous fait passer quatre heures en compagnie de Yû, dans une histoire d’amour à la Roméo et Juliette avec, pour toile de fond, les thèmes de la religion, du sexe, de sa répression, de la violence et de l’amour, qui pourrait bien triompher de toutes les adversités.

Ce film ne ressemble à aucun autre, même en cherchant dans le cinéma nippon, plus décontracté avec le sexe que le cinéma occidental, comme l’a montré le diptyque de Nagisa Ôshima, L’Empire des sens et L’Empire de la passion.

Ce conte moral d’une tonalité inédite, balançant entre légèreté et gravité, entre farce et drame, ne donne pas de leçons, mais pousse à réfléchir sur la religion, sur les conséquences auxquelles peut conduire ses excès, ici imputés à une secte, l’Église Zéro, qui semble s’appuyer sur les préceptes du catholicisme, en particulier sur les garde-fous vis-à-vis de modes de satisfaction du désir sexuel, notamment de la masturbation et de l’homosexualité.

Récompensé par de nombreux prix au Japon, ce film a été également distingué au Festival de Berlin en 2009. Il nous arrive enfin sur DVD et Blu-ray, plus de trois ans après son apparition dans les bacs au Royaume Uni.

Il reste des découvertes à faire dans la filmographie de Sono Sion. Le DVD de Guilty of Romance vient de sortir, après celui de Suicide Club et de The Land of Hope, sur les conséquences d’une catastrophe semblable à celle de Fukushima, également explorées par Himizu, pas encore disponible en France. On attend impatiemment Tsumetai nettaigyo, distribué au Royaume Uni en 2011 sous le titre Cold Fish.

On ne voit pas le temps passer en regardant Love Exposure, servi par un scénario habilement construit, qui brouille délicieusement les cartes. Il fait se dérouler le chassé-croisé des deux amants sous le regard inquisiteur de trois jeunes femmes castratrices, vêtues de blanc. Une belle photographie, une écriture cinématographique inventive, sous les pulsations lancinantes du Boléro de Ravel et le martèlement du deuxième mouvement de la septième symphonie de Beethoven, enjolivent cette inhabituelle historie d’amour.

Impossible de ne pas garder longtemps le souvenir des deux jeunes interprètes. Dans le rôle de Yû, Takahiro Nishijima, gueule d’ange aux traits androgynes qui trompe aisément son monde dans les vêtements féminins de la Femme Scorpion qu’il continue d’endosser pour pouvoir approcher Yôko, poupée fragile capable de violents déchaînements, incarnée par Hikari Mitsushima. Les deux jeunes acteurs ont récolté plusieurs prix pour leur remarquable prestation.

Un film protéiforme, surprenant jusque dans sa fin ouverte, inoubliable.

Cette édition comprend le film sur un Blu-ray et deux DVD, ainsi qu’un livret de 15 pages, dans un digipack à la couverture aussi belle qu’impertinente !

L’interactivité est réduite, le film n’étant présenté que dans sa version originale avec sous-titres français, très lisibles, sans être invasifs.

Voilà un Blu-ray rempli jusqu’au bord, puisqu’il supporte un programme qui avoisine les six heures !

Pour commencer, un making of (58’, SD, DD 2.0) (qu’on retrouve également sur l’un des DVD) est fait de réflexions du réalisateur sur le tournage du film, qui semble avoir été une épreuve douloureuse, au moins pour le lui qui portait toute la responsabilité de l’entreprise, à partir d’une histoire qu’il avait imaginée, sur un scénario qu’il avait écrit. Des difficultés intrinsèques tenaient au temps très court alloué au tournage, un mois, certainement trop serré en fonction de l’épaisseur du scénario (311 pages, plus de 300 scènes) et des exigences du réalisateur envers les acteurs. Document où l’on glane des informations intéressantes, mais qui aurait gagné à être raccourci de moitié après élagage de banalités.

Ensuite, uniquement sur le Blu-ray, une généreuse sélection de scènes coupées (44’, SD, DD 2.0), précédées d’un entretien avec l’homme qui aurait inspiré le sujet du film, qui a fait carrière dans le cinéma pornographique, grâce au tosatsu, photographie voyeuriste et a arraché sa soeur à l’emprise d’une secte. Tout le reste de l’histoire serait pure fiction. La plupart des scènes choisies sont des prises, écartées du montage final, de scènes vues dans le film, ce qui enlève un peu de leur intérêt.

L’encodage AVC 1080p donne une belle image, doucement contrastée, très agréable, mais manquant légèrement de piqué, probablement en raison d’une compression qu’il a fallu pousser pour faire entrer tout le programme sur un seul disque.

L’unique format proposé, japonais DTS-HD MA 5.1 donne une image sonore aérée, sans distorsions, assurant une bonne restitution des dialogues, bien placés, une belle ampleur à la musique et une spatialisation un peu trop discrète, mais cohérente, de l’ambiance.

Crédits images : HK Vidéo