Le Cerveau (1969) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Gérard Oury
Avec Jean-Paul Belmondo, Bourvil et David Niven

Édité par Gaumont

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Le 22/04/2013
Critique

À Londres, le Cerveau, génial organisateur du fameux hold-up du train postal Glasgow-Londres, met au point un nouveau coup : l’attaque du train spécial transportant les fonds secrets de quatorze nations. Or, Arthur, un petit truand évadé de prison, a la même idée et se prépare à cambrioler le train.

Comme souvent, Gérard Oury s’inspirait d’un fait divers réel pour écrire la trame du Cerveau, chef d’oeuvre du cinéma français. Cette magnifique comédie n’a pas pris une seule ride et s’impose encore comme un des plus grands divertissements de l’histoire de notre cinéma national.

Le 8 août 1963, le train postal Glasgow-Londres est pris d’assaut par une quinzaine de personnes. 2,6 millions de livres sterling s’envolent sans que les malfrats n’aient eu à se servir de leurs armes et sans avoir recours à la violence. Les membres du gang sont arrêtés mais le cerveau du groupe parvint à s’échapper… Il n’en fallait pas plus à Gérard Oury, Marcel Jullian et Danièle Thompson pour trouver le point de départ de leur nouvelle comédie après les succès gigantesques du Corniaud et surtout de La Grande Vadrouille. Mais Oury entend bien profiter des avantages que ses succès lui ont ouvert dans l’industrie du cinéma français en réclamant un casting à portée internationale. Grâce à la Gaumont et Alain Poiré, Gérard Oury obtient le budget le plus élevé du cinéma français. Deux ans de préparation seront nécessaires.

Ce qui frappe en revoyant Le Cerveau aujourd’hui c’est sa modernité. Modernité technique, visuelle et narrative. Dès le générique psychédélique, la chanson culte de The American Breed The Brain donne le ton : on est ici pour rigoler mais attendez-vous à de l’action, du rythme, du savoir-faire. Comme dans les comédies précédentes du metteur en scène, les images sont superbes et soignées. Le budget est certes conséquent mais chose rarissime (surtout de nos jours) dans le cinéma français, il se voit à l’écran. Le train plombé, les wagons, la statue de la liberté de 13 mètres de haut et de deux tonnes, le dessin-animé, les voies ferrées fournies par la SNCF, un tournage en France, en Italie, aux Etats-Unis, en Angleterre, les hélicoptères et tous les véhicules de pompiers et de police, le casting international : l’élégance de David Niven, la folie d’Eli Wallach, la poésie de Bourvil et la fougue de Belmondo… tout est réuni pour le plus grand plaisir des spectateurs.

Gérard Oury est un grand gamin qu’on imagine jubiler devant toute la technique mise à sa disposition… mais une comédie est sans doute le genre le plus difficile à réaliser. Le cinéaste se met au défi de se renouveler et par la même occasion innover dans tous les domaines. Par exemple, comment tourner la scène où le Cerveau dévoile son plan à ses hommes de main sans tomber dans la complexité ou les clichés ? Oury et Thompson ont l’idée simple mais onéreuse d’un dessin-animé, séquence anthologique. Le film est ainsi parsemé d’idées, certes très chères mais le réalisateur a pu laisser libre cours à son imagination débordante.

Gérard Oury s’appuie sur un nouveau tandem : il retrouve Bourvil après Le Corniaud et La Grande Vadrouille et engage Jean-Paul Belmondo. Une grande amitié naît par ailleurs entre ce dernier et le réalisateur qui se retrouveront pour le succès colossal de L’As des As en 1982. Même si l’antagonisme des comédiens n’équivaut évidemment pas celui de Bourvil avec De Funès, le duo fait néanmoins des étincelles de sincérité et d’amitié. Tous deux sont à l’image du film, deux personnages de bande-dessinée, deux fantaisistes. Leur respect mutuel et leur complémentarité crèvent l’écran.

Rêvant d’un cinéma français perçant aux Etats-Unis, un casting international est de rigueur. Le rôle du Cerveau est alors confié à un acteur britannique et pas des moindres, ce sera le grand David Niven. Après ce choix, les scénaristes se voient obligés d’étoffer le rôle du Colonel Matthews. La Paramount entre alors en jeu et s’associe avec la Gaumont. Le studio américain impose quelques conditions : que le film soit tourné en anglais et que le truand italien soit joué par une vedette américaine. Eli Wallach est engagé et les scénaristes doivent encore une fois revoir leur scénario pour étoffer le personnage du mafieux jaloux et allumé Frankie Scannapieco. Ces conditions imposées par la Paramount impliquent à Oury de tourner deux films : un en anglais et un en français. Si Bourvil se débrouille en anglais, Belmondo a en revanche plus de mal. Les deux montages se font parallèlement au tournage. Quatre stars mais aucune n’évince l’autre. Chacun possède son propre caractère, ses propres scènes devenues cultes.

Le 7 mars 1969, le film sort sur les écrans français. Il devient rapidement le film français le plus vu cette année là, arrive deuxième au box-office de l’année (derrière les quasi 15 millions d’entrées d’Il était une fois dans l’Ouest) et réalise 5 575 000 entrées dont 723.000 spectateurs en 29 semaines d’exclusivité à Paris. Le Cerveau sort aux Etats-Unis notamment au Radio City Hall sous le titre The Brain. Malheureusement pour Gérard Oury, son film sort dans une combinaison de salles restreinte, amputé de treize minutes à cause d’une restructuration de la Paramount. Le rêve américain de Gérard Oury ne s’est peut-être pas réalisé mais cela n’aurait été que la cerise sur le gâteau.

Le Cerveau n’a encore aujourd’hui rien à envier aux superproductions américaines ou françaises de l’époque et même d’aujourd’hui. Le spectacle reste entier, on s’amuse, on rit, les dialogues s’inscrivent dans les mémoires, les numéros d’acteurs sont jouissifs et surtout les images sont magnifiques. C’est cela Le Cerveau : une intrigue palpitante et rythmée, un casting de rêve, des paysages à foison, une superbe musique signée Georges Delerue, des courses-poursuites, du rire, de la tendresse, de l’action… Le cinéma français peut s’accrocher, on ne fera plus de films comme ceux de Gérard Oury, roi de la mécanique du rire. Inoubliable.

Présentation - 5,0 / 5

De la jaquette en passant par l’élégance des menus et la restauration du film lui-même, saluons le travail de l’éditeur qui n’a pas son pareil pour offrir au spectateur un bel objet à ranger dans sa collection Gaumont Classique.

Bonus - 4,0 / 5

Le Blu-ray comporte quelques suppléments spécialement réalisés pour cette sortie en Blu-ray. C’est le cas du module De Belmondo à Bébel (19’). Cet entretien de Philippe Durant (auteur de Belmondo chez Robert Laffont) mené par Pierre-Henri Gibert, replace Le Cerveau dans la filmographie du comédien. Notre interlocuteur évoque la collaboration de Jean-Paul Belmondo avec Bourvil et Gérard Oury, leur merveilleuse entente sur le plateau, les cascades de l’acteur. Philippe Durant explique aussi que Belmondo s’est senti quelque peu déstabilisé par l’énorme superproduction et les moyens techniques gigantesques mis à disposition du réalisateur, qui ont souvent empiété le pas sur l’aventure humaine.

Nous trouvons également un documentaire intitulé Gérard Oury : la politesse du rire (20’) dresse un portrait du réalisateur mythique du Corniaud, de La Grande Vadrouille, La Carapate, Le Coup du parapluie, Les Aventures de Rabbi Jacob, L’As des as. Constitué des témoignages de Danièle Thompson (réalisatrice, scénariste, et fille de Gérard Oury), Bernard Stora (réalisateur, scénariste et assistant de Gérard Oury), Philippe Durant (écrivain et journaliste de cinéma), Christopher Thompson (acteur, scénariste, réalisateur et petit-fils de Gérard Oury) et l’immense Pierre Richard, ce documentaire illustré par de nombreuses photographies retrace le parcours de Gérard Oury, comédien passé à la mise en scène sur les conseils de Louis de Funès qui avait décelé son potentiel comique (bien que Gérard Oury se voyait toujours confié des rôles dramatiques) et de direction d’acteurs.

Gaumont reprend également le DVD consacré aux suppléments, déjà édité en 2007.

Sept petits modules d’une minute trente en moyenne renseignent de manière humoristique, grâce à des animations, des archives de l’époque, des interviews et des images de tournage, sur certains aspects du film : L’intelligence est-elle fonction du poids du cerveau ?, Le déménagement de l’OTAN de Paris à Bruxelles, Qu’est devenue la réplique de la statue de la Liberté utilisée dans Le Cerveau ? (indice, elle se trouve depuis quarante ans en Seine-Maritime), Présentation du Pont de Tancarville, Explications du gag/cascade de la DS qui se coupe en deux, Présentation du paquebot France, Etude de l’étonnant trajet du train du Cerveau.

N’oublions pas le documentaire rétrospectif Un cerveau en or (36’) qui revient de manière approfondie sur la genèse, le tournage et la sortie du Cerveau. Les anecdotes de Danièle Thompson, Marcel Jullian (co-scénariste), Jean-Marie Poiré (réalisateur, scénariste et assistant de Gérard Oury), Jean-Claude Sussfeld (réalisateur, scénariste et assistant de Gérard Oury), Nadine Muse (assistante monteuse) et Gérard Oury via quelques images d’archives, se croisent dans un montage dynamique. Notons que le film a été tourné à la fois en anglais et en français, et que nous pouvons entendre un court extrait où Bourvil dit quelques répliques dans la langue de Shakespeare.

Image - 5,0 / 5

Epoustouflant. Il serait aujourd’hui difficile de faire mieux que cette édition HD (Encodage MPEG 4 / AVC - Format du film respecté 2.35, 1080p) qui respecte les volontés artistiques originales (dont le grain original) du chef opérateur Wladimir Ivanov, tout en tirant intelligemment et admirablement partie de l’élévation en Haute définition. Ce nouveau master semble d’ailleurs repris du DVD déjà superbe, édité par Gaumont en 2007 et dont l’image avait été labellisée THX, restaurée plan par plan dans les incontournables laboratoires Eclair et issue d’un transfert anamorphique HD d’après le négatif original. La clarté est très appréciable, notamment sur toutes les séquences en extérieur, la propreté du master est sidérante, ainsi que la stabilité, le relief, la gestion des contrastes et le piqué qui demeure impressionnant. N’oublions pas la colorimétrie, pimpante, bigarrée, restituant à merveille les partis-pris esthétiques pop de l’époque, sans lissage excessif. On se délecte de revoir ce chef d’oeuvre du cinéma français dans de telles conditions techniques !

Son - 4,5 / 5

Ce mixage DTS-HD Master Audio Mono instaure un confort acoustique total, même si on frôle parfois la saturation dans les aigus Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. N’hésitez pas à mettre le splendide et revigorant générique à fond pour vous replonger immédiatement dans l’ambiance. La composition de Georges Delerue jouit également d’un écrin phonique somptueux. L’éditeur joint également les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm
Note du disque
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F
Le 28 avril 2013
Pas de commentaire.
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Sabrina Piazzi
Le 22 avril 2013
Pas de commentaire.

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