Fanny et Alexandre (1982) : le test complet du Blu-ray

Uppsala, en Suède, au début du XXe siècle. La famille Ekdahl est réunie au grand complet pour fêter Noël. Fanny et Alexandre, les enfants choyés d’Oscar et d’Émilie, vont peu à peu découvrir les travers des adultes. La mort soudaine de leur père va bouleverser leur vie…

Fanny et Alexandre est un des chefs-d’oeuvre d’Ingmar Bergman, peut-être son plus grand film, luxuriant pour la richesse des images et la profusion de personnages, également très intime par son contenu quasi-autobiographique.

Fanny et Alexandre, c’est la découverte par deux enfants de la réalité du monde des adultes qui prend, jour après jour, le pas sur les fantasmes et la magie de l’enfance. C’est l’apprentissage de la distinction entre le bien et le mal, entre la justice et l’injustice, entre la vérité et le mensonge. C’est, quand tombent, les uns après les autres, les masques qui idéalisent les proches, la révélation de leur vraie personnalité, notamment de leurs lâchetés, de leur méchanceté.

Fanny et Alexandre montre qu’un seul événement, ici la mort du père, peut arracher brutalement les deux enfants à une vie douce et paisible, où ils n’étaient exposés qu’aux peurs inoffensives de l’enfance, pour les emprisonner dans une forteresse glaciale et dépouillée, les livrer à l’acrimonie d’un despote manipulateur.

Les thèmes qui hantent tout l’oeuvre de Bergman sont bien présents dans Fanny et Alexandre : la culpabilité, la mort, le questionnement sur la religion, la difficulté de vivre en couple. Mais ils sont ici présentés dans une exubérance de couleurs éblouissantes qui tranche avec la sobriété de la plupart de ses autres films en noir et blanc, tel que Le Septième sceau, récemment critiqué. Ingmar Bergman prolongera, d’une certaine manière, Fanny et Alexandre en écrivant dix ans plus tard le scénario d’un autre monument du cinéma, Les Meilleures intentions (Den Goda viljan) dont la réalisation fut confiée à Bille August. Ce merveilleux film a édité en France par Blaq Out, dans un coffret de trois DVD offrant la version longue pour la télévision et la version raccourcie (pas loin de trois heures, tout de même) pour la distribution en salles.

Les deux versions de Fanny et Alexandre sont présentées dans cette nouvelle édition Gaumont (coproducteur du film) : la version originelle, destinée à une diffusion à la télévision, en quatre épisodes d’une durée totale de 322 minutes, ainsi que la version pour les salles de cinéma, raccourcie à 189 minutes.

Succès universel pour ce film qui remporta quatre Oscars : pour la photo, pour la direction artistique et les décors, pour les costumes et l’Oscar du meilleur film étranger. Il obtint, en France également, le César du meilleur film étranger.

Les quatre disques sobrement sérigraphiés - trois Blu-ray supportant les deux versions et un DVD de suppléments - sont présentés dans un digipack décoré des portraits en médaillon des quatre personnages principaux, inséré dans un étui orné d’une photo emblématique de la fin heureuse du film.

Le menu principal animé et musical offre le choix, pour chacune des durées, entre la version originale (avec sous-titres français optionnels) ou un doublage en français.

Deux heures et quarante minutes indispensables, logées sur le DVD, en plus d’une bande-annonce sur le Blu-ray de la version cinéma.

Pour commencer, un document inédit de 18’, un intéressant entretien avec Olivier Assayas qui nous démontre sa connaissance du cinéma de Ingmar Bergman et la passion qu’il en éprouve. Il insiste sur les thèmes récurrents de ses films, sur la diversité de son oeuvre, sur l’évolution continuelle de son style. Assayas voit en Bergman « l’inventeur d’un cinéma moderne auquel se réfère la nouvelle vague ». Les propos sont illustrés par des extraits du film et des photos de plateau.

Ensuite, repris de l’édition Criterion de 2004, avec de nombreux extraits du film, A Bergman Tapestry (39’), contenant une conversation entre Bergman et le critique suédois Nils Petter Sundgren et les souvenirs et anecdotes rapportés par les contributeurs du film, producteurs, directrice artistique, acteurs, etc. Tous s’expriment en anglais, sauf l’acteur Erland Josephson. Sous-titres français optionnels.

Enfin, The Making of Fanny & Alexander (105’), un documentaire réalisé par Bergman pendant le tournage. Passionnant témoignage de sa concentration sur le plateau, de sa direction d’acteur, de son amabilité avec les techniciens, de sa délicatesse vis-à-vis des enfants. En suédois avec sous-titres français optionnels.

La qualité de l’image restaurée pour l’édition Criterion a encore été peaufinée et bénéficie maintenant de l’apport de la haute définition (AVC, 1080p). Elle apparaît plus limpide, avec un gain de luminosité qui renforce les contrastes. Pas la moindre tache, pas la moindre rayure n’ont échappé au minutieux travail de restauration qui assure une remarquable stabilité des couleurs.

L’encodage DTS-HD Master Audio 1.0 produit un son étonnamment propre, restituant les dialogues avec clarté, dans un bon équilibre avec l’accompagnement musical. Juste quelques légères saturations et distorsions vite oubliées dans les passages musicaux à fort volume.

Crédits images : © Gaumont