Qu'est-il arrivé à Baby Jane ? (1962) : le test complet du Blu-ray

What Ever Happened to Baby Jane?

Réalisé par Robert Aldrich
Avec Bette Davis, Joan Crawford et Victor Buono

Édité par Warner Bros. Entertainment France

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Le 09/12/2013
Critique

Au temps du cinéma muet, « Baby » Jane est une grande star, une des premières enfants prodiges. Sa soeur Blanche, timide et réservée, reste dans l’ombre. Dans les années 30, les rôles sont inversés, Blanche est une grande vedette, Jane est oubliée. Désormais, bien des années après, elles vivent en commun une double névrose. Blanche, victime d’un mystérieux accident, est infirme et semble tout accepter d’une soeur transformée en infirmière sadique qui multiplie les mauvais traitements…

Anciennes égéries des Studios Warner et éternelles rivales, Bette Davis et Joan Crawford se trouvent réunies pour la seule et unique fois devant la caméra dans le chef-d’oeuvre Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?, adapté du roman d’Henry Farrell et réalisé par Robert Aldrich en 1962. Réputées pour leurs tempéraments explosifs sur les plateaux, les deux comédiennes livrent pourtant une de leurs plus grandes performances dans ce film culte, résolument moderne, oscillant entre plusieurs genres au point de désorienter encore admirablement les spectateurs contemporains.

Robert Aldrich dirige d’une main de maître ces deux reines de l’âge d’or hollywoodien, ces deux icônes, dont il égratigne l’ancienne beauté grâce à son directeur de la photographie Ernest Haller (Autant en emporte le vent), n’hésitant pas à avoir recours à de nombreux gros plans montrant des visages chiffonnés, blafards, creusés, des cheveux filasse, des cernes marquées, des sourcils épais, un maquillage à outrance, grotesque, terrifiant.

Véritablement investies, Bette Davis et Joan Crawford livrent une ahurissante composition, chacune jouant sa partition certes, mais qui met finalement l’autre en valeur. Si l’accrochage tant attendu des comédiennes se déroulait en dehors du plateau, la tension devait être également présente au moment des prises de vue et participe à l’atmosphère anxiogène. Robert Aldrich joue avec les légendes des deux anciennes stars du cinéma des années 1930-1940, dont la carrière était alors sur le déclin, puisque son film traite de l’impitoyable industrie du spectacle, qui créée des artistes aussi facilement qu’elle les broie.

A sa sortie, nombreuses critiques y voient une réinterprétation de Boulevard du Crépuscule avec le personnage de Bette Davis qui rappelait celui de Norma Desmonds, interprété par Gloria Swanson dans le chef-d’oeuvre de Billy Wilder, quand Jane se raccroche désespérément à son ancienne gloire et carrière, au point de perdre complètement les pédales. Si nous pouvons effectivement y penser, le film de Robert Aldrich s’en démarque constamment.

Quasi-huis clos, étouffant, Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? ne tombe jamais dans le théâtre filmé. La mise en scène est sans cesse inventive, les cadres remarquables, le réalisateur distille un suspense qui joue avec les nerfs des spectateurs, la caméra est très souvent en mouvement. Avec son montage virtuose et sec (par le collaborateur fidèle Michael Luciano), Aldrich déjoue les attentes, étire ou au contraire contracte le temps. Nous nous retrouvons accrochés à notre fauteuil à plusieurs reprises ou à nous redresser lors des retours de Jane.

Triomphe commercial et critique, 5 fois cité aux Oscars (dont une neuvième pour Bette Davis), Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? demeure un monument incontournable et exceptionnel du genre - lequel au fait ? - thriller psychologique époustouflant, film d’horreur violent et cruel, comédie surréaliste, folle et paranoïaque, qui a depuis fait moult émules dont un certain David Lynch avec son extraordinaire Mulholland Drive.

Présentation - 3,5 / 5

Dommage que l’éditeur n’ait pas repris le visuel d’une des anciennes éditions DVD car celui du Blu-ray est moins attractif. De plus, si le menu principal est musical, il demeure désespérément fixe. En revanche, la sérigraphie du disque est vraiment très belle.

Bonus - 4,0 / 5

En dehors du commentaire audio et de la bande-annonce originale, tous les suppléments (non mentionnés sur la jaquette) sont disponibles en version originale sous-titrée en français.

Le premier bonus est un commentaire audio réalisé par Charles Busch et John Epperson. Ce dernier est plus connu sous le nom de Lypsinka, célèbre transformiste aux Etats-Unis, tandis que le premier s’est fait une spécialité des rôles de femmes. Ce duo singulier s’extasie devant le film et se penche (parfois) sur l’interprétation des deux comédiennes principales. N’attendez donc pas un commentaire informatif.

Le documentaire Bette et Joan : Blind Ambition (30’) dresse un excellent parallèle entre les carrières rivales de Bette Davis et de Joan Crawford, leurs débuts, leurs succès, leurs triomphes, leurs échecs, leurs points communs, leurs différences, jusqu’à ce que Robert Aldrich les réunit devant sa caméra dans Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? pour la seule et unique fois. Les bagarres en dehors du plateau sont mémorables et racontées avec efficacité. Les propos d’historiens du cinéma, de critiques, d’auteurs se croisent à travers des extraits de films divers et variés, sur un rythme soutenu.

L’éditeur joint ensuite un making of d’époque (7’), constitué d’images de tournage, durant lequel nous pouvons voir Robert Aldrich à l’oeuvre avec son équipe technique sur le plateau, tandis que les stars se font attendre. Pour les plus pointilleux, disons que la caméra s’immisce ici durant le 23e jour de tournage.

Bette Davis pousse la chansonnette dans le segment intitulé The Andy Williams Show (2’), où la comédienne invitée dans une émission de télévision, entonne What Ever Happened to Baby Jane ?.

Ce n’est pas encore terminé, loin de là. Vous croyiez tout savoir sur Bette Davis (1908-1989) et sur Joan Crawford (1906-1977) ? Et bien détrompez-vous ! Warner livre deux documentaires rétrospectifs sur les deux icônes hollywoodiennes. All About Bette (48’) et Film Profile : Joan Crawford (29’) en disent bien plus que durant le module Bette et Joan : Blind Ambition. Non seulement les extraits d’interviews et de films sont multipliés, ainsi que les différentes archives, mais les amateurs de potins seront ravis d’apprendre que rien n’est dissimulé sur la vie privée chaotique des deux comédiennes, surtout en ce qui concerne Bette Davis, dont le documentaire dure plus longtemps puisque ses quatre mariages sont largement passés en revue, tout comme ses problèmes avec sa fille. Ce documentaire, présenté par Jodie Foster, date de 1993, et donne un très bel aperçu des 60 ans de carrière de Bette Davis.

Film Profile : Joan Crawford est en grande partie constituée d’une interview de l’actrice menée par le journaliste de cinéma Philip Jenkinson pour la BBC. Plus épuré, ce segment fait moins dans la mouvance « Voici » que celui consacré à Bette Davis et se révèle plus passionnant à suivre, surtout quand Joan Crawford partage quelques souvenirs de tournage liés à Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?.

Le supplément le plus inattendu et le plus original du lot est celui intitulé What Ever Happened to Baby Jane? Dan-O-Rama Movie Mix, qui comme son titre l’indique se révèle être un remixe musical constitué de répliques tirées du film de Robert Aldrich. C’est laid et inutile.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce du film, constitué en grande partie des images tirées du making of évoqué plus haut.

Image - 4,5 / 5

Quel plaisir de redécouvrir les bijoux de l’âge d’or d’Hollywood dans de telles conditions ! Warner se devait de restituer la beauté originelle du N&B de Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?, présenté pour l’occasion dans sa version intégralement restaurée. L’apport HD demeure omniprésent, fabuleux, offrant aux spectateurs un relief inédit, des contrastes denses et chatoyants, ainsi qu’un rendu ahurissant des gros plans peu flatteurs des deux comédiennes. La propreté du master est ébouriffante, la stabilité (y compris sur les fondus enchaînés) et la clarté sont de mise, le grain cinéma respecté et la compression AVC de haute volée. A l’exception de quelques plans peut-être plus vaporeux ou moins pointus, nous nous trouvons devant la plus belle copie à ce jour du chef-d’oeuvre de Robert Aldrich.

Son - 4,0 / 5

Point de remixage 5.1 superflu à l’horizon mais la version originale jouit néanmoins d’une élévation en DTS-HD Master Audio 1.0, tandis que la langue de Molière se contente d’une piste Dolby Digital 1.0. Aucun souffle, craquement, ni fluctuations ne sont à déplorer sur la version anglaise, le confort acoustique est clair, net, précis tout du long. La piste française se révèle plutôt soignée dans son doublage, même si un souffle se fait entendre, ainsi que divers chuintements et saturations. De plus, cette version a tendance à mettre les dialogues un peu trop en avant, au détriment des effets annexes.

Crédits images : © Warner Bros.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

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Giuseppe Salza
Le 13 décembre 2013
Pas de commentaire.
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Franck Brissard
Le 30 novembre 2013
Pas de commentaire.

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