Le Secret derrière la porte

Le Secret derrière la porte (1947) : le test complet du Blu-ray

Secret Beyond the Door

Réalisé par Fritz Lang
Avec Joan Bennett, Michael Redgrave et Anne Revere

Édité par Carlotta Films

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Le 25/04/2014
Critique

Lors d’un séjour au Mexique, Celia Barrett, une riche héritière américaine, tombe amoureuse d’un architecte du nom de Mark Lamphere. Ils se marient sur un coup de tête. Un soir, pendant leur lune de miel, Mark part subitement à New York. Lorsque Celia le rejoint, elle découvre la face cachée de l’homme qu’elle vient d’épouser : celui-ci a eu un fils d’un premier mariage et son ex-femme est morte dans des conditions mystérieuses. Mark partage également une étrange passion : il reconstitue des chambres dans lesquelles des meurtres ont eu lieu…

Film emblématique de la période américaine de Fritz Lang, Le Secret derrière la porte se situe quelque part entre Rebecca et la légende de Barbe Bleue. Le cinéaste de M le maudit s’empare du thème de la psychanalyse pour nourrir son univers tortueux. Brillamment incarné par le couple Joan Bennett - Michael Redgrave, ce grand classique baroque teinté d’onirisme et de poésie, n’est peut-être pas le chef d’oeuvre américain de Fritz Lang, mais demeure une oeuvre maîtresse et culte du réalisateur autrichien.

Réalisé à mi-chemin de sa carrière américaine et de son retour en Allemagne, Le Secret derrière la porte demeure marqué par les éclairages gothiques entre ombre et lumière issus du courant de l’expressionnisme allemand, mais aussi par l’émergence des films de « psychanalyse » (en vogue aux Etats-Unis), initiés entre autres par Rebecca (1940), La Maison du Docteur Edwards (1945) et un soupçon… de Soupçons (1941) d’Alfred Hitchcock, dont Fritz Lang n’a jamais caché la grande influence sur son oeuvre.

Grand amateur du travail de Sigmund Freud, Fritz Lang n’aura de cesse au cours de sa longue et prolifique carrière, de se pencher sur la question du meurtre, des assassins, de la culpabilité. Ici, les comédiens se trouvent confinés et perdus au milieu d’une bâtisse labyrinthique (merveilleux décors, splendide photographie) symbolisant les méandres de l’esprit torturé et malade du personnage psychotique obsédé par le meurtre interprété par Michael Redgrave. Merveilleusement mis en scène et photographié, Le Secret derrière la porte n’a pourtant pas la même force que les plus grands chefs d’oeuvres du maître, sans doute en raison de son scénario - d’après le roman Museum Piece No. 13 de Rufus King - souvent prévisible.

Dans sa quatrième et dernière collaboration avec le réalisateur au célèbre monocle, Joan Bennett promène son charme innocent et s’apparente à une marionnette égarée, excellemment dirigée (manipulée ?) par Fritz Lang, prisonnière de ses fantasmes dans ce petit théâtre traumatique aux couloirs démesurés.

Inquiétant, froid et diabolique, Le Secret derrière la porte est un film basé sur l’allégorie et les symboles, qui a certes quelque peu perdu de sa force avec les années (une voix-off un peu pesante aujourd’hui, un dernier acte maladroit), mais qui a en revanche conservé tout son pouvoir hypnotique bercé par la fascinante partition de Miklós Rózsa… enregistrée à l’envers.

Présentation - 5,0 / 5

La superbe jaquette est glissée dans un boîtier classique de couleur noire, lui-même recouvert d’un surétui liseré rose. Le menu principal est animé et musical. Encore un superbe objet made in Carlotta.

Bonus - 2,5 / 5

Si vous détenez l’édition DVD Collector sortie chez Wild Side, conservez-la pour le bonus intitulé Le dinosaure et le bébé : une conversation d’une heure entre Fritz Lang et Jean-Luc Godard.

Une fois n’est pas coutume, les suppléments concoctés par Carlotta, laissent à désirer…

Joan Bennett : La « Chose enrobée de cellophane » (11’) : « Joan Bennett n’a pas été une star, mais une épiphanie fulgurante du cinéma que le succès populaire a dédaignée. Cependant de grands cinéastes, tel Fritz Lang, ont réussi à l’arrêter dans sa course ». Carlotta livre un exposé sur la comédienne Joan Bennett (1910-1990) de Christian Viviani lu en voix-off par une comédienne (gnan-gnan et surtout très agaçante), publiée dans la revue Positif de Juin-Juillet 1991. Si ce module est bien illustré (superbes photos de tournage), les propos manquent cruellement d’intérêt (les mariages, les divorces), comme si nous lisions une biographie sur Wikipédia consacrée à l’actrice du Secret derrière la porte. Les titres de films s’enchaînent sur un rythme lent et nous apprenons bien peu de choses sur Le Secret derrière la porte, quatrième et dernière collaboration entre Fritz Lang et Joan Bennett.

« Pourquoi suis-je intéressé par le meurtre ? » (18’) : Pourquoi Fritz Lang est-il « comme des millions de citoyens américains paisibles et respectueux des lois » fasciné par le meurtre ? Cette mise en images d’un entretien avec Fritz Lang, dirigé par Alfred Eibel et extrait de Trois Lumières, écrits sur le cinéma aux Éditions Ramsay Poche Cinéma, est intéressante puisque le cinéaste se livre sur ses obsessions (le meurtre donc, mais aussi les monstres humains, le désir sexuel), mais passe mal le cap de la « mise en scène ». On aurait préféré un petit encart à lire glissé dans le boîtier du Blu-ray, plutôt que d’écouter une voix monocorde et même plombante pendant près de vingt minutes. Cette fois encore, demeurent les photos, gravures et peintures qui illustrent cette présentation.

L’interactivité se clôt sur une belle galerie de photos et les credits du Blu-ray.

Image - 4,5 / 5

Le film de Fritz Lang avait bénéficié d’une édition en DVD il y a une dizaine d’années chez Wild Side. Le nouveau master restauré HD (codec AVC) au format respecté 1.33 du Secret derrière la porte livré par Carlotta se révèle extrêmement pointilleux en terme de piqué, de gestion de contrastes (noirs denses, blancs lumineux), de détails ciselés, de clarté (l’éclat des yeux de Joan Bennett) et de relief. La propreté de la copie est souvent sidérante, la nouvelle profondeur de champ permet d’apprécier la composition des plans de Fritz Lang, la photo entre ombre et lumière signée par le grand Stanley Cortez (La Nuit du chasseur, La splendeur des Amberson) retrouve une nouvelle jeunesse doublée d’un superbe écrin, et le grain d’origine a heureusement été conservé. Seuls petits accrocs constatés : des petits points noirs et blancs, des contrastes peut-être un peu trop poussés sur certaines séquences, de légers tremblements. Mais les fondus enchaînés apparaissent stables et n’occasionnent pas ou peu de décrochages. Il s’agit sans nul doute de la plus belle copie du Secret derrière la porte disponible à ce jour.

Son - 4,5 / 5

Comme pour l’image, le son a également été restauré de fond en comble. Résultat : aucun souci acoustique constaté sur ce mixage anglais DTS-HD Master Audio 1.0. Le confort phonique de cette piste unique est total, les dialogues sont clairs et nets (surtout la voix-off), très rarement étouffés, les effets annexes probants et les plages de silence très impressionnantes. La partition entêtante du mythique Miklós Rózsa (Fedora, La Vie privée de Sherlock Holmes) est impeccablement restituée.

Crédits images : © Carlotta

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm