Le Château de l'araignée (1957) : le test complet du Blu-ray

Kumonosu jo

Réalisé par Akira Kurosawa
Avec Toshirô Mifune, Isuzu Yamada et Minoru Chiaki

Édité par Wild Side Video

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Le 20/03/2017
Critique

Le Château de l'Araignée

Le Japon, au XVIe siècle, est le théâtre d’affrontements entre seigneurs. Washizu et Miki, deux samouraïs, rentrent chez eux après avoir victorieusement défendu les couleurs de Tsuzuki, leur shogun. Égarés dans une forêt, ils rencontrent une vieille femme, un esprit en réalité, qui prédit à Miki qu’il deviendra le chef du fort n° 1 et à Washizu qu’il sera à la tête de la baronnie du Nord, avant de régner sur Le Château de l’Araignée, le fief de Tsuzuki, jusqu’à ce que le fils de Miki le remplace. Tsuzuki accomplit une partie de la prédiction en attribuant à Miki le fort n° 1 et à Washizu la baronnie du Nord. Asaji, l’épouse de Washizu, le pousse à assassiner Tsuzuki pour hâter la réalisation du reste de la prophétie.

Le Château de l’Araignée (Kumonosu-jô), le dix-septième film d’Akira Kurosawa, sortit en 1957, trois ans après Les 7 samouraïs, entre Vivre dans la peur (Ikimono no kiroku, 1955) et Les Bas-fonds (Donzoko

Le Château de l’Araignée est une adaptation assez libre du Macbeth de William Shakespeare qui inspirera Akira Kurosawa pour Les Salauds dorment en paix (Warui yatsu hodo yoku nemuru, 1960), une adaptation encore plus libre de Hamlet et, bien plus tard, pour Ran (1985), adapté de King Lear.

Le Château de l'Araignée

Huitième des seize films avec Toshirô Mifuné, au cours d’une longue collaboration qui a commencé en 1948 avec L’Ange ivre (Yoidore tenshi), Le Château de l’Araignée est la première des réalisations d’Akira Kurosawa dont le style s’inspire du théâtre Nô, une forme épurée, vieille de six siècles, suivant laquelle les acteurs, le visage masqué, expriment leurs sentiments par une gestuelle codifiée. Le visage de Toshirô Mifuné imite à plusieurs reprises les masques du Nô, notamment le heita (l’un des 138 masques). Et celui d’Isuzu Yamada, l’actrice qui incarne son épouse, sous un maquillage blanc, en apparence impassible, communique avec force sa soif de pouvoir. La référence au théâtre Nô est encore appuyée par une économie de dialogues, des gestes lents et très maîtrisés, des décors et costumes stylisés, dans une écriture filmique épurée, avec beaucoup de cadres fixes, très soigneusement composés, à l’intérieur desquels se déplacent les acteurs.

Ce style contraste, quand la caméra devient mobile, avec l’animation effervescente de certaines scènes : combats brutaux, cavaliers égarés dans la forêt, suivis par un magnifique travelling latéral. Le paroxysme est atteint dans la sublime scène finale, définitivement gravée dans la mémoire de tout cinéphile, où Washizu, le corps hérissé de flèches, invective ses soldats jusqu’à ce que son dernier cri soit brusquement bloqué par la flèche qui lui traverse la gorge. Une des images les plus iconiques de tout le cinéma !

Le Château de l'Araignée

Présentation - 4,5 / 5

Cette édition s’inscrit dans la Collection Akira Kurosawa, les années Toho (1943-1970), présentée avant l’accès au menu : « dix-sept films remasterisés et inédits en HD, dévoilés d’octobre 2015 à février 2017 » (le calendrier initial a subi quelque retard). La sortie de trois autres titres est annoncée pour le 17 mai : Les Bas-fonds (1957), Entre le ciel et l’enfer (1963) et Les Salauds dorment en paix (1963).

Le Château de l’Araignée (110 minutes) et ses suppléments (45 minutes) sont présentés sur deux supports, Blu-ray et DVD (BD-50 et DVD-9), logés à l’intérieur des deux couvertures d’un Mediabook aux dimensions d’un DVD. En couverture, une photo du film traitée au lavis.

Un menu musical et animé (avec une bande de la couleur du dos du livre) propose le film dans sa seule version originale, au format DTS-HD Master Audio 1.0 sur le Blu-ray, avec sous-titres imposés, placés légèrement trop haut sur l’image.

À l’intérieur, un livret de 66 pages, illustrées de photos du film, du tournage, de Ran (1985) et du Macbeth d’Orson Welles (1948) et d’une reproduction de l’affiche, contient un article de Linda Tahir (elle enseigne l’économie et la réalisation cinématographiques à Paris VIII) qui énumère quelques adaptations de Macbeth pour le cinéma, celle de Roman Polanski et celle de Justin Kurzel, en tête desquelles elle place celle réalisée en 1948 par Orson Welles et celle de Kurosawa. Elle résume ensuite les événements du XIe siècle qui ont inspiré Shakespeare avant d’évoquer la vogue au Japon des films historiques « un genre refondateur d’identité », selon Robin Gatto, bienvenu dans les années d’après-guerre. Elle souligne aussi que Kurosawa n’a pas été le premier cinéaste nippon à adapter des œuvres littéraires européennes, et passe en revue l’importance des moyens investis dans la production du film, notamment pour la construction du Château de l’Araignée sur les pentes du Fuji-Yama, les choix scénaristiques, esthétiques et de direction des acteurs faits par Kurosava, dans un style inspiré par le théâtre Nô. Linda Tahir termine son article par une biographie d’Isuzu Yamada, l’interprète d’Asaji, la Lady Macbeth de l’Empire du soleil levant.

Le Château de l'Araignée

Bonus - 4,0 / 5

Les bonus vidéo (4/3, SD, VOST) sont intégralement repris de l’Édition collector Wild Side de 2006.

Le théâtre Nô et le cinéma (23’) : après un rapide panoramique sur l’oeuvre d’Akira Kurosawa (une trentaine de films en 55 ans), le documentaire montre les honneurs faits au cinéaste avec la projection du Château de l’Araignée au National Film Theatre en février 1957, à l’occasion de l’ouverture du nouveau bâtiment sur la rive sud de la Tamise, en présence de John Ford et Laurence Olivier. Akira Kurosawa rappelle les principes du Nô (illustrés par quelques extraits d’une pièce de théâtre) dont il s’est aussi inspiré pour la réalisation de Ran. Sont également rappelées les difficiles conditions de tournage sur les flancs du Mont Fuji.

Suit, Dans la toile du maître (21’) : des entretiens avec la scripte et l’accessoiriste du Château de l’Araignée sur le choix de Kurosawa de surexposer les visages, sur la peur qu’avaient de lui ses collaborateurs. Ils rapportent, l’un et l’autre, de nombreuses anecdotes sur le tournage…

Pour finir, une bande-annonce passablement abîmée (montrant les bienfaits de la restauration).

Le Château de l'Araignée

Image - 4,0 / 5

L’image, au format originel de 1.37:1 (1080p, AVC), a été soigneusement débarrassée des marques du temps, sans altération de la texture argentique, et soumise à un transfert 2K. Ne subsistent que quelques rarissimes taches et une instabilité lumineuse occasionnelle dans les scènes filmées dans la brume qui ne laissent paraître aucun défaut de compression.

Les blancs sont lumineux et les noirs profonds, avec des contrastes que les puristes jugeront poussés à l’excès, à juste titre, car dépassant les intentions du réalisateur. En contrepartie, le film a pris un sacré coup de jeune !

Le Château de l'Araignée

Son - 5,0 / 5

Le son (DTS-HD Master Audio 1.0) profite, lui aussi, d’une soigneuse élimination des craquements, sautes ou crachotements. Juste quelques saturations et un inévitable souffle modéré et auquel on s’habitue vite et qui n’aurait pu être éliminé qu’au prix d’une dénaturation de la bande originale.

Une assez bonne dynamique et une ouverture raisonnable de la bande passante mettent en valeur l’intéressante composition avant-gardiste pour flûte, percussions et chœur de Masaru Satô. Élève de Fumio Hayasaka (Rashomon, 1950), il signera l’accompagnement musical de dix films de Kurosawa, en commençant par Les 7 samouraïs.

Le Château de l'Araignée

Crédits images : © Wild Side

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 20 mars 2017
Le Château de l’Araignée est la première des réalisations d’Akira Kurosawa dont le style s’inspire du théâtre Nô, une forme épurée, hiératique. Cette brillante adaptation du Macbeth de Shakespeare avec sa fin hallucinante se range parmi les chefs-d’œuvre du cinéma mondial. Elle ressort dans une remarquable édition.

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Le Château de l'araignée
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