Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (1970) : le test complet du Blu-ray

Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto

Réalisé par Elio Petri
Avec Gian Maria Volonté, Florinda Bolkan et Gianni Santuccio

Édité par Carlotta Films

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Le 23/08/2017
Critique

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon

À Rome, le chef de la brigade criminelle est sur le point d’être promu au poste de directeur de la section politique. Persuadé que ses fonctions le placent au-dessus des lois, il égorge sa maîtresse, Augusta Terzi, au cours d’une de leurs joutes amoureuses. Avec un sang-froid parfait, il met tout en oeuvre pour prouver que personne n’aura l’intelligence, ni même l’audace, de le soupçonner et de troubler ainsi la bonne hiérarchie sociale. Il s’ingénie à semer des preuves accablantes, relançant l’enquête quand celle-ci s’égare…

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto) est le septième des douze longs métrages réalisés par Elio Petri, disparu trop tôt à l’âge de 53 ans, et son chef-d’oeuvre.

Un film d’auteur, sur un scénario coécrit avec Ugo Pirro, autour d’une idée tout à fait originale. Également un film d’acteur, avec Gian Maria Volontè en tête d’affiche, que les deux westerns de Sergio Leone, Pour une poignée de dollars et, l’année suivante, Et pour quelques dollars de plus ont rendu célèbre. Il tient là son meilleur emploi et peut légitimement partager avec Elio Petri la renommée internationale d’Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon.

Il donne une inoubliable présence au Dottore. Un personnage arrogant, manipulateur, méprisant, parlant haut avec un fort accent sicilien, humiliant ses subalternes. Un personnage étrange, inquiétant, probablement un psychopathe, apparemment incapable de la moindre empathie.

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon se distingue aussi par l’impeccable réalisation classique d’Elio Petri qui, avec la complicité de Luigi Kuveiller, le chef opérateur de la moitié de ses films, ce qui nous vaut des cadres sophistiqués, saisis par une caméra fluide dans de longs plans séquences dont celui de la visite des archives de la police fournit un bon exemple.

À noter, également, la qualité des décors, avec le contraste de l’appartement art nouveau d’Augusta, multicolore et encombré de bibelots, rideaux de perles et voilages et l’appartement dépouillé du Dottore, dont les grandes baies vitrées éclairent un mobilier ultramoderne.

« -Je veux un avocat. -On n’est pas en Amérique ici ! »

En toile de fond, Elio Petri jette, à une période très troublée de l’histoire de l’Italie, un regard sans complaisance sur les institutions en insistant sur l’atteinte aux libertés individuelles, sur les interrogatoires musclés, encouragés par un pouvoir protégé par une absolue impunité. Une pose du chef de la police, les poings sur les hanches et le menton relevé, est une allusion sans équivoque au Duce.

Si Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon ne fait aucun mystère sur le coupable de l’assassinat perpétré sous nos yeux au début du film, le jeu du chat et de la souris de son auteur avec les autorités réussit à installer un réel suspense jusqu’au dénouement très ambigu du film.

Un film fascinant ! Une réédition très attendue.

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon

Présentation - 3,0 / 5

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (115 minutes) et ses suppléments (67 minutes) tiennent sur un Blu-ray double couche, logé dans un boîtier de 11 mm, glissé dans un fourreau. Le menu animé et musical propose le choix entre version originale, avec sous-titres optionnels, et doublage en français, les deux au format DTS-HD Master Audio 1.0.

Carlotta ressort, à l’identique, son édition épuisée de 2010, mais pour la première fois en haute définition. On y retrouve donc les mêmes bonus, à l’exception du documentaire de 84 minutes de Federico Bacci,  Elio Petri, notes sur un auteur, que contenait l’ édition limitée sur deux DVD.

Bonus - 4,0 / 5

En supplément, la reprise de trois documentaires produits par Allerton Films et Carlotta pour l’édition de 2010.

Regards croisés (21’) : Paola Pegoraro Petri, veuve du cinéaste, et Marina Cicogna, productrice du film, évoquent le tournage, les réticences de Gian Maria Volontè à participer à un film « bourgeois », l’aisance avec laquelle Elio Petri mettait en scène dans l’espace réduit des deux appartements dans lesquels ont été tournées plusieurs scènes, le bon accueil de la critique et les 16 prix glanés par le film, dont le Grand prix du jury et le Prix de la critique internationale FIPRESCI à Cannes en 1970, puis l’Oscar du meilleur film étranger en 1971…

La stratégie de la tension (26’). Fabio Ferzetti, critique à Il Messagero, interrogé par la réalisatrice et scénariste Annarita Zambrano, rappelle que la sortie du film, en février 2010, suivait de peu l’attentat à la bombe de la Piazza Fontana qui fit, le 12 décembre 1969, 16 morts et près d’une centaine de blessés, en marquant le point de départ de « la stratégie de la tension » qui allait éprouver l’Italie pendant une vingtaine d’années, les années de plomb. Par crainte que la sortie du film mettant en cause la police trouble l’ordre public, il fut soumis au visa d’une commission ad hoc. Film d’auteur et d’acteur (Elio Petri et Gian Maria Volontè ont mis beaucoup d’eux-mêmes dans l’oeuvre), Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon fut bien reçu par la critique, sauf par celle de l’extrême gauche, mais ne connut pas le succès commercial qu’il méritait alors qu’il est considéré comme une oeuvre remarquable du cinéma italien.

Ennio Morricone, la musique au corps (20’). Interrogé par Fabio Ferzetti, le compositeur évoque sa rencontre inoubliable avec Elio Petri qui lui a dit, d’entrée de jeu, qu’il ne travaillait jamais plus d’une fois avec un compositeur (il signera pourtant l’accompagnement musical de cinq autres de ses films). La lecture du scénario (il n’a vu aucune image du film avant de rendre sa partition) a donné à Ennio Morricone l’idée d’une musique grotesque qu’il a pu composer en toute liberté, en se limitant à seulement deux thèmes, développés dans une suite chromatique d’accords arpégés produits par des instruments pauvres, mandoline, pianoforte et guimbarde, soutenus par le rythme d’un « bruit de bouche » créé par un synthétiseur. Ennio Morricone se souvient du tour qu’Elio Petri lui a joué en lui faisant visionner une bobine de dix minutes avec un accompagnement atroce en lui faisant croire qu’il l’avait préférée à sa composition.

Dommage que le documentaire Elio Petri, notes sur un auteur n’ait pas accompagné cette réédition.

Image - 5,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC) a été restaurée, à partir du négatif 35 mm original, par Colorworks, une filiale de Sony Pictures, en collaboration avec la Cineteca di Bologna et L’Immagine Ritrovata. Cette restauration a abouti à une image stable, précise sur toute la profondeur du champ, lumineuse, avec des couleurs naturelles agréablement saturées, de solides contrastes, des noirs denses, assurant une parfaite lisibilité de toutes les séquences, y compris dans les scènes d’intérieur faiblement éclairées. Le bruit a été éliminé, sans altération de la texture argentique.

Un travail exemplaire !

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master 1.0 de la version originale, débarrassé de tout bruit parasite et du souffle, donne une clarté et une ampleur surprenantes à l’accompagnement musical d’Ennio Morricone, pratiquement sans distorsions. Si la dynamique est assez limitée, les dialogues sont précisément restitués, toujours faciles à suivre. En comparaison, le doublage en français, au timbre métallique, paraît étriqué.

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon

Crédits images : © Carlotta Films

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 23 août 2017
Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon, un troublant jeu du chat et de la souris se déroulant dans l’Italie sombre des « années de plomb », est probablement le chef-d’œuvre d’Elio Petri. Fascinant, comme l’inoubliable accompagnement musical d’Ennio Morricone !

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Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon
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