Orfeo (1985) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Claude Goretta
Avec Gino Quilico, Audrey Michaël et Carolyn Watkinson

Édité par Gaumont

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Le 14/11/2017
Critique

Orfeo

Nymphes et bergers célèbrent joyeusement l’union d’Orphée et Eurydice. La fête est vite interrompue par la mort d’Eurydice, mordue par un serpent. Orphée supplie en vain Charon, le passeur des âmes, de lui laisser reprendre sa bien-aimée. Mais Proserpine, charmée par son chant, obtient de Pluton, son époux, qu’Orphée puisse ramener Eurydice à la vie. Pluton, dieu des enfers, pose une condition : Orphée perdra définitivement Eurydice s’il se retourne pour la regarder avant d’avoir franchi la porte du royaume des morts…

Orfeo, L’Orfeo, favola in musica (une fable en musique) est l’un des tout premiers opéras, composé en 1607 par Claudio Monteverdi qui, grâce à son talent et à sa longue vie (1567-1643), assura la transition entre la musique de la Renaissance et la musique baroque. Sa dernière composition sera d’ailleurs un opéra, son chef-d’oeuvre, L’Incoronazione di Poppea, composé en 1642, quelques mois avant sa mort.

L’histoire, contrariée par les dieux, des amours d’Eurydice et d’Orphée, fils de Calliope, muse de la poésie, compagnon de Jason et des Argonautes, doté du pouvoir de charmer les bêtes féroces et de déplacer les montagnes avec sa lyre à neuf cordes, a été reprise par Alessandro Striggio, auteur du livret de l’Orfeo, avant d’avoir inspiré d’autres auteurs d’opéras, tel Christoph Willibald Gluck pour l’Orfeo ed Euridice, ou des réalisateurs, tel Jean Cocteau pour Orphée en 1950 et, dix ans plus tard, Le Testament d’Orphée.

Deux interprétations de l’opéra de Monteverdi avaient déjà été proposées sur DVD : L’Orfeo, sous la direction de Nicolaus Harnoncourt en 1978, éditée par Deutsche Gramophon en 2007, et L’Orfeo, dirigé par René Jacobs en 1998, éditée par Harmonia Mundi Distribution en 2006, la version de référence pour de nombreux mélomanes.

Claude Goretta inscrit le drame dans une seule journée. Le soleil réveille par ses premières lueurs les bergers et les nymphes, illumine leur liesse à son zénith, plonge lentement le paysage dans la pénombre à l’annonce de la mort d’Eurydice, puis dans l’obscurité de son coucher, à l’épilogue.

Orfeo

Orfeo est une des adaptations cinématographiques réussies d’un opéra. Elle respecte, en effet, les conventions du genre opératique, avec des décors stylisés, suffisamment épurés pour ne pas distraire l’attention de la musique et du drame. Elle se distingue aussi par la qualité de la réalisation et de la photo de Giuseppe Rotunno, le chef opérateur d’une dizaine de films de Federico Fellini.

La difficulté d’un tournage avec prise de son directe des solistes, orchestre et choeurs est si complexe qu’on peut répondre à ceux qui font le procès du playback que la seule alternative possible aurait été la captation d’une représentation. L’option de Claude Goretta de faire jouer les solistes une fois la bande-son enregistrée permet de les déplacer à loisir dans le cadre, de faire autant de prises que nécessaire, avec des mouvements de caméra en gros plan sans longues focales et, surtout, de laisser les chanteurs se concentrer sur le jeu des personnages. Et Orfeo, avec une parfaite synchronisation du son et de l’image entretient l’illusion en masquant l’artifice du playback.

Nel sole e nelle stelle veggherai le sue sembianze belle

Claude Goretta et Michel Corboz ont préféré au final avec le choeur des baccantes, celui, plus poétique et porteur d’espoir, composé en 1609, dans lequel Apollon entraîne Orfeo dans les cieux d’où il pourra contempler les attraits de sa bien-aimée dans le soleil et les étoiles.

La sortie de l’Orfeo, encore inédit en vidéo, devrait intéresser celles et ceux qui aiment l’opéra, pour la délicatesse de la lecture de la partition par Michel Corboz, la qualité des solistes, l’utilisation d’instruments anciens (luth, théorbe, clavecin, orgue positif, viole de gambe, cornetto…) et, aussi, les amateurs de belles histoires d’amours impossibles teintées de fantastique.

Orfeo

Présentation - 3,0 / 5

Orfeo (90 minutes) et ses suppléments (90 minutes) tiennent sur un Blu-ray double couche logé dans un boîtier bleu de 11 mm, glissé dans un fourreau.

Le menu animé et musical propose, bien sûr, l’opéra dans sa seule version originale, sous deux formats audio, DTS-HD Master Audio 5.1 et 2.0 stéréo, avec sous-titres optionnels en français ou en anglais.

Sous-titres français pour malentendants.

Bonus - 4,5 / 5

Orfeo, le mal aimé (54’), un entretien avec Philippe Béziat, réalisateur de plusieurs documentaires sur l’opéra dont Claudio Monteverdi, aux sources de l’opéra pour Arte, et avec Jean-Marc Le Scouarnec, journaliste et auteur de Toscan ! , une biographie de Daniel Toscan du Plantier qui fut directeur général de Gaumont de 1975 à 1984, une période pendant laquelle il produisit l’adaptation cinématographique du Don Giovanni de Mozart par Joseph Losey, en1979, et du Carmen de Bizet par Francesco Rosi, en1984, avant de produire d’autres adaptations, La Bohème de Puccini (Luigi Comencini, 1988), Boris Godounov de Moussorgski (Andrzej Zulawski, 1989) et Tosca de Puccini (Benoît Jacquot, 2001). Les deux interlocuteurs évoquent la difficulté de l’adaptation d’un opéra, un genre régi par des codes très stricts, en un film, un moyen d’expression naturaliste. Ce cloisonnement n’a pas empêché de nombreuses tentatives, dès l’époque du muet, avec de rares succès commerciaux, ceux de Carmen et, dans une moindre mesure, du Don Giovanni de Losey. Orfeo fut mal accueilli : l’oeuvre, tout sauf populaire, avait peu de chances d’attirer les foules (il ne fit que dix mille entrées) et les critiques musicaux ont fustigé l’absence de son direct (qui aurait entraîné un énorme surcoût). Pourtant, le cinéma reste un moyen d’amener le grand public à l’opéra, un genre alliant musique et drame.

Orfeo

Répertoires : faire un Orfeo (36’, Arte, 1985) nous invite à assister à quelques prises de vue d’Orfeo, dans les studios de Cinecittà. Mais ce sont, dans la chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon, sous la direction de Michel Corboz, les répétitions de l’orchestre, des solistes et du choeur qui constituent la partie la plus importante et la plus intéressante du document. Le chef suisse, un des spécialistes de la musique vocale et chorale, avait déjà dirigé plusieurs oeuvres de Monteverdi, dont l’Orfeo, 17 ans avant. La musique laissant toujours une place à l’improvisation, cette nouvelle interprétation, nous confie-t-il, est différente de la première : « quand on a cinquante ans, on n’a pas peur de bouleverser une expression musicale, on n’a pas peur de déstabiliser une phrase, un tempo… tout en le sachant bien ».

On peut, également, voir sur le site Notre histoire.ch, Claude Goretta en plein tournage à Cinecittà, donnant ses instructions à haute voix aux acteurs pendant les prises : http://www.notrehistoire.ch/medias/62958.

Orfeo

Image - 4,0 / 5

L’image (1.66:1, 1080p, AVC), parfaitement nettoyée, assez bien contrastée, avec des noirs profonds et des couleurs lumineuses et chaudes, est, dans l’ensemble, très douce, au grain visible dans les scènes plus sombres. Ce qui crée un léger flou s’accordant finalement assez bien à la nature fantastique, mystérieuse de l’oeuvre.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0 stéréo, fin, aux tonalités chaudes, bien équilibrées, bénéficie d’une belle ampleur, notamment assurée par une séparation naturelle des deux voies frontales. Pas de grande différence entre les deux formats, le remixage 5.1 étant toutefois légèrement plus aéré.

Orfeo

Crédits images : © Gaumont

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 14 novembre 2017
Monteverdi s’est inspiré du mythe d’Orphée et Eurydice pour composer Orfeo, un de ses chefs-d’œuvre. Gaumont nous propose l’interprétation de Michel Corboz dans une magnifique adaptation inédite pour l’écran, mise en scène et filmée par Claude Goretta.

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