Hangover Square

Hangover Square (1945) : le test complet du Blu-ray

Édition Spéciale

Réalisé par John Brahm
Avec Laird Cregar, Linda Darnell et George Sanders

Édité par Rimini Editions

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Le 23/01/2018
Critique

Hangover Square

Fulham Road à Londres, un soir, au début du XXème siècle. Un homme poignarde un antiquaire, met le feu à sa boutique en lançant une lampe à pétrole sur le sol et sort dans la rue, bousculant des passants qu’il semble ne pas voir. L’homme est George Harvey Bone, un compositeur réputé, travaillant à l’écriture d’un concerto pour piano. Lorsqu’il rentre chez lui, Barbara, la pianiste qui l’assiste, lui demande où il a passé les dernières vingt-quatre heures. George ne se souvient de rien…

Hangover Square, sorti en 1945, est un des meilleurs films de John Brahm qui a quitté l’Allemagne pour fuir le nazisme et, après un passage à Paris, puis en Angleterre, s’est établi à Hollywood en 1937 où il réalisa pour Columbia Counsel for Crime, le premier d’une suite de films comprenant, notamment, Laissez-nous vivre (Let Us Live, 1939), avec Maureen O’Sullivan et Henry Fonda) et Le Médaillon (The Locket, 1946), avec Robert Mitchum et Laraine Day.

Hangover Square

Hangover Square est l’adaptation, assez libre, avec une fin différente, du roman éponyme de Patrick Hamilton, dont le personnage principal, en plus du désordre de la personnalité dont il souffre, est aussi un grand alcoolique (ce qui inspira au romancier le jeu de mots avec Hanover Square, un endroit chic de Londres, et hangover qui signifie « gueule de bois »). D’autres œuvres de Patrick Hamilton ont été adaptées au cinéma, dont deux pièces, brillamment, Hantise (Gaslight), en 1944, par George Cukor, et La Corde (Rope), en 1948, par Alfred Hitchcock.

Hangover Square, injustement oublié, jusqu’alors introuvable en vidéo, vaut d’être découvert à plus d’un titre.

Pour sa beauté visuelle, avec des cadres remarquablement composés, des jeux expressionnistes d’ombre et de lumière, avec le reflet des réverbères sur les pavés luisants de rues brumeuses, celles que hantait le tueur en série de Whitechapel. Il était, justement, le personnage principal du film que venait de réaliser John Brahm, Jack l’éventreur (The Lodger, 1944).

Hangover Square

Aussi, pour sa distribution, avec la prestation hallucinée de Laird Cregar qui ne verra jamais le film : il sera, à 30 ans, emporté par une crise cardiaque à la suite d’une diète draconienne. Lui donnent la réplique Linda Darnell et George Sanders, dans un des rôles ambigus qu’il affectionne. Laird Cregar et George Sanders étaient tous deux à l’affiche de Jack l’éventreur.

Enfin, pour l’accompagnement musical de Bernard Herrmann, encore à l’aube d’une longue et brillante carrière de compositeur de musique de films commencée en compagnie d’Orson Welles, avec Citizen Kane et La Splendeur des Amberson (The Magnificent Ambersons), et poursuivie avec la partition de huit films d’Alfred Hitchcock. John Brahm a confié, à propos de Hangover Square : « C’est dans la musique que j’ai trouvé mon inspiration visuelle ». L’accompagnement musical, avec les quelques pages du concerto aux accents bartokiens, est une des partitions qui donne la meilleure mesure du talent de Herrmann, oscarisé pour The Devil and Daniel Webster (Tous les biens de la terre) (All That Money Can Buy, William Dieterle, 1941). Une chose rare à relever : l’étonnant réalisme du placement des mains du pianiste sur le clavier.

Hangover Square

Présentation - 5,0 / 5

Hangover Square (78 minutes) et ses compléments (60 minutes) tiennent sur un Blu-ray (BD-50) logé dans un boîtier non fourni pour le test. Le menu animé et musical propose le film avec ou sans sous-titres (placés trop haut sur l’image).

À l’intérieur du boîtier, un livret de 32 pages par Marc Toullec. Après une expérience du théâtre, John Brahm quitte l’Allemagne au début des années 30 pour Paris où il est embauché comme conseiller par Pathé-Nathan, apprend l’anglais, rejoint les Twickenham Studios où D.W. Griffith était venu pour tourner un remake de son film de 1919, Le Lys brisé (Broken Blossoms). Le producteur, s’étant fâché avec Griffith, désigna John Brahm pour le remplacer ! À l’invitation de Myron Selznick, il réalise ensuite pour Columbia Counsel for Crime, le premier d’une suite de films que le livret passe en revue, dans laquelle on trouve, pendant la guerre, des films de propagande pour les alliés, dont Tonight We Raid Calais que Quentin Tarantino dit admirer. Pour Marc Toullec, John Brahm atteint son « âge d’or » avec trois films, Jack l’éventreur, Hangover Square et Le Médaillon. Suit une intéressante analyse de Hangover Square, son meilleur film, selon le chroniqueur, qui met l’accent sur « la fusion musique/images ». Il évoque ensuite deux autres réalisations importantes, Le Médaillon et The Brasher Doubloon (1947, disponible sur DVD aux USA). John Brahm tournera cinq autres films avant de contribuer surtout à la réalisation de nombreuses séries télévisées, parmi lesquelles Alfred Hitchcock présente et La Quatrième dimension (The Twilight Zone).

Hangover Square

Bonus - 3,5 / 5

En complément vidéo, John Brahm, à la folie ! (18’), par Guillemette Odocino, critique à Télérama. John Brahm, venu du théâtre berlinois, rejoint Hollywood pour fuir le nazisme où il attire l’attention avec Jack l’éventreur (The Lodger, 1944), gothique et expressionniste, puis Hangover Square et Le Médaillon, trois films sur la folie, avec une utilisation moderne de la caméra et une maîtrise de la lumière : de la brume, du clair-obscur et des flous qui expriment bien la perte de conscience du personnage principal. Guillemette Odocino souligne la beauté de la scène finale et la virtuosité de sa mise en scène.

Entretien autour de la musique de Bernard Herrmann (28’), par Stephan Oliva, compositeur, notamment, de Ghosts of Bernard Herrmann, une transcription au piano de quelques-unes de ses œuvres orchestrales. Il souligne que Herrmann, influencé par Bartok et Wagner, était moins attentif à la mélodie qu’à créer une symbiose avec le climat du film, avec quelques stridences qui feront sa marque.

L’adaptation impossible (14’), par François Guérif, éditeur. Le roman, centré sur l’alcoolisme du personnage principal, n’accordant que très peu de place au romanesque, devait être assez profondément adapté pour pouvoir nourrir le scénario d’un film. Patrick Hamilton, étiqueté par J.B. Priestley « l’écrivain des sans-abri » aura inspiré une bonne cinquantaine de films, téléfilms ou séries.

Image - 4,5 / 5

L’image (1.37:1, 1080p, AVC), nettoyée par une soigneuse restauration, stable, bien contrastée, met en valeur la qualité de la photo du film. On peut juste relever un léger manque occasionnel de densité des noirs.

Son - 4,5 / 5

Le son LPCM 2.0 mono révèle une dynamique et une largeur de la bande sonore assez remarquables pour un film de cet âge. Un souffle se fait parfois entendre, mais à un niveau toujours discret.

Hangover Square

Crédits images : © Rimini Éditions

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 24 janvier 2018
Hangover Square, tragique histoire d’un homme déchiré entre le bien et le mal, jusqu’alors introuvable en vidéo, vaut d’être découvert pour sa beauté visuelle, ses jeux expressionnistes d’ombre et de lumière, la qualité de sa distribution et l’accompagnement musical de Bernard Herrmann.

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