Réalisé par Josef von Sternberg
Avec
Marlene Dietrich, Emil Jannings et Kurt Gerron
Édité par Films sans Frontières
Professeur intransigeant avec ses élèves, M. Rath (Emil
Jannings) apprend que ceux-ci passent leurs soirées dans un
bar, « L’ange bleu », faisant la cour à une chanteuse
envoûtante, Lola Lola (Marlene Dietrich, sublime). En les
suivant dans cet établissement pour leur faire passer le goût
de se coucher tard, le professeur Rath va tomber sous le
charme de Lola Lola. Tomber n’est pas un faible mot, puisque
cet amour va le faire sombrer dans la déchéance.
A l’instar du nom de la chanteuse, le film se compose de deux
parties quasiment identiques, comme un reflet renvoyé par une
glace. La césure est stigmatisée par l’unique mouvement de
caméra de ce film très statique : un travelling arrière sur
une classe vide (image réutilisée à la toute fin du film).
Tous les détails qui vous semblaient anodins dans la première
partie du film se teintent d’ironie.
Soudain tout s’éclaire, l’envoûtante et trouble Lola expose
son vrai visage et nous nous demandons comment le professeur
Rath a-t-il pu se laisser berner et surtout comment avons-nous
pu NOUS laisser berner ? Étant, en tant que spectateurs, mis
au même niveau que Jannings, la descente aux enfers de son
personnage n’en est que d’autant plus poignante. Quand on le
voit habillé en clown, humilié et hébété, on repense à cette
scène où, poupon adulte, il se faisait recoiffer par Lola : il
n’était en fait qu’un pantin grotesque entre les mains de
cette déesse des bas quartiers.
Le coup de génie de Joseph Von Sternberg pour ce film, outre
cette superbe mise en abîme, est d’avoir confié le rôle à
Marlene Dietrich, qui nous hypnotise par son charisme et son
sex-appeal. Elle deviendra fort justement une star, dont le
nom reste encore mythique de nos jours. Von Sternberg tournera
quatre autres films avec la star, travaillant sur la lumière
pour mettre en valeur celle qui fut sa muse.
Quant à Emil Jannings (de son vrai nom Theodor Friedrich Emil
Janentz), il était un des plus grands acteurs d’avant-guerre.
On a pu le voir dans « le Dernier des hommes », de Murnau. En
1927, il décroche le premier oscar du meilleur acteur. N’étant
pas à l’aise avec l’anglais, après « L’ange bleu » sa carrière
décline. Populaire en Allemagne, il deviendra acteur d’État
et tournera surtout des films de propagande pour le IIIe
Reich. Arrêté après la guerre, il sera finalement relâché et
finira ses jours en Autriche.
Un menu fixe et muet, qui prend la forme d’un photomontage en noir et blanc, une navigation sobre mais fonctionnelle.
Une note déroulante sur le film et riche en enseignements, plus deux filmographies : l’une sur Joseph Von Sternberg et l’autre sur Marlene Dietrich. Un entretien avec un historien auquel un réalisateur aurait apporté un peu de vie à un ensemble un peu trop didactique…
Correcte dans l’ensemble, l’image présente de nombreuses
puces, des rayures, et quelques déchirures, plus un manque de
profondeur de champs dus au tournage en studio. Enfin, un
contraste peu prononcé. Heureusement, la compression est
sublime.
Une restauration s’impose pour que ce chef-d’oeuvre soit
encore admiré dans les décennies à venir.
Premier film parlant allemand, « L’ange bleu » bénéficie d’un son très bon malgré des voix cahotantes (typiques des premiers parlants), du souffle (très peu dérangeant), et quelques petits craquements ici ou là. Pour une bande-son vieille de soixante-douze ans, c’est un bon état de conservation, surtout que le DVD ne fait aucune mention de restauration.