Les Amants crucifiés (1954) : le test complet du DVD

Chikamatsu monogatari

Réalisé par Kenji Mizoguchi
Avec Kazuo Hasegawa, Kyôko Kagawa et Eitarô Shindô

Édité par Films sans Frontières

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Le 24/10/2016
Critique

Les amants crucifiés

Kyoto, Japon XVIIIe siècle. Osan, l’épouse de l’imprimeur impérial, demande à son employé Mohei qui l’aime secrètement, un prêt pour aider sa famille. Ce dernier se prépare à utiliser le sceau officiel de l’imprimeur mais le subterfuge est découvert et il se dénonce à son patron. Surpris en compagnie de Osan, ils sont tous deux gravement compromis bien que cette dernière soit irréprochable. Lassée des infidélités de son époux, répondant à l’amour de Mohei qui a tout risqué pour elle, Osan accepte alors de s’enfuir avec lui. Tous deux deviennent des parias recherchés par la police…

Le plus romantique des titres classiques de Mizoguchi : il passe dans Les Amants crucifiés le souffle absolu de la passion amoureuse opposée à tout le reste. Et cette opposition est d’emblée placée sous le signe de la mort. Divisé nettement en deux parties : la naissance de la passion clandestine entre Mohei (Kasuo Hasegawa) et sa patronne Osan (Kyoko Kagawa) puis leur fuite dans des conditions de plus en plus rude et inhumaine. Il s’ouvre par et s’achève sur… une marche au supplice, bouclant une boucle authentiquement tragique.

Le scénario s’inspire de La Légende du grand parcheminier )Daikyoshi mukashi goyomi), une pièce de théâtre célèbre de l’écrivain Monzéamon Chikamatsu (1653-1724) dont l’action se passait déjà à Kyoto mais cinq siècles plus tôt, au XIIIe siècle. C’est sans doute le film de Mizoguchi le plus proche et le plus accessible à un Européen de culture classique : bien des comparaisons littéraires peuvent être faites aisément et le lyrisme qui éclate plus d’une fois dans certaines séquences, l’accélération du rythme de la poursuite dans la seconde partie, sont des éléments universels qui nous sont très proches, du point de vue narratif. Les Amants crucifiés n’est pas moins japonais pour autant et les multiples signes de la passion naissante y relèvent de codes et de techniques d’éclairage que le public local saisissait immédiatement : l’étrangeté pour le néophyte des us et coutumes de cette époque lointaine est rapidement éclaircie par la rigueur de la mise en scène, son propos simple et direct.

Le cinéma érotique et fantastique de la révolte absolue des années 1960-1970 est directement redevable à des titres de Mizoguchi tels que Les Amants crucifiés et La Rue de la honte. Mizoguchi n’a cependant pas été un peintre systématique de la révolte ou de la lutte : son méconnu et rare La Femme crucifiée (tourné en 1954) réconciliait par exemple la patronne d’un bordel et sa fille. Un titre tel que Les Amants crucifiés a, en revanche, contribué au plus haut degré à cette perspective critique occidentale qui correspondait à une connaissance lacunaire et partielle de sa filmographie.

Les amants crucifiés

Présentation - 3,0 / 5

Un DVD Pal All zones, édité par Film Sans Frontières, collection « Auteurs », section « Mizoguchi ». Durée vidéo PAL du film : 98 minutes environ. Image au format respecté 1.37 en N&B, compatible 4/3. Son mono japonais en VO ou VOSTF ou VOSTA, au choix. Boîtier Amaray standard. Au verso, deux extraits de critiques (Le Monde d’une part, un extrait de la notice critique de Jacques Lourcelles dans son Dictionnaire des films d’autre part). Les films de Mizoguchi édités par FsF bénéficient de copies chimiques mieux nettoyées et de masters vidéo d’une qualité supérieure à celle des anciennes éditions DVD sorties en 2004 par Opening puis en 2006 par Aventi. Suppléments : sources littéraires, fiche sur la période historique japonaise Edo, témoignage du scénariste Yoda, extraits d’études critiques, etc.

Bonus - 4,0 / 5

Fiche assez précise sur l’écrivain Chikamatsu (1653-1724), seconde fiche assez précise et ample à la fois sur la période historique Edo (1603-1868) durant laquelle se situe l’action du film, témoignage à nouveau très important du scénariste Yoda provenant de la traduction de ses Souvenirs sur Mizoguchi (édition Cahiers du cinéma) qui prouve l’exigence de Mizoguchi, enfin extraits critiques provenant des monographies de Vê-Hô (Mizoguchi, Editions universitaires, collection Classiques du cinéma n°14, dirigée par Jean Mitry, Paris 1963) et de Daniel Serceau sur Mizoguchi. L’ensemble est très utile. Un seul regret, l’absence de photos japonaises d’exploitation.

Image - 4,0 / 5

Format 1.37 N&B compatible 4/3. Copie chimique (plus aucune griffure ni rayure, plus aucune poussière négative ni positive) dans un état supérieur de restauration, master vidéo (compression, encodage, définition, contrastes) dans un état supérieur aussi, à ceux des anciennes éditions Opening et Aventi sur DVD Pal zone 2 sorties en 2004 puis 2006. Qu’on n’attende pas, cela dit, la qualité d’un bluray mais on dispose, avec cette édition, de la meilleure image actuellement disponible chez nous, de ce grand classique.

Son - 4,0 / 5

Son mono japonais d’origine en VO ou VOSTF ou VOSTA, au choix. Le souffle a été convenablement réduit sans altérer la sonorité originale des voix de la piste mono d’origine. Là aussi, progrès évident par rapport aux pistes sonores de l’ancienne édition Opening. Effets sonores et musique bien restitués. Inutile de regretter une VF d’époque qui n’a jamais existé : le film fut exploité dans le circuit Art et Essais en France, qui exigeait la VOSTF mais ne nécessitait pas la VF, afin de permettre aux distributeurs français de diminuer les frais de sortie.

Les amants crucifiés

Crédits images : © Films Sans Frontière

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Panasonic FullHD
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Sony
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p