Réalisé par Alejandro Amenábar
Avec
Ana Torrent, Fele Martínez et Eduardo Noriega
Édité par Studiocanal
Angela, étudiante en audiovisuel, prépare une thèse sur la
violence véhiculée dans les media. Elle rencontre Chema, un
autre étudiant connu pour ses penchants vers les films
horrifiques, et ensemble ils vont peu à peu découvrir les
dessous d’un réseau de snuff movies à l’intérieur même
de leur université.
Premier long-métrage (après 3 courts) de Alejandro Amenabar,
« Tesis » pose déjà les bases de la volonté du cinéaste
d’aborder des genres différents tout en offrant à son
spectateur une réflexion sur un (ou plusieurs) thème(s).
La maturité précoce de Amenabar apparaît bien dans ses choix
sur son premier film. Conscient qu’il doit avant tout attirer
le public, il propose un thriller somme toute assez
classique, avec des fausses pistes et des retournements de
situation qui s’enchaînent dans la seconde moitié du métrage.
En parallèle, le choix d’axer son histoire sur un réseau de
snuff movies (où sont filmés en direct de réels
tortures et assassinats) lui permet de donner en filigrane
une réflexion sur le voyeurisme et la violence des images qui
nous sont proposées de nos jours dans les media (télévision
et cinéma), et de nous faire réfléchir sur la morbidité qui
nous pousse à les regarder.
Certes, le discours est moins subtil que dans ses films
suivants (Ouvre les yeux et Les Autres), mais
n’oublions pas que Amenabar n’a que 23 ans (!!!) lorsqu’il
réalise « Tesis », et saluons plutôt cette volonté de ne pas
céder au spectacle-à-tout-prix en nous offrant une réelle
opportunité de réflexion, chose assez rare de nos jours dans
nos salles obscures.
Le message de réalisateur passe par deux biais.
En premier lieu, il nous offre des personnages ambigus, à
l’image d’Angela (étonnante Ana Torrent, actrice très connue
en Espagne) tour à tour attirée et repoussée (et l’attirance
prendra le pas sur l’aversion) par les images des vidéos qui
lui sont montrées.
En second lieu, Amenabar a parfaitement compris qu’il fallait
laisser travailler l’imagination du spectateur en suggérant
(avec une utilisation très étudiée du son) plus qu’en
montrant. On sait que cette approche peut donner des
résultats qui restent gravés dans les mémoires (citons
rapidement « La maison du diable » de Robert Wise ou
Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper), et
l’objectif est ici atteint : on ne peut s’empêcher d’imaginer
les sévices qu’Amenabar se garde bien de nous dévoiler en
détail, et ainsi il nous emmène bien malgré nous à
s’interroger sur notre attirance vers le morbide et la
violence.
La maîtrise cinématographique de Amenabar est déjà
surprenante. Outre ses plans très étudiés, on notera la
seconde rencontre d’Angela et Chema (par walkman interposés)
qui fait preuve d’une indéniable originalité dans la
présentation des personnages. Et la jeunesse du cinéaste ne
l’empêche pas d’aborder de front les problèmes rencontrés par
le cinéma espagnol (voire européen), et propose sa solution
dans la bouche même d’un professeur : si on veut contrer
Hollywood, donnons au spectateur ce qu’il attend.
Divertissement et réflexion : « Tesis » laisse entrevoir ce que
ses deux films suivants démontrent : un très grand cinéaste
(européen !) est né.
Bravo à l’éditeur pour nous offrir un menu et une
arborescence très « snuff » et totalement en phase avec le film.
Le chapitrage est animé et sonorisé. Le disque est
sérigraphié à l’image de l’affiche du film. Par contre,
minimum syndical pour le packaging : pas d’impression
intérieure de la jaquette, pas de livret.
A noter que la touche « Arrêt » du lecteur est désactivée.
Commentaire audio sous-titré de Alejandro Amenabar. Le
réalisateur commence par s’excuser pour l’éventuel manque
d’intérêt de ses propos, prétextant la longue période entre
leur enregistrement et le tournage. Il n’empêche que le
bonhomme a une très bonne mémoire, vu le grand nombre
d’informations qu’il nous délivre ! Il semble à l’entendre
que tous ses compagnons d’étude aient participé à la
conception du film (tout est tourné en extérieur pour des
problèmes de budget, principalement à l’intérieur même de
l’université où il fit ses études).
Amenabar nous détaille également comment il voulait aborder
les sujets de son film, et nous cite quelques références
(l’incontournable Alfred Hitchcock régulièrement cité, mais
également les Funny Games et « Le pianiste » de Michael
Haneke). De peur d’ennuyer son public (c’est lui qui le dit
!), Amenabar entrecoupe hélas ses propos de silences plus ou
moins longs dans la seconde moitié du film.
Making of (22’ 22 ») réalisé par Mateo Gil (ami
d’Amenabar et co-scénariste de Ouvre les yeux),
alternant assez classiquement images du film, scènes de
tournages et interviews. On y voit entre autre le réalisateur
très impliqué dans les répétitions des comédiens,
impressionnant dans sa volonté d’imposer sa vision.
Scènes coupées au nombre de 4 (respectivement : 34 »,
41 », 3’35”, 2’15”) et dans une qualité médiocre; seule la
quatrième apporte une lisibilité plus grande sur une scène.
Galerie de 30 photos de tournage.
Bande-annonce du film (VOST, en 4/3 - 1:85, 1’32”).
Filmographies déroulantes de Alejandro Amenabar, Fele
Martinez, Eduardo Noriega et Ana Torrent.
La copie laisse apparaître quelques petits défauts (points
noirs). Le transfert 16/9 donne une belle définition, avec un
grain légèrement visible.
La colorimétrie est très fidèle à la photographie du film,
donc pas très lumineuse mais néanmoins bien contrastée.
La compression est correcte, sans réel problème (les puristes
détecteront quelques défauts mineurs d’arrière-plan).
Le film n’ayant jamais été doublé en français, seule la
version originale espagnole est proposée.
Attentif à la volonté d’Amenabar de ne pas détourner
l’attention du spectateur par des effets gratuits, le
remixage Dolby Digital 5.1 donne la part belle à la musique
(composée par le réalisateur lui-même), et les effets
surround n’apparaissent que ponctuellement sur quelques
séquences, mais de façon très étudiée et réussie.