Réalisé par Steven Spielberg
Avec
Tom Cruise, Colin Farrell et Samantha Morton
Édité par 20th Century Fox
John Anderton croit dur comme fer au principe sur lequel
repose son département Precrime : 3 médiums précognitifs
prédisent les crimes et permettent l’arrestation des
meurtriers avant même leur passage à l’acte. Sa vision des
choses va être chamboulée lorsque, pourchassé lui-même pour
un meurtre qu’il est censé commettre, il va découvrir le
point faible de la théorie (le rapport minoritaire du titre).
La mauvaise façon (entendez celle qui déçoit) d’appréhender
« Minority Report » serait d’y rattacher l’auteur de la
nouvelle sur laquelle le scénario est basé. Philip K. Dick,
l’un des plus illustres auteurs de science-fiction, a laissé
à sa mort en 1982 l’une des oeuvres les plus marquantes du
genre, où la réalité ne semble qu’une illusion génératrice de
mondes subjectifs. Citons pour les intéressés, outre les
titres dont ont été tiré les films Blade Runner ou
Total Recall : « Ubik », « Le maître du haut-
château » ou « Le temps désarticulé ».
Non pas que la « trahison » soit manifeste : la philosophie de
P.K. Dick émerge sous différents aspects (le libre-arbitre
existe-t-il ?), mais elle se trouve la plupart du temps
perdue entre deux scènes d’action surboostées, et par là-même
perd grandement de son impact intellectuel.
La bonne façon (entendez la plus jouissive) d’apprécier le
film serait d’y voir un blockbuster hollywoodien (avec sa
dose de scènes d’action bourrées d’effets spéciaux) réalisé
par un Steven Spielberg donnant libre court à sa maestria
technique.
De ce point de vue, le film remplit parfaitement son contrat,
et les 45 premières minutes ne laissent aucun répit (même si
la suite laisse un peu sur sa faim après un tel démarrage).
Spielberg semble décider de se lâcher, et nous emballe des
séquences sidérantes de maîtrise cinématographique (au hasard
: l’hallucinant plan-séquence des spyders, ou encore le plan
emblématique de Anderton et la précog Agatha en profils
opposés, visualisant leur incompréhension mutuelle).
L’analyse de la mise en scène très travaillée du réalisateur
(passant par une photographie glaciale et limitant les gammes
de couleurs, et par des plans travaillés à l’extrême) fait le
bonheur des critiques spécialisés, qui y voient (à juste
raison) le changement qui semble s’opérer dans la
filmographie de Spielberg, laissant tomber son tiraillement
entre films « sérieux » et pur divertissement pour laisser
libre court à ses propres envies, détachées des contraintes
du système hollywoodien.
Le spectateur lambda (la grosse majorité, donc) passera quant
à lui quelque peu à côté de ces interprétations, et profitera
certes d’un vrai spectacle (amplifié par une interprétation
réussie de Tom Cruise permettant l’identification à son
personnage), mais perdra au final une réelle réflexion sur
des sujets abordés (l’avenir est-il pré-programmé ?
l’utilisation excessive et le pouvoir de l’image).
« Minority Report » permettra à chacun d’y prendre (ou d’y
laisser) ce qu’il sera venu chercher. Mais n’est-ce pas là,
au fait, l’apanage des grands du 7ème art ?
Les 2 DVD sont contenus dans un étui Amaray classique (on
aurait préféré un digipack), protégé par un beau surétui. Les
sérigraphies déçoivent par leur aspect basique.
Les menus (sonorisés en 5.1) sont très travaillés et
s’intègrent parfaitement dans le visuel du film. Le
chapitrage est animé et sonorisé.
Un mauvais point cependant : l’arborescence des suppléments
est inutilement fastidieuse, et nécessite une utilisation
laborieuse de la télécommande.
Le principal attrait est constitué du documentaire
(sous-titré) de Laurent Bouzereau, habitué (entre autre) des
DVD de Steven Spielberg, Brian De Palma et Alfred Hitchcock.
L’impression d’ensemble est néanmoins contrastée : les
aspects techniques sont abordés dans leur ensemble, mais on
aurait aimé en apprendre davantage sur l’aspect créatif du
réalisateur, ou y piocher des éléments pour appuyer les
réflexions générées par le film.
On retrouve la marque de fabrique de l’auteur du documentaire
: un montage étudié d’interviews et de scènes de tournage et
de post-production. Par contre, il ne nous avait pas habitué
à cet aspect commercial et promotionnel : certes, on veut
bien croire que Steven Spielberg et Tom Cruise
s’apprécient… mais c’est censé nous apprendre quoi au
juste ?
On pourra également s’interroger sur l’intérêt de découper le
documentaire en segments distincts, obligeant des passages
répétés par les menus assez lassants. Un bon chapitrage
aurait mieux fait l’affaire.
Du récit à l’écran : 2 segments sur le scénario et les
personnages :
. Le récit / le débat (9’11”) : l’écriture du scénario
en plusieurs temps est abordée, avec une approche sur les
sujets abordés, du moins par les scénaristes, avant l’arrivée
de Spielberg qui reprendra à son compte les thématiques.
. Les acteurs (9’01”) : présentation des personnages
par les acteurs. On notera au passage les références des
prénoms des précogs : Arthur (Conan Doyle), Agatha (Christie)
et Hammett (Dashiell)…
Déconstruction de « Minority Report » : 5 segments sur
les aspects artistiques du film :
. L’univers de « Minority report » (9’19”) : précisions
sur la conception du futur décrit dans le film (fruit des
réflexions de spécialistes réunis par Spielberg). On y entend
également (mais trop rapidement) Janusz Kaminski s’expliquer
sur les choix de photographie, ainsi que John Williams pour
la bande originale.
. Précrimes et Précogs (7’58”) : détails sur les
décors (QG de Precrime, temple des précogs), costumes,
accessoires.
. La séquence Spyder (5’08”) : conception, tournage,
et post-production (effets spéciaux, sonorisation) de la
séquence des araignées-robots.
. Précogs et vision (4’50”) : retours sur les scènes
de visions des précogs (créées par les concepteurs du
générique de Seven de David Fincher).
. Véhicules (4’55”) : conception des maglevs et engins
volants du film. A noter que Gary Rydstrom utilisa le son de
sa machine à laver pour représenter le son des voitures
magnétiques…
Cascades : courts segments sur les 3 principales
séquences d’action du film :
. Fuite dans le maglev (2’49”) : présentée par Tom
Cruise et sa doublure.
. La poursuite en Hoverpack (2’50”) : conception et
tournage de la séquence de poursuite de Anderton par ses
collègues dans une ruelle (complètement artificielle). On en
est étonné par la logistique à mettre en place pour ce genre
de séquence.
. L’usine automobile (2’38”) : les comédiens et
cascadeurs commentent le tournage de cette scène
d’affrontement entre Tom Cruise et Colin Farrell.
ILM et « Minority Report » : 6 segments sur les effets
spéciaux :
. Introduction (4’30”) : présentation des méthodes de
travail suivies sur le film.
. Hologrammes (3’07”) : conception de la séquence où
Anderton visionne des enregistrements holographiques de sa
femme et de son fils.
. Le couloir de rétention (3’08”) : où on apprend
comment les quelques figurants ont été multipliés pour
aboutir à la séquence de prison.
. Maglev (3’10”) : conception de la séquence où
Anderton passe d’un véhicule à l’autre sur la paroi verticale
d’un immeuble.
. Hovercraft / Hoverpacks (3’05”) : aspects post-
production de la séquence (effacement de cables,
agrandissement numérique des immeubles, etc…).
. Cyberparloir (1’53”) : rapide retour sur la séquence
du magasin de réalités virtuelles.
Rapport final (3’55”) : inutiles congratulations
réciproques de Spielberg et Cruise.
Au final, un making-of de plus de 1h20’, auxquelles il faut
ajouter les multiples aller-retours imposés par les menus…
Archives
Près de 300 documents (photos, dessins), sur la conception
artistique du film, la construction des décors et le travail
de préparation.
Story-boards animés et sonorisés (à partir du film) de
3 séquences : le maglev, la poursuite dans la ruelle, et
l’usine automobile.
Bandes-annonces du film (au nombre de 3, en 4/3 1:85
et en VO non sous-titrée DD5.1) et du jeu vidéo (4/3 1:33).
Biographies des acteurs et de l’équipe technique.
Notes de production en français.
Inutile de pinailler : le résultat est parfait.
L’image est totalement fidèle à la vision en salles (au
risque d’en déstabiliser certains) : le grain voulu est bien
là, et l’aspect décoloré et saturé amplifiés par le passage
en numérique.
La copie est sans défaut, la définition est pointue et la
compression sans défaut.
Je le répète : du tout bon !
Les versions Dolby Digital sont savamment dosées, proposant
un très juste milieu entre débordement sonore et justesse
dans l’utilisation des différents canaux. La musique de John
Williams est particulièrement mise en valeur.
La VF DTS (mi-débit) en rajoute légèrement dans la puissance
et la précision. Ceci dit, on aurait largement préféré la
VO…