La Chambre interdite

La Chambre interdite (2015) : le test complet du DVD

The Forbidden Room

Réalisé par Guy Maddin
Avec Roy Dupuis, Clara Furey et Mathieu Amalric

Édité par ED Distribution

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Le 31/08/2016
Critique

La chambre interdite

Dans le Plunger, un sous-marin, l’oxygène se fait rare. Le compte à rebours vers une mort certaine est enclenché. L’équipage cherche en vain le capitaine, le seul capable de les sauver. Soudain, de manière improbable, un bûcheron perdu arrive parmi eux et leur raconte comment il a échappé à un redoutable clan d’hommes des cavernes, les Loups Rouges. Margot, sa bien-aimée, a été enlevée par ces hommes féroces, et il est prêt à tout pour la sortir de là. Embarquez dans le Plunger et faites le tour du monde des paysages oniriques, dans un tourbillon d’aventures peuplées de femmes fatales, de fous à lier et d’amoureux transis.

La Chambre interdite (The Forbidden Room, 2015) est un des 54 films du Canadien Guy Maddin, coréalisé avec Evan Johnson, auteur de plusieurs courts métrages. Guy Maddin, également auteur du scénario, a surtout réalisé des courts métrages, mais aussi quelques longs, dont le documentaire Winnipeg mon amour, un hommage à la ville de son enfance.

Je suis hanté par les films qui auraient pu être faits.

Guy Maddin est résolument, farouchement indépendant : il affirme, dans le film d’Yves Montmayeur joint aux bonus, The 1000 Eyes of Dr Maddin, qu’il n’existe pas un seul plan dans son oeuvre qu’il n’ait eu l’envie de filmer.

La Chambre interdite est un fantastique hommage au cinéma muet (que soulignent l’insertion d’intertitres et le traitement de l’image en postproduction), un assemblage de fragments inspirés de films perdus de F.W. Murnau, Fritz Lang, Alfred Hitchcock, John Ford, Frank Borzage… Une invitation au rêve, une bizarrerie qui n’emprunte à aucune des recettes connues. Plusieurs histoires s’imbriquent : celle de l’équipage d’un sous-marin en détresse, à la recherche du capitaine, la battue des bois du Schleswig-Holstein par des bûcherons à la recherche de Margot, enlevée par la tribu des Loups Rouges, mais qui réussit « à leur échapper par la porte d’un rêve », celle de deux docteurs fous, l’un qui répare le squelette en petits morceaux d’une femme victime d’un accident de moto, que l’autre recasse, pas satisfait du travail de son frère. Il y a aussi un chirurgien capable d’éradiquer les désirs, mais qui échoue lamentablement avec un patient toujours obsédé par les derrières féminins après plusieurs opérations lui laissant le crâne vide de matière grise. Dans le train qui relie Berlin à Bogota, un inquiétant psychiatre invite une passagère seule à partager son compartiment pendant que, dans un autre wagon, un homme au comportement bestial réussit à briser les barreaux de la cage dans laquelle il est enfermé, etc., etc.

La chambre interdite

Quand j’ai une caméra en main, je crois aux fantômes.

La Chambre interdite, dans un univers imprégné de l’absurdité des rêves, nous balade dans un délire d’histoires sans queue ni tête où l’humour a une place de choix, toujours surréalistes, peuplées de créatures fantasmagoriques, où des femmes-squelettes attaquent un chirurgien, où les morts ressuscitent, dans un foisonnement d’images qui se déforment, se superposent, en une succession de plans dont certains ne durent qu’une fraction de seconde. Une invitation faite au spectateur à se laisser aller, sans chercher à comprendre, sans se creuser les méninges pour tenter de découvrir une logique au récit.

Une étonnante distribution

En dépit des faibles moyens dont il dispose pour la réalisation de ses films, Guy Maddin réussit à attirer des acteurs célèbres. On retrouve dans La Chambre interdite des Canadiens renommés, Roy Dupuis et Louis Negin (et Clara Furey, la fille de Lewis Furey et Carole Laure), mais aussi Udo Kier, Geraldine Chaplin, Charlotte Rampling, Maria de Medeiros, Elina Löwensohn, Ariane Labed… Et une belle brochette d’acteurs français (une partie du film a été tourné en France) : Mathieu Amalric, Amira Casar, Jacques Nolot, Slimane Dazi, Jean-François Stévenin, André Wilms, Adèle Haenel…

Dans The 1000 Eyes of Dr Maddin, Guy Maddin donne la clef de son cinéma : comme une composition musicale, un film doit générer des sentiments, susciter des impressions. Voilà qui rappelle l’univers inventé par Kenneth Anger dans The Magick Lantern Cycle, auquel Guy Maddin rend un hommage appuyé.

La chambre interdite

Présentation - 4,5 / 5

La Chambre interdite (119 minutes) et les bonus (environ 90 minutes) tiennent sur deux DVD-9 logés dans un digipack, non fourni pour le test. Le menu fixe et musical propose le film dans sa seule version originale en anglais, avec sous-titres optionnels, sous deux formats, Dolby digital 5.1 ou stéréo. Les intertitres sont en français.

Le boîtier contient également un livret de 32 pages, avec trois courts textes de Guy Maddin sur l’origine du projet, le tournage en France et à Montréal et les acteurs, suivi d’un trombinoscope des personnages.

Pas d’édition Blu-ray, disponible en Amérique et au Royaume Uni.

Bonus - 4,0 / 5

The 1000 Eyes of Dr Maddin (69’), un documentaire réalisé par Yves Montmayeur en 2015, rassemble plusieurs interviews du réalisateur enregistrées à différentes époques de sa carrière, des extraits de quelques-uns de ses films, des séquences de tournage de La Chambre interdite et de répétitions avec les acteurs, des interviews d’Udo Kier et d’Isabella Rossellini qui ont joué dans plusieurs de ses films. Ce complément au film est une excellente introduction dans l’univers de Guy Maddin, entré au cinéma à 30 ans, sans formation, détaché de toutes les conventions du septième art. Il a, toutefois, ses repères : le cinéma muet, particulièrement celui de Georges Méliès, le courant surréaliste (il a été très impressionné par la scène de l’oeil coupé du Chien Andalou), le cinéma expressionniste allemand, avec Le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene, Dr. Mabuse, le joueur et M le maudit de Fritz Lang et, moins attendu, le cinéma de John Waters, notamment pour Pink Flamingos. Une amusante surprise, avec la sonorisation live, en 2009 au théâtre de l’Odéon, de Des trous dans la tête ! (Brand Upon the Brain! A Remembrance in 12 Chapters, 2007) avec un petit orchestre et Isabella Rossellini poussant les cris de douleur (ou d’extase ?) de la victime de mauvais traitements !

Suit Once a Chicken (7’, noir et blanc), un court métrage dans lequel se superposent des images de nus féminins, en positif et négatif, autour desquels volent des plumes blanches.

Puis Ecto Loop I (9’, couleurs) paraît être une esquisse de La Chambre interdite montrant le visage de femmes, en plan rapproché, avec des rubans blancs sortant de la bouche, des yeux, du nez et des oreilles.

Pour finir, The Living Poster (2’) montre deux affiches animées du film, le teaser du site internet de Séances et la bande-annonce, ainsi que celle de Winnipeg mon amour, de Moonwalk One, le documentaire de Theo Kamecke sur la mission Apollo 11 et de Upstream Color, le film de science-fiction de Shane Carruth, 2013.

Image - 4,0 / 5

Presqu’impossible d’apprécier la qualité technique de l’image, triturée en post production, rayée, brûlée, griffée, sautillante, instable, pour donner l’illusion de bouts de pellicule rescapés à deux doigts d’une perte définitive.

Au format 1.78:1, elle révèle cependant une grande précision dans certains gros plans de visages laissant présumer du soin apporté aux prises de vues.

Son - 4,0 / 5

Le son est proposé en deux formats, Dolby Digital 5.1 et 2.0 stéréo.

La remarque faite pour l’image s’applique ici : des plops et des cracks ont été ajoutés à profusion, avec une bonne dose de souffle et de distorsions. Ces mauvais traitements intentionnels ne nuisent cependant pas à la clarté des dialogues et l’accompagnement musical profite d’un spectre assez ouvert, avec des basses fermes.

La version multicanal assure une bonne immersion dans les effets sonores.

La chambre interdite

Crédits images : © Phi, Buffalo Gal Pictures

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 31 août 2016
La Chambre interdite est un film très personnel de Guy Maddin, un délirant hommage au cinéma muet, une invitation au rêve, une bizarrerie qui n’emprunte à aucune des recettes connues. Plusieurs récits s’imbriquent : celui de l’équipage d’un sous-marin en détresse, du rapt de Margot par des hommes-loups, d’un enlèvement dans le train qui relie Berlin à Bogota… Dépaysement assuré !

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