Certains artistes accouchent systématiquement dans la douleur
de leurs oeuvres. René Laloux aura été de ceux là. Il faut
dire que l’homme qui n’avait pas sa langue dans sa poche et
des idées bien arrêtées sur ce qu’il avait envie de montrer
au public, ne forçait pas la collaboration facile. Son plus
grand problème : avoir été systématiquement en avance de deux
ou trois trains sur ce que le public « pouvait » absorber.
Alors même si La Planète sauvage a su rencontrer son (un)
public, Laloux aimait à rappeler (non sans amertume) que le
film était surtout présenté comme étant une oeuvre de Topor
qui était alors « furieusement tendance » à l’époque.
Du coup, « Les Maîtres du temps » eu beaucoup plus de difficulté
à s’imposer, et ce malgré la présence artistique de Moebius.
Il faut dire, que si l’animation arrive aujourd’hui à « s’imposer »
au public adulte, ce n’était certainement pas le cas au début
des années 80 qui considéraient encore ce média comme un
territoire exclusif des enfants.
Et d’ailleurs, curieusement, le succès « culte » à postériori
du film s’est fait grâce aux jeunes de l’époque qui ont largement
apprécié le film malgré un thème plutôt imperméable de prime
abord : le paradoxe spatio-temporel. Et bien les adultes s’y
sont perdus tandis que les jeunes d’alors ont senti venir
toute une série de récits incroyables. Voilà pourquoi aujourd’hui,
ce DVD était tant attendu par toute une génération. Alors
oui, le film a vieilli. Oui, avec des yeux d’adulte, le film
souffre de beaucoup de faiblesses. Oui, on sent aujourd’hui plus
que jamais le manque de moyens flagrant dont ont souffert Laloux
et ses collaborateurs. Mais cette fable de science-fiction
garde une place bien à elle dans les esprits et fait partie de
ces films que l’on veut absolument posséder à côté de tous ces
films qui n’ont pas eu le droit au terme « chef-d’oeuvre » mais
qui ne sont pas passés loin (j’ai entendu « Howard le canard » ?).
Bref, culte, un incontournable de l’animation française, nostalgie
forcément, … toute résistance est inutile…
C’est inespéré de voir un tel traitement sur une oeuvre
« maudite ». Remastérisation, création et récolte de bonus…
Merci à Opening ! Maintenant, ces « Maîtres du temps » sont
à l’abri.
Menus très colorés, navigation simple, l’écrin
est impeccable.
Ce n’est jamais assez ! Et pourtant l’éditeur s’est donné
les moyens d’entourer le film de bonus intéressants.
On le sent surtout avec la pièce principale « De l’orphelin de
Perdide aux Maitres du temps », une série d’interviews (dont
la dernière de René Laloux) qui revient sur les aspects difficiles
du montage d’un tel film. Mais même les 37 minutes de ce
documents sont trop courtes ! On aurait aimé entendre plus
d’intervenants. Où sont par exemple les ingénieurs du son
qui avaient créé une atmosphère incroyable ? Où sont les
informaticiens qui avaient créé le plan 3D de la station des
Maîtres du temps à la fin du film ? Le film gardera peut-être
ainsi une grande partie de mystère et de poésie…
Autre ultime interview, celle de Stefan Wul qui revient sur
sa carrière et bien évidemment sur sa rencontre avec Laloux qui
voulait à l’époque adapter les 11 livres qu’il avait écrit…
Un comparaison film/storyboard permet d’apprécier le
fabuleux travail de Moebius avec possibilité de ne voir que les
vignettes du storyboard grâce au multi-angle.
un trop court diaporama permet également d’apprécier
le travail de recherche graphique de Moebius. Des dessins rares.
Avant de travailler sur Gandahar (le DVD c’est quand vous voulez !)
Laloux s’est « fait la main » sur les dessins de Caza avec le
court métrage « Comment Wang Fo fut sauvé » d’après un conte oriental.
L’animation minimimaliste sert ici une fable contemplative
sur la capacité à rêver et sur le pouvoir des images (ici la
peinture). Un incontournable pour les collectionneurs des
oeuvres de Laloux.
Toujours intéressant, rien que pour la curiosité, la
bande-annonce de l’époque du film est en plutôt
bon état et permet de se rendre compte de la façon dont
a été « vendu » le film au public…
Voilà, on aimerait que ça ne s’arrête pas si vite, mais
saluons tout de même les efforts considérables et nécessaires
de l’éditeur à la récolte de toutes ces archives.
Un fabuleux travail d’encodage permet enfin de (re)découvrir
cette oeuvre aux couleurs incroyables et avec une qualité
que nos vieilles VHS n’ont jamais approché, même de loin…
Les seuls défauts visibles sont à mettre sur le compte de la prise
de vue d’origine qui donne parfois des scènes un peu floues. Mais
pour le reste, le spectacle est au rendez-vous.
Que ce soit le fan d’origine ou le home-cinemaniaque, tout le
monde est servi ici grâce à deux pistes très fidèles.
Le première est en stéréo et offre au film une ambiance sans
artifice.
La deuxième est en 5.1 et vaut le détour. Un vrai travail a été
effectué ici au lieu de propulser bêtement le son sur toutes
les enceintes comme c’est souvent le cas pour des films de cet
âge. Ici, les ambiances sont fines et quelques effets bien
sentis viennent ajouter un côté plus « spatial » au film. Une
remastérisation réussie !