Faux semblants (1988) : le test complet du Blu-ray

Dead Ringers

Réalisé par David Cronenberg
Avec Jeremy Irons, Geneviève Bujold et Heidi von Palleske

Édité par Filmedia

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Le 19/01/2012
Critique

Deux vrais jumeaux, Beverly et Elliot Mantle, gynécologues de renom, partagent le même appartement, la même clinique, les mêmes idées et les mêmes femmes. Un jour, une actrice célèbre vient les consulter pour stérilité. Les deux frères en tombent amoureux mais si pour Elliot elle reste une femme parmi tant d’autres, pour Beverly elle devient la femme. Pour la première fois les frères Mantle vont penser, sentir et agir différemment.

Avec Faux-semblants, Jeremy Irons signe l’une de ses plus grandes performances. Le comédien britannique est extraordinaire dans ce double rôle, parvenant à insuffler une personnalité propre à chacun des deux frères, Elliot, l’aîné et dominant, Beverly, le frère sensible et dominé. Son immense talent est tel que l’on oublie rapidement les ingénieux effets spéciaux de l’époque qui réunissent les deux frères à l’écran.

Le malaise va crescendo dans Faux-semblants, notamment quand on se rend compte que les deux frères partagent non seulement leur appartement et leur clinique gynécologique, mais aussi les femmes à qui ils ne révèlent pas leur gémellité, comme s’ils désiraient se fondre en une seule et même personne. Les caractères décidé et responsable d’Elliot, celui émotif et vulnérable de Beverly s’apparentent d’ailleurs comme le côté pile et face d’une même pièce, d’une même âme. Tout semble aller pour le mieux jusqu’à ce que l’un d’eux s’éprenne d’une femme (magnifique Geneviève Bujold) qui va malgré elle les séparer petit à petit.

Outre une ambiance malsaine instaurée dès les premières minutes, David Cronenberg égratigne le show-business avec la célébrité qui procure un accès illimité aux médicaments, aux drogues, tranquillisants et somnifères en tous genres. Ces drogues auront pour conséquence une plongée fatale vers l’individualisme brigué par l’un des deux frères, et forcé pour l’autre qui, désirant guérir son frère de son addiction, ne pourra le faire que de l’intérieur, autrement dit en ressentant ce que son frère vit.  » Ce qui coule dans ses veines, passe dans les miennes  » dit d’ailleurs Elliot. Sûr de son ascendant sur Beverly, Elliot plonge malgré lui dans le même enfer certain de le rééquilibrer par la suite pour retrouver ainsi leur fusion originelle et leur synchronisation. On pourrait en dire long sur Faux-semblants tout comme on pourrait garder pour soi ce que l’on ressent personnellement car comme beaucoup de films de David Cronenberg, il n’est pas nécessaire de tout analyser mais plutôt privilégier le ressenti.

Véritable délire schizophrénique, cérébral, troublant, clinique, complexe et paranoïaque où se mêlent les thèmes de prédilection du réalisateur (la sexualité, la dualité de l’homme, l’automutilation, la maladie, l’osmose entre la chair et l’acier), Faux-semblants demeure l’un des plus grands films de David Cronenberg même s’il faut bien avouer que la réalisation a pris un petit coup de vieux et que le rythme a parfois tendance à s’essouffler. Le scénario n’a en revanche rien perdu sa singularité, la composition d’Howard Shore est magnifique, et l’interprétation de Jeremy Irons demeure sensationnelle.

Présentation - 3,5 / 5

Dommage que la jaquette ne reprenne pas le visuel de la superbe affiche. Le menu principal est partiellement animé, un peu cheap, mais porté par la superbe composition d’Howard Shore.

Bonus - 4,0 / 5

Tiré de l’émission  » The Directors « , ce documentaire revient en image sur le parcours et la filmographie de David Cronenberg. A travers de multiples extraits, que nous vous conseillons de zapper si vous n’avez pas vus les films, et d’interviews de comédiens qui ont collaboré avec le cinéaste canadien (Holly Hunter, Peter Weller, Marilyn Chambers, Michael Ironside, Jeremy Irons, Willem Dafoe). Ce module permet également d’en savoir un peu plus sur le processus créatif du réalisateur (qui se livre également face caméra), ses projets avortés (dont une version de Total Recall), la polémique engendrée par Crash, ses thèmes de prédilection et sur sa direction d’acteurs. Il est cependant dommage que ses films les moins connus comme Fast Company et M. Butterfly ne soient qu’à peine évoqués. Notons enfin que ce documentaire remonte à l’époque d’eXistenZ, dernier film analysé de ce documentaire, tandis qu’un simple rajout a été effectué pour Spider et A History of Violence uniquement évoqués.

S’ensuit un fascinant segment sur la gémellité concocté exprès pour cette édition. Un médecin, un psychologue et le réalisateur Nils Tavernier, qui a consacré un documentaire intitulé Le Mystère des Jumeaux (2009) sur le sujet de la gémellité, s’expriment sur le phénomène des vrais jumeaux monozygotes. Parallèlement, chacun évoque le film de David Cronenberg. Ils analysent pertinemment certaines scènes clés de Faux-semblants tout en expliquant comment deux véritables jumeaux vont apprendre à vivre, à grandir et à se démarquer.

De l’édition Criterion, l’éditeur récupère un segment consacré aux effets spéciaux. Si les images vidéo sont plutôt altérées, les rushes N&B permettent de comprendre comment David Cronenberg, aidé de l’équipe des effets spéciaux, a pu confronter Jeremy Irons face à lui-même dans un même plan avant l’arrivée des images de synthèse. Nous revenons ici dans des temps qui nous paraissent lointains même si le film a été tourné en 1988. Dans un premier temps, nous voyons Jeremy Irons donner la réplique à une doublure. Ensuite, Jeremy Irons change de personnage, redonne la réplique au même comédien qui récite cette fois en play-back les dialogues précédemment enregistrés de Jeremy Irons. Le mouvement de caméra était alors répété grâce à la motion-control et les deux images étaient ensuite montées, le raccord étant la plupart du temps caché par un élément du décor. Ce document rare, illustré par quelques cartons explicatifs, offre un aperçu du tournage de quelques séquences clé du film, montrant l’investissement de Jeremy Irons dans l’interprétation des deux personnages.

Enfin, l’interactivité se clôt sur la bande-annonce et une featurette d’époque constituée d’images du tournage, du film et donnant la parole à Jeremy Irons et David Cronenberg. Dommage qu’Opening n’ait pu mettre la main sur le reste des suppléments disponibles chez Criterion à savoir le commentaire audio du réalisateur, de Jeremy Irons, Ronald Sanders (monteur), Carol Spier (production designer), et Peter Suschiczky (Directeur de la photo), ainsi que sur les modules centrés sur le design de la séquence d’ouverture, une galerie de photos et des dessins sur les instruments chirurgicaux.

Image - 4,0 / 5

C’est une exclusivité française, Faux-semblants bénéficie d’un master HD soigné. Cependant le format 1.78 proposé ne correspond pas aux volontés artistiques originales, même si le film a été tourné en plein écran puis recadré en 1.66 (cadre préféré de David Cronenberg, disponible sur l’édition Criterion) voire en 1.85, format utilisé lors de la précédente édition DVD de Faux-semblants chez TF1 vidéo.

La copie demeure d’une propreté indéniable, débarrassée de la moindre scorie, les couleurs froides voire glaciales concoctées par le chef opérateur Peter Suschitzky sont admirablement rendues. Cependant, la définition n’est pas optimale et pêche par un manque d’homogénéité notamment au niveau du rendu des plans repris en postproduction, notamment sur les plans où les deux frères Mantle apparaissent tous les deux à l’écran. Les partis-pris parfois ouatés et brumeux de la photographie entraînent quelques flous sporadiques, un grain sensiblement plus appuyé ainsi que des fourmillements sur les arrière-plans.

L’apport HD est également moins flagrant sur les séquences en intérieur et le piqué apparaît parfois émoussé. La couleur rouge (présente dès le magnifique générique d’ouverture) est néanmoins vive et excellemment saturée, les blancs lumineux, et les plans larges jouissent d’une richesse des détails jusqu’alors inédite.

Son - 4,5 / 5

Point de remixage superflu à l’horizon, Opening livre deux pistes stéréo anglaise et française d’excellent acabit. Evidemment, la version originale apparaît plus ample et les dialogues fluides, tandis que la piste française se repose un peu trop sur les dialogues au détriment de certaines ambiances annexes. Le magnifique thème composé par Howard Shore est brillamment restitué et l’écoute demeure dans les deux cas dynamique, propre et claire.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm