Le Vent de la plaine (1960) : le test complet du Blu-ray

The Unforgiven

Réalisé par John Huston
Avec Burt Lancaster, Audrey Hepburn et Audie Murphy

Édité par Filmedia

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Le 27/04/2012
Critique

Le Texas, 1850. La veuve Mathilda Zachary vit entourée de ses trois fils et de sa fille Rachel dans un ranch isolé. Kelsey, un vagabond à demi fou, raconte partout une étrange histoire : Rachel serait une indienne enlevée à sa tribu lorsqu’elle était enfant. Dans la région, la haine des indiens est à son comble, et la famille Zachary se retrouve prise au piège : les indiens sont prêts à tout pour récupérer la jeune femme, et les blancs, refusant sa présence, aimeraient qu’elle retourne vivre parmi les siens.

Les nombreux problèmes survenus sur le tournage seraient presque plus passionnants que Le Vent de la plaine. Entre un Burt Lancaster devenu lui-même réalisateur qui n’a que faire des directives de John Huston, Lillian Gish ancienne star du cinéma muet qui radote sur ses collaborations avec les plus grands, Audrey Hepburn qui chute de cheval et qui malheureusement perd son enfant, la chaleur écrasante et la poussière qui détériorent les objectifs, tout contribue à faire du Vent de la plaine, adapté du roman d’Alan Le May (La prisonnière du désert) un film maudit.

Si John Huston y aborde ses thèmes de prédilection (le racisme, ode à la tolérance, la cause des indiens), ceux-ci ne semblent pas dénoncer mais affirmer au contraire la prédominance des blancs, l’asservissement des indiens qui deviennent pendant toute la deuxième partie de la chair à canon pour les  » héros «  du film.

D’ailleurs, le personnage interprété par Burt Lancaster apparaît franchement écoeurant en convoitant manifestement sa jeune  » soeur  » interprétée par Audrey Hepburn, qui abuse quelque peu de son sourire d’habitude si charmant. Puis, venu le retournement (la  » soeur  » est en réalité une indienne volée à ses parents quand elle était bébé), le spectateur est amené à rejoindre la cause de cette famille de  » visages pâles  » qui non seulement ne veut pas rendre cette jeune fille indienne  » volée  » aux siens (surtout le fils aîné qui n’inspire désormais qu’à s’approprier celle qu’il aimait déjà), mais celle-ci en vient également aux armes en tirant sur sa tribu, sa famille et même son frère de sang sans véritable regret.

Il faut le voir pour le croire, pourtant tout n’est pas à jeter dans Le Vent de la plaine. John Huston connaît son affaire, sa mise en scène demeure spectaculaire et les décors d’une beauté à couper le souffle. Il est vrai que nul n’a son pareil pour filmer les chevaux comme le cinéaste américain. En donnant à son film un aspect fantomatique avec ce personnage mystérieux, cowboy solitaire qui demeure incontestablement le plus beau et honnête être humain du film, John Huston parsème son film de touches poétiques et surréalistes à l’instar de la poursuite dans la tempête de sable ou celle de la pendaison.

Mais malheureusement, jamais le spectateur ne prend parti pour l’un des deux camps, surtout pas pour la famille, encore moins pour ces pauvres indiens, rabaissés au rang de types plumés caricaturaux qui ne font de mal que vouloir parlementer et voir la jeune fille qui serait l’une des leurs. Si le personnage d’Audrey Hepburn devient la cible de brutalités racistes lorsque ses origines sont découvertes, entre les indiens qui veulent la récupérer et les blancs locaux qui veulent sa mort, il se trouve que son unique  » chance  » de survie soit incarnée par son frère qui ne souhaite qu’une seule chose, se la garder pour lui.

On ne sait aujourd’hui ce que donnait le premier montage de 2h30 de John Huston puisque celui-ci a tout simplement été saboté par la production dans le dos du cinéaste. 30 minutes aujourd’hui introuvables qui donnaient peut-être plus d’épaisseur aux indiens du film qui au final se retrouvent à ne servir que de cibles (40 contre un) dans un véritable ball-trap de très mauvais goût. Le film ne correspond pas aux valeurs de John Huston, lui qui habituellement plaide la cause des indiens. Il préféra d’ailleurs désavouer Le Vent de la plaine, devenu un film d’action réac.

Présentation - 4,0 / 5

Un très beau menu principal animé et musical s’ouvre aux spectateurs en reprenant partiellement le visuel de la jaquette.

Bonus - 3,5 / 5

Pendant un quart d’heure, l’excellent Patrick Brion (historien du cinéma et auteur d’une biographie sur John Huston) et François Guérif (éditeur et auteur de nombreux ouvrages sur le cinéma) analysent le  » film maudit de John Huston «  comme ce module est intitulé, tout en le replaçant dans la filmographie du cinéaste. Maudit dans le sens où Le Vent de la plaine a connu de nombreux problèmes sur le tournage mais aussi au montage (remanié et coupé de plus de trente minutes dans le dos de John Huston) jusqu’à ce que le réalisateur finisse par se désintéresser de son oeuvre. Quelques anecdotes de tournage viennent évidemment illustrer ces analyses passionnantes durant lesquelles sont abordés les thèmes du film.

Nous retrouvons ensuite le même François Guérif qui présente le roman d’Alan Le May dont est adapté Le Vent de la plaine. Notre interlocuteur dresse ensuite un parallèle entre cette oeuvre et La prisonnière du désert et pour cause puisque le chef-d’oeuvre de John Ford est également adapté d’un roman du même auteur. Désireux de réhabiliter cet auteur oublié, François Guérif dresse ici une petite bio-filmographie d’Alan Le May (il a été également scénariste, metteur en scène et comédien), spécialiste du Grand Ouest Américain dont la principale marque de fabrique était de très bien connaître la coexistence entre les indiens et les hommes blancs. Ce thème présent dans ses livres se retrouve comme l’indique François Guérif, dans La prisonnière du désert et Le Vent de la plaine qu’il considère comme les deux faces d’une même pièce.

Un dernier module d’un quart d’heure intitulé  » Audrey l’indienne «  donne cette fois la parole à Suzanne Liandrat-Guigues (auteur avec Jean-Louis Leutrat de Splendeur du Western) et Gilles Laprévotte, auteur de Indian’s Songs. Dans cet entretien croisé, les deux intervenants abordent la représentation des indiens au cinéma, son évolution, ses clichés et ses valeurs. Du statut de bête sauvage à celui de victime, la figure indienne a inspiré les westerns depuis les années 10 au temps du cinéma muet jusqu’à Danse avec les loups auquel il est fait référence à plusieurs reprises. Le personnage incarné dans Le Vent de la plaine par Audrey Hepburn (choix qui étonnera toujours les passionnés du western) est évidemment au centre de ce segment didactique et la thématique de la  » captivité  » d’une indienne par des blancs, fait plutôt rare dans le genre, est finement exposée.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce du film.

Image - 3,5 / 5

Si l’ancienne édition du Vent de la plaine sortie en 2004 chez MGM commençait à prendre de la bouteille compte tenu des standards actuels, ce transfert Blu-ray lui offre un petit dépoussiérage numérique même si la définition est loin d’être parfaite. Par rapport à l’édition SD, les contrastes retrouvent une certaine densité, la luminosité HD est bienvenue et la colorimétrie n’a jamais été aussi vive et saturée (voir les yeux de Burt Lancaster). Seulement le grain demeure trop appuyé sur les plans de ciel (d’un bleu cyan plutôt sidérant il faut bien l’avouer), le piqué manque de fermeté, surtout sur les séquences sombres, et les fondus enchainés entraînent de sensibles mais notables décrochages. Quelques dépôts résiduels demeurent tout comme certaines rayures verticales, points blancs, fourmillements sur les arrière-plans et autres griffures. Comme souvent, c’est le générique qui a subi le plus les outrages du temps mais ce master trouve ensuite et heureusement un équilibre convenable.

Son - 4,0 / 5

La piste française DTS-HD Master Audio 2.0 au doublage réussi s’en sort très bien du point de vue ardeur mais se concentre trop sur les dialogues du film au détriment des ambiances annexes. De plus, certaines saturations sur les aigus tendent à vriller les tympans. Si la version originale est plus modérée, les voix des comédiens apparaissent plus fluides et les ambiances plus naturelles et homogènes. Dans les deux cas, aucun souffle intempestif n’est à déplorer, la propreté est de mise et la partition du compositeur culte Dimitri Tiomkin est restituée avec fracas, surtout sur la piste française.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm