Despair (1978) : le test complet du Blu-ray

Édition Collector

Réalisé par Rainer Werner Fassbinder
Avec Dirk Bogarde, Andréa Ferréol et Klaus Löwitsch

Édité par Carlotta Films

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Le 18/09/2012
Critique

Hermann Hermann est un propriétaire d’usine de chocolat, d’origine russe, dans l’Allemagne du début des années 1930. Partageant ses fantasmes et ses perversions avec sa femme Lydia, il est hanté par des visions de son double. Pendant un voyage d’affaires, il rencontre le vagabond Félix et voit en lui son sosie qui lui inspire un plan risqué : Félix et Hermann vont échanger leurs rôles dans la vie…

Despair est le 31ème film de Rainer Werner Fassbinder, âgé seulement de 31 ans. Pour sa première production internationale en langue anglaise, le cinéaste se voit doté d’un budget encore plus important que tous ses précédents films réunis, et d’un casting porté par Dirk Bogarde (Portier de nuit, Mort à Venise) et Andréa Ferréol (La Grande Bouffe). Le cinéaste allemand adapte La Méprise de Vladimir Nabokov (1932) sur un scénario du dramaturge Tom Stoppard et livre une de ses oeuvres les plus iconoclastes, influencée par les drames classiques, l’esthétique art déco (les teintes lilas abondent), prenant pour thème la figure du double et la folie comme seule échappatoire d’un quotidien monotone.

La caméra virtuose du metteur en scène et du chef opérateur Michael Ballhaus danse littéralement autour et avec les personnages dans un palais des glaces mental (mais aussi au sens propre) dans lequel se perd Hermann Hermann, industriel russe exilé en Allemagne, en pleine crise existentielle alors que la menace nazie se profile à l’horizon. Alors qu’il sombre progressivement dans la schizophrénie et que tout espoir semble perdu pour lui, il rencontre un forain-vagabond dans lequel il voit son reflet parfait, ce qui n’est pas du tout le cas. Comme dans la plupart des films de Fassbinder, le personnage principal sombre dans la folie, mais cette fois volontairement, pour envoyer balader ses responsabilités, sa femme-enfant peu cultivée avec qui il n’entretient que des rapports charnels, son mal-être. En se réfugiant dans ses pensées, Hermann se créé une alternative au monde réel dans lequel il retrouve une certaine liberté et une indépendance qui lui faisaient défaut, pour pouvoir recommencer une nouvelle vie.

Oeuvre inquiétante, labyrinthique, vertigineuse et virtuose, Despair hypnotise le spectateur. Mais bien au-delà de la folie du personnage, c’est celle qui gangrène peu à peu un pays tout entier qui est évoquée ici, depuis la fin de la Première Guerre mondiale. Comme d’habitude, Rainer Werner Fassbinder réalise la radiographie de l’Allemagne.

Présentation - 5,0 / 5

La jaquette reprend la couleur mauve omniprésente dans la première partie du film, se voit glissée dans une superbe boitier Blu-ray de couleur blanche, lui-même reposant dans un surétrui cartonné élégant. La sérigraphie du disque est également de couleur mauve, le menu principal est magnifique, animé et musical.

Bonus - 4,0 / 5

Outre la bande-annonce de la ressortie 2012 du film et les credits du Blu-ray, Carlotta Films nous propose un documentaire exceptionnel d’une heure dix intitulé Le Cinéma et son double : retour sur Despair de Rainer Werner Fassbinder. Ce module rétrospectif réalisé par Robert Fischer revient en quelques chapitres sur la production du 31ème film du cinéaste allemand le plus prolifique de tous les temps. Parsemé de fantastiques images issues du tournage montrant le réalisateur sur le plateau ou à l’oeuvre avec ses comédiens, ce documentaire donne la parole au scénariste Tom Stoppard, à la comédienne André Ferréol, au chef opérateur Michael Ballhaus, à la monteuse Juliane Lorenz, à l’assistant-réalisateur Harry Baer, ainsi qu’à Rainer Werner Fassbinder lui-même qui se confie à son ami et cinéaste danois Christian Braad Thomsen à l’occasion de la présentation de Despair en compétition officielle au Festival de Cannes en 1978. Tandis que les proches du comédien Dirk Bogarde et un de ses biographes témoignent sur la façon dont ce dernier s’est préparé pour le rôle d’Hermann Hermann et resté dans la peau de son personnage jusqu’à la postsynchronisation, l’acteur témoigne lui-même sur sa relation avec Fassbinder via un enregistrement audio.

Les anecdotes de tournage s’enchainent, la transposition de l’oeuvre de Vladimir Nabokov est analysée, ainsi que les thèmes abordés, le confort de la production (premier film international de Fassbinder, stars au casting, tournage en anglais, gros budget), la mise en scène (dont la chorégraphie de la caméra avec les acteurs), l’usage des couleurs et la construction des décors (dont une rue reprise de L’Oeuf du Serpent d’Ingmar Bergman), la relation du cinéaste avec ses comédiens, l’accueil de la critique (positive) et du public (froid), le montage original (3 heures réduites à 2h30 puis 2 heures) via quelques photos des scènes coupées. Michael Ballhaus avoue d’ailleurs regretter le montage original qu’il jugeait plus haletant et mystérieux.

Image - 5,0 / 5

Honnêtement, il serait difficile voire impossible de faire mieux. Ce master HD au format 1.66 en met plein les yeux. Passé un générique un peu terne, la restauration se révèle extraordinaire (aucune scorie n’a survécu au lifting numérique), les séquences diurnes affichent un relief inédit, une clarté élégante, une profondeur de champ inouïe ainsi qu’un piqué sans cesse mordant. La magnifique photo de Michael Ballhaus met en valeur les teintes mauves et lilas, omniprésentes durant la première partie sur les accessoires, les costumes, les éléments du décor jusque dans les credits du générique d’ouverture, les intérieurs jouissent d’un rare éclat, les détails abondent et chaque mouvement d’appareil peut compter sur un encodage AVC solide comme un roc. La stabilité n’est jamais prise en défaut, les contrastes sont riches et les noirs denses, tandis que les séquences nocturnes s’avèrent aussi profondes que les scènes diurnes.

Son - 4,0 / 5

Comme l’indique un carton en avant-programme, Rainer Werner Fassbinder déclarait que Despair présente deux versions originales. La version anglaise, la langue du roman, du scénario et l’acteur principal, et la version allemande, langue du réalisateur, du casting à l’exception des deux comédiens principaux. En France, Despair a été exploité en version anglaise et ne bénéficie donc pas de doublage français. Les deux versions disponibles sur le Blu-ray jouissent d’un écrin DTS-HD Master Audio 1.0 correct à défaut d’être réellement convaincant, surtout en allemand, doublage qui manque singulièrement de naturel et qui dénature toutes les ambiances annexes. Du point de vue dynamique, la version anglaise l’emporte aisément sur son homologue, même si nous vous conseillons de monter le volume pour un meilleur confort. Dans les deux cas, la musique de Peer Raben est joliment restituée et les saturations sont évitées.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

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5
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1
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Franck Brissard
Le 7 novembre 2014
Pas de commentaire.
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Sabrina Piazzi
Le 28 septembre 2012
Pas de commentaire.

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