Réalisé par Katell Quillévéré
Avec
Sara Forestier, François Damiens et Adèle Haenel
Édité par TF1 Studio
Fille-mère à l’adolescence, Suzanne vit avec son père routier et sa soeur dont elle est inséparable. Sa vie bascule lorsqu’elle tombe amoureuse de Julien, petit malfrat qui l’entraine dans sa dérive. S’ensuit la cavale, la prison, l’amour fou qu’elle poursuit jusqu’à tout abandonner derrière elle…
Avec son premier long métrage, Un poison violent (Prix Jean Vigo 2010), la réalisatrice Katell Quillévéré s’est immédiatement imposée parmi les jeunes cinéastes françaises à suivre de très près, au même titre que Céline Sciamma (Naissance des pieuvres, Tomboy) et Léa Fehner (Qu’un seul tienne et les autres suivront). Nous attendions de pied ferme son deuxième long métrage et autant dire que Suzanne dépasse toutes nos espérances.
Ce sublime drame, présenté en ouverture de la 52ème Semaine de la Critique, dans le cadre du Festival de Cannes 2013, est renversant du début à la fin et s’apparente à un véritable coup de poing dans l’estomac. Magnifiquement interprété par Sara Forestier (transfigurée), à qui on aurait volontiers décerné un nouveau César de la meilleure actrice, mais également François Damiens (bouleversant) et Adèle Haenel, auréolée à juste titre du César de la meilleure actrice dans un second rôle, Suzanne - référence à la chanson de Leonard Cohen mais aussi bien évidemment à l’héroïne du film de Maurice Pialat A nos amours - est un film sur le destin et les répercussions sur sa famille d’une jeune fille-mère qui se perd par amour pour un jeune filou au coeur tendre, dont la justesse d’écriture, la maîtrise de la mise en scène et la limpidité du récit (toujours sous tension) laissent pantois d’admiration pour un deuxième film.
Mais ce qu’on retient le plus c’est évidemment les personnages de Suzanne. Sur une période de 25 ans, le spectateur suit l’histoire de ces trois personnages principaux, un père veuf et ses deux filles, que la vie va séparer, se faire recroiser, réconcilier. Il faut voir avec quel aplomb et avec quelle immense sensibilité les acteurs s’emparent à bras le corps de leurs personnages.
L’ellipse de temps est récurrente dans Suzanne, portrait de femme ou plutôt fresque familiale, marquée par un fondu au noir, suggérant les évènements sans les montrer ou rouvrant sur une période déterminée et déterminante pour chacun des membres de cette famille marquée par le sceau du destin. Cela implique constamment le spectateur qui doit recoller les morceaux quant à ce qui a pu intervenir entre deux laps de temps, tandis qu’un protagoniste peut simplement exister à travers d’autres, à l’instar de la disparition de Suzanne vue à travers le regard du père et de la soeur cadette.
Intense, libre, épuré, violent, sombre et pourtant lumineux, à l’image du personnage éponyme, on en ressort avec le coeur en miettes.
Suzanne arrive en Blu-ray en pleine actualité cannoise, exactement un an après sa révélation sur la Croisette. Le menu principal est soigné, animé et musical. La jaquette reprend le visuel de l’affiche du film.
En guise de suppléments, nous ne trouvons que des interviews de Katell Quillévéré (9’), Sara Forestier (7’), Adèle Haenel (4’) et François Damiens (5’). Heureusement, ces entretiens s’avèrent denses, passionnés, sensibles et indispensables. La réalisatrice revient sur la genèse du film, les thèmes abordés, l’origine du titre, ses inspirations, le travail avec les comédiens. Ces derniers sont tout aussi intéressants que la cinéaste et abordent leur collaboration avec Katell Quillévéré, ainsi que la psychologie des personnages.
Le master HD édité par TF1 Vidéo restitue habilement les volontés artistiques du chef opérateur Tom Harari (Un poison violent, La Bataille de Solférino, Tonnerre) en conservant un très léger grain cinéma, des couleurs à la fois chaudes et froides, des contrastes léchés ainsi qu’un relief constamment palpable. Ces volontés artistiques entraînent certes une image parfois plus douce, une légère perte de la définition sur les séquences sombres, mais ce serait vraiment chipoter car la compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre et les visages des comédiens, le piqué est aiguisé, les noirs denses et la copie éclatante.
Le confort acoustique est plaisant grâce à la piste française DTS-HD Master Audio 5.1. Les voix sont claires et limpides sur la centrale, la spatialisation musicale est aussi systématique, les basses sont présentes pour les séquences en discothèque et la balance frontale dynamique. Les latérales assurent le minimum syndical avec quelques ambiances naturelles et savent se faire entendre aux moments opportuns.
Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles, ainsi qu’une piste Audiodescription.
Crédits images : © TF1 Vidéo