Le Cheval de fer (1924) : le test complet du Blu-ray

Davy a été engagé par la Central Pacific associée à la South Pacific pour la construction, à partir de 1862, sur une proposition d’Abraham Lincoln au Congrès, d’une ligne de chemin de fer qui doit traverser les USA d’est en ouest. Dans le Nevada, la ligne pourrait se frayer un passage entre des collines. Mais Deroux, un propriétaire local, veut cacher cette possibilité pour que la ligne traverse ses terres, au prix d’un grand détour. Davy reconnaît en lui l’homme qui a, quelques années plus tôt, assassiné son père. Il retrouve aussi Miriam, son amie d’enfance, maintenant fiancée à un ingénieur de la Central Pacific.

Le Cheval de fer (The Iron Horse, 1924) est le premier film à grand budget de John Ford, après une cinquantaine de courts ou moyens métrages, en majorité des westerns. Michael Fox lui a alloué des moyens que les Studios Universal n’auraient pas pu rassembler pour le financement d’une telle entreprise (16.000 figurants furent recrutés). La Fox voulait résister à la concurrence de Paramount qui venait, en 1923, de sortir le plus ambitieux western jamais tourné, La Caravane vers l’Ouest (The Covered Wagon).

Le Cheval de fer, sur un arrière-plan de vérité historique (de nombreux cartons viennent rappeler les faits), se greffe une fiction à quatre personnages principaux : Davy, le héros sans peur et sans reproches, interprété par George O’Brien, cantonné jusque-là aux seconds rôles, mais qu’on reverra dans dix autres films de John Ford, dont Le Massacre de Fort Apache (1948), La Charge héroïque (She Wore a Yellow Ribbon, 1949) et Les Cheyennes (Cheyenne Autumn, 1964). Miriam est jouée par Madge Bellamy, une des stars de la Fox, titulaire du rôle-titre du Lorna Doone de Maurice Tourneur (1922), mais qui ne résistera pas longtemps à l’arrivée du cinéma parlant. Fred Kohler, abonné aux rôles de méchants dans près de 150 films, incarne Deroux, le super-vilain à la main droite estropiée, séquelle d’une blessure accidentelle du temps où l’acteur travaillait dans une mine. Le quatrième personnage est l’ingénieur Jesson dont le rôle est tenu par Cyril Chadwick, un Londonien qui fit toute sa carrière aux USA.

L’intrigue entre ces quatre personnages, un peu simpliste, est toutefois assez solidement structurée pour entretenir la tension dramatique. Et, comme toujours dans le cinéma de John Ford, une large place est accordée à l’action, tantôt aux mouvements d’une foule de figurants dans les vastes paysages du Nevada et de Californie, tantôt à de sévères empoignades dans le saloon local.

L’humour garde aussi des droits, alimenté par le personnage du Juge Haller, qui change de casquette au gré des événements, patron du saloon quand tout est calme et, quand les choses tournent au vinaigre, juge autoproclamé. Le saloon, qui suit le déplacement vers l’Ouest du chantier, est nommé Hell on Wheels, ce qui deviendra, 87 ans plus tard, le titre de la fameuse série créée par Joe et Tony Gayton sur le même thème de la construction du chemin de fer transcontinental.

On voit déjà poindre dans Le Cheval de fer les signes annonciateurs des grands westerns à venir : La Chevauchée fantastique (Stagecoach, 1939), La Poursuite infernale (My Darling Clementine, 1946), La Prisonnière du desert (The Searchers, 1956)…

Le Cheval de fer nous est proposé dans sa version US de 150 minutes (plus longue de 17 minutes que la version européenne) sur un Blu-ray double-couche logé dans un boîtier glissé dans un fourreau. Le menu propose deux pistes audio pour l’accompagnement musical : DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0. Le sous-titrage des cartons est imposé.

Ce Blu-ray, et quatre autres qui sortent simultanément, viennent enrichir un filon pour les amateurs de westerns, la collection Western de légende de Sidonis Calysta qui fête son dixième anniversaire.

Patrick Brion, dans sa présentation du film (8’), nous dit qu’il est le premier que John Ford put réaliser avec un grand budget. Il rappelle les statistiques étalées par la Fox à la sortie du film, 3.000 ouvriers, 1.000 Chinois, 800 Indiens, 2.000 chevaux, 1.300 bisons et 10.000 bovins ! J’ai vérifié. Tout ça est bien exagéré, avec, de plus, des tentatives de tromperie sur la marchandise : moult Chinois et autres Indiens sont des blancs grimés !

Patrick Brion souligne aussi le souci de respecter la vérité historique : John Ford, comme nous le signale un carton à la fin du film, a même fait transporter sur les lieux du tournage deux locomotives identiques à celles qui ont inauguré la ligne en 1869, la Jupiter et la 116.

L’image (1.37:1, 1080p, AVC) est d’une qualité assez étonnante pour un film qui va bientôt fêter ses cent ans. La définition permet de suivre l’action sans difficultés, même sur des arrière-plans éloignés, par exemple, ceux de l’attaque finale du chantier par les Cheyennes. Les dégradés de gris ont été, dans l’ensemble, correctement restitués.

Un traitement plus poussé pourrait un jour faire disparaître les taches et griffures qui ont échappé à la restauration.

Deux formats sont proposés, DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0, pour l’accompagnement musical, composé, orchestré et dirigé en 2007 par Christopher Caliendo, trop illustratif selon les canons actuels, mais plutôt fidèle à ceux de l’accompagnement des films muets.

Le son est propre, avec un spectre ouvert et une belle dynamique. Le choix entre les deux options dépendra de l’installation, le format multicanal élargissant sans conteste l’image sonore.

Crédits images : © Sidonis Calysta