Made in France (2015) : le test complet du Blu-ray

Sam, journaliste indépendant, profite de sa culture musulmane pour infiltrer les milieux intégristes de la banlieue parisienne. Il se rapproche d’un groupe de quatre jeunes qui ont reçu pour mission de créer une cellule djihadiste et semer le chaos au coeur de Paris.

Made in France fait partie de ces films rattrapés par la réalité. La sortie sur les écrans du sixième long métrage de Nicolas Boukhrief, initialement prévue pour le 18 novembre 2015, s’est vue repoussée en janvier 2016 à la suite des attentats du 13 novembre 2015. Sa diffusion dans les salles est finalement annulée suite aux réticences de nombreux exploitants de salles, au profit d’une diffusion directe en vidéo à la demande le 29 janvier 2016. Le réalisateur et scénariste des solides Le Convoyeur (2004), Cortex (2007) et Gardiens de l’ordre (2010), signe un film très réussi et évidemment brûlant d’actualité.

Véritable thriller d’infiltration, Made in France a été tourné avant les attentats parisiens de janvier 2015. Ce sujet sensible, que Nicolas Boukhrief a eu du mal à financer, «  anticipe  » le déroulement du mode opératoire du vendredi noir de novembre 2015. A l’origine, l’affiche du film présentait une image intégrant un fusil d’assaut Kalachnikov AK-47 scindé avec la tour Eiffel. Jugée percutante voire choquante par les médias lors de sa diffusion, notamment dans le métro parisien dès le 12 novembre, cette affiche est immédiatement retirée et la campagne d’affichage stoppée dès le lendemain des attentats.

Nicolas Boukhrief souhaitait réaliser un film sur ce sujet depuis 1995 suite à la retransmission de la cavale du terroriste Khaled Kelkal : ,« Digne des pires clichés de terroristes barbus qui hantent le cinéma américain depuis le milieu des années quatre-vingt, sa mort en soi-disant  » martyr  » ne peut pas résumer à elle seule le parcours sanglant de cet enfant des cités. Qui est ce jeune homme ? Comment a-t-il pu en arriver là ? Quelle est sa part d’humanité ? Comment son intégration dans la société française a-t-elle pu échouer à ce point ? ». Les tueries perpétrées en mars 2012 par Mohamed Merah ont ensuite poussé le réalisateur à mettre en route son dernier film. Il aura donc fallu vingt ans pour que Nicolas Boukhrief puisse aboutir à Made in France.

Avec l’aide de son coscénariste Eric Besnard, le cinéaste prend comme protagoniste un jeune journaliste né d’un père algérien et d’une mère française, comme Nicolas Boukhrief lui-même. Pour les besoins d’une enquête il infiltre les milieux intégristes de la banlieue parisienne et se lie à un groupe de jeunes, mené par un français converti de retour d’un entraînement au Pakistan, sur le point de commettre des attentats sur les Champs-Elysées, en coordination avec d’autres opérations simultanées dans la capitale. Nicolas Boukhrief livre une plongée anxiogène (impression renforcée par la musique de Rob) au sein du terrorisme d’intérieur, jusqu’alors rarement abordé dans le cinéma français. En dehors de La Désintégration de Philippe Faucon (2011), les autres tentatives n’ont été que des échecs ou semi-réussites à l’instar de L’Assaut de Julien Leclercq ou Secret défense de Philippe Haïm. Sans concession, avec des dialogues percutants et une interprétation impressionnante de réalisme (Dimitri Storoge, Malik Zidi, François Civil, Nassim Si Ahmed, Franck Gastambide) qui fait froid dans le dos, l’oeuvre de Nicolas Boukhrief ne tente pas de disséquer les motivations qui poussent des jeunes, issus de classes sociales opposées, à tomber dans le repli communautaire radical et irréversible, mais souhaite plutôt montrer la banalité avec laquelle ils basculent vers le terrorisme.

Sur un sujet casse-gueule, et malgré un dernier acte plus «  polar traditionnel  », le réalisateur signe un thriller essentiel, tendu, nerveux et foudroyant. 


Le test du Blu-ray de Made in France a été réalisé sur un check-disc. Le visuel de la jaquette diffère de celui de l’affiche du film. Le fusil d’assaut Kalachnikov AK-47 ne se confond plus avec la tour Eiffel. Le menu principal est animé et musical.

L’entretien avec Nicolas Boukhrief (19’) a été réalisé avant les attentats du 13 novembre 2015. Avec franchise et une sensibilité à fleur de peau, le cinéaste revient sur la genèse de Made in France, le casting et le travail avec les comédiens, la musique de Rob, le désir de traiter ce sujet brûlant, l’écriture avec son coscénariste Eric Besnard, les conditions de tournage, en rappelant que l’actualité rattrapait peu à peu la fiction. Nicolas Boukhrief revient sur les attentats de Charlie Hebdo, survenus alors qu’il mettait fin au mixage de son film.

L’éditeur joint également quelques scènes coupées (7’), non mixées et non étalonnées, qui ne présentent guère d’intérêt présentées ainsi.

Si l’on excepte quelques plans plus doux, la copie HD du film de Nicolas Boukhrief se révèle irréprochable. Que l’histoire se déroule dans les décors urbains, sombres, ou bien dans des intérieurs plus froids, le master restitue brillamment les partis pris esthétiques de la superbe photographie nocturne du chef opérateur Patrick Ghiringhelli. Le relief est omniprésent, le piqué aiguisé comme une lame de rasoir, la clarté de mise et les contrastes d’une densité indiscutable. Le cadre large est magnifiquement exploité, les détails sont légion, le grain cinéma palpable. Le nec plus ultra de la Haute définition, c’est superbe.

Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre un mixage DTS-HD Master Audio 5.1, aussi percutant dans les scènes d’affrontements secs que dans les séquences plus calmes. Les quelques pics de violence peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales. Les effets annexes sont très présents et dynamiques, les voix solidement exsudées par la centrale, tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun et la musique composée par Rob. La spatialisation est en parfaite adéquation avec le ton du film.

TF1 Vidéo livre également une piste en Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © TF1 Vidéo