Little Big Man (1970) : le test complet du Blu-ray

Édition Coffret Ultra Collector - Blu-ray + DVD + Livre

Réalisé par Arthur Penn
Avec Dustin Hoffman, Faye Dunaway et Chief Dan George

Édité par Carlotta Films

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Le 21/10/2016
Critique

Little Big Man

« Je m’appelle Jack Crabb et je suis le seul survivant blanc de la bataille de Little Bighorn. Il y a cent onze ans, alors que j’avais dix ans, ma famille, en traversant les Grandes Plaines, fut exterminée par une bande d’Indiens, sauf moi et ma soeur Caroline. » Voilà comment commence le long récit de sa vie que fait Jack Crabb à un journaliste.

Little Big Man est le huitième des treize longs métrages réalisés pour le grand écran par Arthur Penn. Après des débuts au théâtre et à la télévision, tourne son premier film, Le Gaucher (The Left Handed Gun, 1958) et écrit, dès 1960, le scénario de Little Big Man, adapté du roman éponyme de Thomas Berger, montrant son intérêt pour le western. Un genre qu’il choisira d’aborder à sa manière quand il se lancera, une dizaine d’années plus tard, dans la mise en images des souvenirs de Jack Crabb.

« He’s little in body, but his heart is big: his name shall be Little Big Man

Les aventures de Jack Crabb sont d’emblée relatées sur le ton de la comédie burlesque qui deviendra, peu à peu, plus dramatique. Little Big Man est une sorte de tragi-comédie en trois actes : l’apprentissage de la vie, puis le mûrissement et la réflexion, enfin la désillusion.

À l’instar du Billy the Kid dans Le Gaucher et de Bonnie & Clyde, Jack Crabb est en quête de son identité, balloté, par une succession fortuite d’événements sur lesquels il n’a pas prise, d’un monde à un autre, de celui des Cheyennes à celui des Blancs. Il rencontrera, à plusieurs époques, dans l’un et l’autre de ces deux univers, des personnages qui auront compté dans sa vie, dont les qualités ou les défauts auront facilité sa découverte de la nature humaine, dans ce qu’elle a de meilleur at aussi de pire.

Chez les Cheyennes, c’est la figure tutélaire de Grand Father, le vieux chef qui l’a adopté comme son fils (la seule nomination du film aux Oscars fut celle de Chief Dan George, l’acteur qui tient ce rôle : le film, apprécié en Europe, fut boudé à sa sortie aux USA).

Little Big Man

Plus nombreux sont les personnages rencontrés chez les Blancs, mais moins proches, juste esquissés à grands traits. Mrs. Pendrake, (Faye Dunaway) ménage à Jack un bien doux retour chez les Blancs : « the boy needs a good bath » dit-elle à son mari, un pasteur bourru à l’appétit gargantuesque qui trouve le garçon « bien développé pour son âge ». Puis le docteur Allardyce T. Meriweather, un bonimenteur vivant de la vente d’une panacée universelle, lui apprend qu’on peut faire tout avaler aux créatures à deux pattes. Puis ce seront Olga, la Suédoise, avec laquelle il convolera en justes noces, le général Custer, ex-héros de la guerre de Sécession reconverti dans la chasse à l’Indien, puis Wild Bill Hickok, le mythique as de la gâchette…

Little Big Man s’écarte résolument des sentiers hollywoodiens, d’abord en prenant parti pour les Indiens qu’il montre comme les victimes d’un génocide. Il brosse du général Custer, présenté comme un héros par la majorité des westerns, un portrait peu flatteur, celui d’un fanfaron buté imperméable à toute critique, indifférent à tout conseil.

Ensuite, à la différence d’autres films qui ont soutenu la cause indienne, Arthur Penn, à la manière de Voltaire dans son Candide, maintient la dimension comique du récit et évite d’étaler la boucherie du massacre du campement indien de Washita River comme l’a fait, notamment, Ralph Nelson dans Soldat bleu, réalisé la même année. Le massacre, filmé de loin, se perpétue au son guilleret des fifres et tambours jouant « Garry Owen », une marche irlandaise adoptée par Custer comme hymne de son régiment, le 7e de cavalerie.

Enfin, interprété par Dustin Hoffman avec toutes ses tripes, le « héros » du film est, à l’encontre des conventions, négatif : poltron, menteur, hâbleur, il est prêt à toutes les compromissions pour sauver sa peau.

Arthur Penn déclare, à ce propos, dans le documentaire sur le tournage de Little Big Man joint aux suppléments, qu’il a voulu faire un film personnel sur la « colonisation » des territoires indiens, soulignant que « l’Histoire dépend aussi de celui qui la rapporte et de celui auquel on la rapporte. » Le film est ce qu’il a voulu en faire, sans grande ingérence des studios. Il s’est même réjoui que leur faillite lui ait laissé la main sur le montage !

Little Big Man

Présentation - 5,0 / 5

Dans ce Coffret Ultra Collector, en édition limitée à 3 000 exemplaires, Little Big Man (139 minutes) et ses suppléments (80 minutes) tiennent sur un Blu-ray double couche, accompagné de deux DVD, l’un du film, l’autre des suppléments.

Le menu animé et musical propose la version originale sous deux formats audio, DTS-HD Master Audio 5.1 ou mono 1.0 (avec sous-titres imposés, ce qui n’est pas dans les habitudes de Carlotta Films) et un doublage en français au format DTS-HD Master Audio 1.0.

À l’instar des autres titres de la Collection Coffrets Ultra Collectors de Carlotta Films, Body Double, L’Année du dragon, Panique à Needle Park, et l’attendu The ‘Burbs (Les banlieusards) de Joe Dante, les disques sont glissés dans la couverture d’un livre (16 x 22 cm), ici de 160 pages, richement illustré de photos du film et de photos de plateau, rassemblant Le cinéma selon Penn, un long entretien entre le réalisateur et Robin Wood, journaliste du magazine Movie, enregistré à l’occasion de la sortie du film au Canada, puis deux articles écrits par le même Robin Wood, Le tournage de Little Big Man et Little Big Man (ce dernier repris dans la revue Positif d’avril 1971). Viennent ensuite La démocratie et les chimères ou Le western selon Arthur Penn, par Michel Cieutat (Positif, juin 2011) et La représentation des Amérindiens dans un western révisionniste, par Margo Kasdan et Susan Tavernetti, extrait de leur livre The Portrayal of the Native American in Film.

Une des plus belles sorties de l’année, coéditée par Carlotta Film et L’Atelier d’images.

Little Big Man

Bonus - 5,0 / 5

En entrée, dans une utile préface du film (7’), Philippe Rouyer, historien du cinéma et critique à Positif, rappelle l’arrivée d’Arthur Penn au cinéma après une première expérience du théâtre et de la télévision, resitue le film, réalisé après Le Gaucher (1958) et Miracle en Alabama (The Miracle Worker, 1962), Bonnie & Clyde et juste après Alice’s Restaurant (1969) et analyse rapidement le thème du personnage sans racines, cherchant sa place dans la société.

Suit, Une épopée picaresque (25’) où Philippe Rouyer explique les différences entre le livre de Thomas Berger et le scénario, l’approche assez pessimiste du sujet, peut-être influencée par le désenchantement ressenti à la fin des années hippies, exprimé par Alice’s Restaurant. Le mauvais accueil du film aux USA marqua, pour Arthur Penn, le début d’une traversée du désert, un vide de cinq ans avant ses prochains films, Night Moves (toujours absent des bacs) et Missouri Breaks. Pas sûr qu’il soit pertinent de voir, comme certains l’ont soutenu, dans la représentation du massacre de Washita River une allusion au massacre de My Lai, perpétré cent ans plus tard, pendant la guerre du Vietnam, spéculation probablement hasardeuse dans la mesure où Arthur Penn avait déjà écrit son scénario plusieurs années avant le massacre.

Vient ensuite Arthur Penn, le réalisateur, sur le tournage de Little Big Man (1970, 26’) Le cinéaste dit vouloir réaliser un western inhabituel en portant un regard plus critique sur l’histoire des années suivant la guerre de Sécession. Il est tant investi dans la réalisation qu’on le voit mimer à voix basse les dialogues, mettre l’oeil à l’objectif, courir à droite et à gauche, veiller à tout. Dustin Hoffman intervient alors pour dire que tout le monde s’ennuie sur le tournage… sauf le réalisateur ! On assiste aussi à son maquillage en vieillard et aux hurlements qu’il pousse dans sa loge pour s’érailler la voix.

Dans Les multiples facettes de Dustin Hoffman (1970, 14’), l’acteur se souvient avoir appris à monter à cheval, trois heures par jour, et avoir dû mémoriser de longs dialogues, allant pour certains jusqu’à quatre pages. Il a aussi appris que l’acteur doit accepter de n’être pas toujours attirant et à mettre une partie de lui-même dans l’interprétation de son personnage pour donner l’illusion de ne pas jouer, mais d’être le personnage.

Pour finir, la bande-annonce originale, en anglais et en français (en réalité un teaser de 4’) et la bande-annonce de 2016.

Little Big Man

Image - 5,0 / 5

L’image (2.35:1, 1080p, AVC) est d’une parfaite propreté si l’on oublie de très occasionnels scintillements et fourmillements uniquement discernables sur les fonds de ciel clair dans quelques plans, le prix à payer pour sauvegarder la texture argentique d’origine.

La fraîcheur et la finesse des couleurs, soigneusement étalonnées, la fermeté des contrastes témoignent de la qualité de la restauration sur laquelle on ne nous dit rien (s’agit-il de celle opérée fin 2011 pour la première édition sur Blu-ray par Paramount ?)

Little Big Man

Son - 5,0 / 5

Deux formats sont proposés pour la version originale, DTS-HD Master Audio 5.1 ou mono 1.0, les deux d’une irréprochable propreté. J’ai préféré la remastérisation 5.1 : réalisée avec délicatesse, elle donne plus d’ampleur à l’accompagnement musical de John Hammond pour guitare et harmonica et une discrète sensation d’immersion dans l’action. On n’entendra pas les objections des puristes qui pourront se rabattre sur la piste mono d’origine.

Le doublage en français (DST-HD Master Audio 1.0), d’une bonne qualité technique, souffre du manque de naturel des dialogues.

Little Big Man

Crédits images : © 1970 HILLER PRODUCTIONS, LTD. AND STOCKBRIDGE PRODUCTIONS, INC. Tous droits réservés. © 2016 CBS STUDIOS INC. CBS et tous les logos apparentés sont des marques de CBS BROADCASTING INC. Tous droits réservés.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 21 octobre 2016
L’inoubliable Little Big Man nous revient, après une si longue absence, dans une magnifique édition, l’une des plus remarquables de l’année pour la qualité de la restauration de l’image et du son, pour sa présentation et, surtout, pour l’intérêt de ses bonus. Un beau cadeau à faire, ou à se faire, à l’approche de la fin de l’année !

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