J'embrasse pas (1991) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par André Téchiné
Avec Manuel Blanc, Philippe Noiret et Emmanuelle Béart

Édité par Studiocanal

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Le 27/11/2017
Critique

L’histoire de Pierre qui vient de quitter son Sud-Ouest natal pour tenter fortune à Paris avec pour tout bagage un diplôme de brancardier, et un vague désir de devenir acteur. Il va sombrer dans la prostitution.

Même s’il n’a pas forcément brillé au box-office à sa sortie en novembre 1991 avec 472.000 entrées, ce qui le classe à la neuvième place dans le top 10 du réalisateur, J’embrasse pas d’André Téchiné est considéré à juste titre comme l’un de ses meilleurs et plus grands films. Inspiré de la vie du comédien et cinéaste Jacques Nolot, par ailleurs coscénariste, qui durant son adolescence avait rencontré et fréquenté Roland Barthes, dont est inspiré le personnage de Romain, magnifiquement incarné par Philippe Noiret, J’embrasse pas est empreint de lyrisme propre à la littérature française du XIXè siècle et foudroie le spectateur du début à la fin.

A peine majeur, Pierre Lacaze quitte ses Pyrénées natales pour monter à Paris avec l’idée de devenir comédien. Son seul contact est Evelyne, infirmière d’âge mûr et vieille fille, qu’il a connue alors qu’il était brancardier à Lourdes, et qui ne peut lui trouver d’autre emploi que plongeur à l’hôpital. C’est là qu’il rencontre Saïd, qui l’emmène dîner un soir chez son oncle Dimitri, vieil homosexuel lié à Romain Dumas, producteur d’émissions culturelles à la télévision fréquentant assidûment le monde des jeunes prostitués. Pierre se défie de cet homme et devient l’amant d’Evelyne, qui le cache de sa vieille mère infirme en le logeant dans une chambre sous les toits. Le soir, après le travail, il suit des cours d’art dramatique et s’y révèle peu talentueux, ne comprenant rien au monologue d’Hamlet. Evelyne, fort perturbée et ne se sentant pas aimée comme elle l’attendait, met un terme à sa relation avec le jeune homme, qui se retrouve à la rue. Dormant dans une gare, il s’y fait voler son sac. Démuni de tout, il cherche à se prostituer, mais ne peut finalement s’y résigner. C’est là, au Bois de Boulogne, que Romain l’aperçoit et lui propose de le suivre à Séville le temps d’un reportage. Mais, à peine arrivé, Pierre s’éclipse et rentre à Paris, où il reçoit la visite de son frère Serge, militaire en permission, et où cette fois il se prostitue réellement, sous le nom de… Romain. Un soir de rafle policière, il se laisse volontairement arrêter, car dans le fourgon cellulaire se trouve Ingrid, jeune prostituée précédemment aperçue, qui l’attire au plus haut point. Relâchés au matin, ils ébauchent une idylle que la jeune femme écourte sous la menace de son souteneur.

Avec sa mise en scène frontale, pourtant douce et caressante, André Téchiné dresse le portrait de son jeune personnage, sans porter de jugement, sans désir de réaliser un documentaire sur la prostitution, mais en se focalisant plutôt sur les étapes et rencontres - superbes Hélène Vincent et Roschy Zem - successives qui mènent Pierre vers cette alternative pour pouvoir survivre. Non seulement Pierre fait de son corps un instrument de survie, mais également de plaisir et de jouissance. André Téchiné accompagne Pierre dans sa découverte du vaste monde, un explorateur qui s’engage alors sur un territoire qu’il ne connaît pas et qui se trompe sur ses premiers désirs. Les désillusions font rapidement place au besoin primaire de manger, de dormir et de s’en sortir.

Le choix de confier le premier rôle à Manuel Blanc, qui n’avait alors aucune expérience est donc aussi intelligent qu’ambitieux, puisque le jeune comédien de 23 ans représente l’espoir et la virginité, dont les rêves et les fantasmes vont vite être ruinés. J’embrasse pas est un film certes sombre, mais néanmoins ponctué par des moments d’éclaircies, comme cette confrontation de Pierre avec Ingrid, interprétée par Emmanuelle Béart, au sommet de son art, de son aura érotique et de sa beauté avec son regard azur et sa perruque Louise Brooks. Mais même ce regard lumineux est au bord des larmes et témoigne des coups reçus.

Le récit initiatique de Pierre est difficile, à la fois pour le personnage, mais aussi pour le spectateur, notamment durant l’acte final où le destin se cristallise dans une séquence aussi inéluctable qu’insoutenable, qui tord alors l’estomac et marque encore profondément les esprits longtemps après, tout comme la composition du prolifique Philippe Sarde. Et malgré l’enfer vécu par Pierre, l’espoir demeure malgré tout puisque le film se clôt dans un baptême innocent et vertueux, où tous les horizons semblent possibles. Manuel Blanc a très justement été récompensé par le César du meilleur espoir masculin en 1992.

Présentation - 3,0 / 5

Le test du Blu-ray de J’embrasse pas, disponible chez Studiocanal, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal, fixe et muet, reprend une partie du visuel de l’affiche originale.

Bonus - 2,0 / 5

Cette édition ne contient qu’un seul supplément, mais à ne pas manquer. Il s’agit de l’interview d’André Téchiné (28’), réalisée en 2004, pour la sortie en DVD de J’embrasse pas. Le cinéaste revient sur la genèse du film, né du projet avorté de réaliser un film français au Brésil, qui est finalement devenu un film aux thèmes « brésiliens » transposés en France. André Téchiné aborde ensuite ses intentions, l’écriture du scénario avec Jacques Nolot (basé sur son histoire personnelle, mais aussi sur certains témoignages), les conditions de tournage (l’histoire a été tournée dans sa continuité), le casting, l’évolution du personnage de Pierre et les partis pris.

Image - 4,0 / 5

J’embrasse pas nous parvient en Haute-Définition. La copie est propre, immaculée même, les contrastes très élégants font honneur à la très belle photo du chef opérateur Thierry Arbogast, marquée par des couleurs hivernales. Le grain original est heureusement respecté, le cadre large offre son lot conséquent de détails ciselés, la stabilité est de mise. En dehors de quelques sensibles pertes de la définition, ce Blu-ray s’avère solide et permet de redécouvrir J’embrasse pas dans des conditions très satisfaisantes.

Son - 4,0 / 5

Le mixage DTS-HD Master Audio Stéréo instaure un confort acoustique total. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. La composition de Philippe Sarde jouit également d’un écrin phonique soigné. Dommage que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant soient indisponibles.

Crédits images : © Studiocanal

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm