Réalisé par Jean-Stéphane Sauvaire
Avec
Sean Penn, Tye Sheridan et Gbenga Akinnagbe
Édité par Metropolitan Film & Video
Ollie Cross, jeune ambulancier de New York, fait équipe avec Gene Rutkovsky, un urgentiste expérimenté. Confronté à la violente réalité de leur quotidien, il découvre les risques d’un métier qui chaque jour ébranle ses certitudes et ne lui laisse aucun répit.
Black Flies (Asphalt City) est le quatrième long métrage de Jean-Stéphane Sauvaire, sélectionné à Cannes en 2023 pour la Palme d’or décernée à Justine Triet pour Anatomie d’une chute. Le scénario, coécrit par Ben Mac Brown et Ryan King, est l’adaptation d’un roman de Shannon Burke, créateur avec John Pate de la populaire série d’action et d’aventure diffusée par Netflix, Outer Banks (2020-2024, 40 épisodes).
Jean-Stéphane Sauvaire, après avoir été assistant d’une dizaine de réalisateurs, notamment de Cyril Collard pour Les Nuits fauves et de Gaspar Noé pour Seul contre tous, et réalisé trois courts métrages, attire l’attention avec le documentaire Carlitos Medellin sur l’enfer imposé par les cartels de la drogue en Colombie. Suivront deux autres films également tournés hors de France, deux documentaires-fictions, Johnny Mad Dog, en 2008, sur les enfants-soldats au Liberia, Prix de l’espoir à Cannes dans la sélection Un Certain Regard, et Une prière avant l’aube (A Prayer Before Dawn, 2017), sur la mésaventure d’un jeune boxeur britannique incarcéré en Thaïlande.
- Do you believe in heaven? - I believe in hell!
Black Flies doit sa vision réaliste de la vie des infirmiers ambulanciers à l’expérience de Shannon Burke : né en 1966, il exerça ce métier pendant plusieurs années jusqu’en 2001. L’aspect documentaire du film est encore renforcé par les choix de Jean-Paul Sauvaire de donner la place essentielle aux opérations de secours, de tourner à Brooklyn, d’attribuer les rôles de patients à des non-professionnels recrutés dans le quartier.
We can’t save everyone!
Le réalisme des scènes, particulièrement éprouvantes pour le spectateur sensible, est attesté par les deux ambulanciers dans l’entretien joint en bonus, filmé par le réalisateur. Ils sont très souvent confrontés à l’agressivité, verbale et aussi physique des personnes secourues ou des habitants du quartier. Black Flies souligne doublement la dureté du métier. Par les chocs à l’estomac assénés à Ollie Cross lors de ses premières interventions. Et, pour le vétéran, Gene Rutkovsky, par le stress créé par l’accumulation de visions insoutenables et les questionnements sur le bon choix de certains gestes.
Black Flies, tourné en 23 jours, essentiellement en plans-séquences saisis, caméra à l’épaule, par le chef-opérateur David Ungaro que Jean-Stéphane Sauvaire avait employé en 2017 pour Une prière avant l’aube (A Prayer Before Dawn) et qui fut nommé au Prix Lumière de la meilleure image pour Les Confins du monde (Guillaume Nicloux, 2018).
Black Flies est servi par un choix d’acteurs particulièrement inspiré. Tye Sheridan, remarqué dès son second rôle, celui d’Ellis dans Mud - Sur les rives du Mississippi (Mud, Jeff Nichols, 2012), vu depuis dans une vingtaine de films, parmi lesquels Ready Player One (Steven Spielberg, 2018), incarne avec naturel Ollie Cross, le personnage central. À ses côtés, Sean Penn, sobrement émouvant dans son incarnation du vétéran usé, son 73e rôle après celui qu’il tint à 14 ans dans la première saison de La petite maison dans la prairie (Little House on the Prairie), à l’aube d’une carrière saluée par le Prix d’interprétation masculine à Cannes pour She’s So Lovely de Nick Cassavetes en 1997 et deux Oscars, en 2004 pour Mystic River de Clint Eastwood et en 2009 pour [PROGRAM(milk)] de Gus Van Sant. Le troisième personnage, l’incontrôlable Lafontaine, c’est Michael Pitt, coutumier de personnages inquiétants ; révélé en 2001 par Bully de Larry Clark, il fut un des atouts de Funny Games U.S. (Michael Haneke, 2007) et de la remarquable série Boardwalk Empire.
Black Flies, pour moi, vient en tête des oeuvres qu’inspirèrent pour le grand et le petit écran les services d’urgence, telles A tombeau ouvert (Bringing Out the Dead, Martin Scorsese, 1999) ou les séries New York 911 (Third Watch), Rescue Me, Chicago Fire.
Black Flies (125 minutes) et ses suppléments (74 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé, pour cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9, dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur le seul Blu-ray.
Le film est proposé dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 5.1.
Une édition DVD est disponible, avec le même contenu.
Conversation avec les urgentistes (Paramedics conversation, un documentaire de Jean-Stéphane Sauvaire, 37’). Deux infirmiers-ambulanciers chevronnés des pompiers de New York confirment le réalisme de la représentation que donne le film de la confrontation à des situations traumatisantes, à une violence à laquelle ils sont, de plus en plus souvent, exposés, notamment en raison de l’accroissement de la consommation de stupéfiants. Ils confirment la réticence de certains patients à être amenés à l’hôpital et à devoir régler une facture élevée (l’admission aux urgences a coûté 10 000 dollars à l’un des deux urgentistes), le choix à faire entre deux difficiles décisions, le taux élevé des dépressions et des suicides dans la profession…
Des corps dans la nuit, un entretien avec Jean-Stéphane Sauvaire (29’) conduit par Nicolas Rioult. Après la présentation de Johnny Mad Dog à Cannes, il a eu plusieurs propositions de producteurs étrangers. Il a vu dans l’adaptation du roman Black Flies un moyen « d’entrer dans la ville, de la comprendre de l’intérieur », cette ville de Brooklyn qu’il habite. Le scénario met en avant la dimension documentaire du roman, dès la scène d’ouverture, avant de commencer à dévoiler la personnalité des personnages principaux. « Le corps des patients non professionnels (…) avec ses cicatrices et ses tatouages, raconte une histoire ». Sean Penn, qu’il avait rencontré pendant le tournage de son film The Last Face, a « joué le jeu » et accepté les conditions spartiates du tournage. Mike Tyson, l’interprète du chef de la brigade, a vécu à Brooklyn et connu la « violence sociale ». Il a choisi pour le rôle de Lafontaine Michael Pitt, « l’ange blond diabolique », qui répond bien à la personnalité de Tye Sheridan, un acteur « qui veut tout contrôler ». Le montage s’est fait à partir de six heures de rushes.
Deux scènes coupées (5’), Ollie dans un temple bouddhiste, puis à la morgue.
Bande-annonce (2’26”).
L’image numérique, au ratio d’origine de 2.39:1, encodée au standard 1080p, AVC, idéalement contrastée, de blancs lumineux à des noirs denses, déploie des couleurs naturelles, agréablement saturées. Tous les détails de chaque cadre sont révélés par une fine résolution que n’altère pas le léger grain ajouté en postproduction.
La qualité du son, au format DTS-HD Master Audio 5.1, tout aussi irréprochable, assure la clarté des dialogues et une bonne répartition sur les cinq canaux immerge le spectateur dans l’action.
Ce constat s’applique au doublage en français, au même format.
Crédits images : © Sculptor Media, AZA Films, Force Majeure, Projected Picture Works, Two & Two Pictures