Réalisé par Arkasha Stevenson
Avec
Rutger Hauer, Holland Roden et Olivia Luccardi
Édité par Elephant Films
Alice Woods et sa soeur schizophrène Zoe viennent d’emménager dans le Michigan. Alice apprend très vite qu’une série de disparitions mystérieuses a eu lieu dans le quartier malfamé de Butcher’s Block. Ces disparitions seraient liées à des escaliers surnaturels, surgissant dans le parc lugubre de la ville. Quand une petite fille et sa mère se font kidnapper et que la police ne veut rien faire, Alice et sa soeur partent à leur recherche, sans se douter de l’enfer qui les attend…
Channel Zero : Butcher’s Block est le troisième volume, après Channel Zero - Saison 1 : Candle Cove et Channel Zero - Saison 2 : No-End House, d’une anthologie diffusée par SyFy et créée par le scénariste Nick Antosca qui a, notamment, contribué à l’écriture de la saison 2 de Teen Wolf, de la minisérie Last Resort (2012, 13 épisodes), de la saison 3 de Hannibal…
C’est probablement le succès de la saga American Horror Story, créée en 2011 par Ryan Murphy et Brad Falchuk, partie pour une dixième saison, qui a relancé la formule de l’anthologie. Les deux auteurs ont repris la recette d’une seule histoire racontée sur toute une saison, dans le registre du documentaire-fiction, avec l’anthologie American Crime Story, dont seul le premier volet, American Crime Story - Saison 1 : L’affaire O.J. Simpson, nous est arrivé en vidéo. On attend toujours le deuxième, The Assassination of Gianni Versace, pourtant diffusé sur les écrans de FX début 2018. Deux autres saisons sont déjà prévues, dont une sur les suites de l’affaire Monica Lewinsky.
Channel Zero: Butcher’s Block est l’adaptation de Search and Rescue, une histoire imaginée en 2015 par Kerry Hammond, une creepypasta, ce genre d’histoires horribles, souvent prétendues vraies, sortes de légendes urbaines postées sur l’Internet, dont Elvire Rémand retrace l’historique dans le livret inclus dans le boîtier.
L’une des deux soeurs, s’appelle Alice. Il est vraisemblable que ce choix soit un clin d’oeil à Alice au pays des merveilles, ce que pousse à supposer le surréalisme de la minisérie, notamment illustré par cet immense escalier qui, avant de disparaître, s’élève vers les nuages jusqu’à une porte semblant ne devoir s’ouvrir sur rien ou, alors, sur un monde parallèle où tout serait différent, hanté par la famille Peach, les anciens propriétaires d’un boucherie industrielle, désaffectée depuis la mort de ses derniers représentants, il y a cinquante ans.
Déconseillé aux végétariens !
Channel Zero: Butcher’s Block, plutôt bien mis en scène par Arkasha Stevenson, jeune réalisatrice de quelques courts métrages, associe à l’étrangeté des lieux celle des personnages secondaires, des nains inquiétants, un homme écorché, un étrange jardinier, des scènes de grand guignol très graphiques, où la production n’a pas lésiné sur l’hémoglobine.
En tête de distribution de ce nouveau chapitre, au parfum de cannibalisme et de culte diabolique, figure l’infatigable Rutger Hauer, un des complices de Paul Verhoeven au début de sa carrière au Pays-Bas, revu dans Spetters (1980). Lui donne la réplique, dans le rôle de Zoe, Holland Roden, la Lydia de la série Teen Wolf créée par Jeff Davis en 2011 (6 saisons, 100 épisodes). Sa soeur Alice est interprétée par Olivia Luccardi, une des actrices récurrentes de The Deuce, créée par George Pelecanos, David Simon en 2017 (3 saisons, 25 épisodes). On retrouve également une étrange taxidermiste interprétée par Krisha Fairchild, titulaire du rôle-titre de Kirsha, le premier film de Trey Edward Shults, présenté à Cannes et à Deauville en 2015, mais pas sorti dans nos salles. Et, glaçant dans son incarnation de Robert Peach, Andreas Apergis, un familier des séries, notamment remarqué dans la saison 3 (pas arrivée jusqu’à nous) de Durham County.
La saga Channel Zero est une porte ouverte dans l’univers des séries fantastiques : elle laisse passer un souffle d’air nouveau. À très bientôt pour le test du dernier chapitre : Channel Zero : Dream Door, annoncé pour le 18 décembre.
Channel Zero: Butcher’s Block (6 x 43 minutes) et son maigre supplément tiennent sur deux Blu-ray BD-50 logés dans un boîtier non remis pour le test.
Le menu animé et musical propose la série dans sa version originale, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, chacun avec le choix entre deux formats audio : DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0 stéréo.
Le livret de 24 pages écrit par Elvire Rémand (East Asia) s’ouvre sur un texte commun aux trois premiers volets de l’anthologie, Creepypasta : les légendes urbaines 2.0. Les légendes urbaines, illustrées au cinéma dans les années 90 par des films comme Candyman (Bernard Rose, 1992) ou Souviens-toi… l’été dernier (I Know What You Did Last Summer, Jim Gillepsie, 1997), ont pris la forme de creepypastas, textes, images ou vidéos postés sur l’Internet qui doivent sembler véridiques pour mieux impressionner, comme les scénarios de L’Exorcisme d’Emily Rose (Scott Derrickson, 2005) ou encore de Conjuring : les dossiers Warren (James Wan 2013). Une des figures les plus célèbres des creepypastas, Slender Man, créée en 2009 par Victor Surge, peut faire penser aux créatures fantastiques des anciennes légendes.
Puis, dans la suite consacrée à la saison 3, intitulée Stairway to Hell, Elvire Rémand rappelle la composition de l’équipe et souligne les références cinématographiques de la série, dont elle fait ressortir la dimension sociale : « La famille Peach est l’allégorie du pouvoir qui se nourrit, au sens propre, des personnes démunies et oubliées de tous. » C’est « un drame collectif et individuel » dans lequel Alice, angoissée par le spectre planant sur elle de la maladie dont souffre sa soeur, affronte plusieurs « personnages ambivalents ». Cette intéressante analyse de la série (à ne lire qu’après le visionnement) se termine par un guide des épisodes.
Aucun supplément à la minisérie, seulement les bandes-annonces de cinq éditions Blu-ray et DVD d’Elephant Films : Channel Zero - Saison 1 : Candle Cove, Channel Zero - Saison 2 : No-End House, Killjoys saisons 1 & 2, Happy! saison 1 et Law & Order True Crime - L’Affaire Menendez.
L’image (1.78:1, 1080p, AVC), assez précise, propose des couleurs naturelles, des contrastes agréables dans toutes les scènes en pleine lumière. La lisibilité des nombreuses scènes de nuit est meilleure qu’elle n’était dans les deux saisons précédentes.
Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (ou 2.0 stéréo, au choix) de la version originale assure une bonne clarté des dialogues, correctement priorisés sur l’ambiance et l’accompagnement musical. Une utilisation discrète, mais efficace, des voies latérales, crée une cohérente sensation d’immersion dans l’action. Une forte dynamique et des basses fermes renforcent l’impact de la bande-son sur l’image.
Le doublage en français, monotone, manque de naturel.
Crédits images : 2018 Syfy Media, LLC