Shadow (2018) : le test complet du Blu-ray

Ce mix de wuxia et de drame shakespearien, le denier film de Zhang Yimou, d’une envoûtante beauté formelle, nous arrive directement en vidéo.

Les Trois Royaumes se disputent depuis des décennies la ville fortifiée de Jingzhou, occupée par le Royaume de Yang. Le Royaume de Pei veut la reconquérir : Ziyu, le commandant des armées, contre l’avis du roi, a provoqué en duel le commandant du Royaume de Yang : le vainqueur gagnera la ville. Mais l’homme est, en réalité un usurpateur, un sosie de Ziyu, une « ombre », nommé Jingzhou. Le vrai Ziyu, grièvement blessé, vit caché…

Shadow (Ying), le dernier film de Zhang Yimou, sorti en 2018, mais pas dans nos salles, malgré une belle moisson de prix en Asie, nous arrive directement en vidéo. Loin des films intimistes qui ont contribué à sa notoriété il y a une trentaine d’années, rendant hommage aux femmes, avec son ex-compagne Gong Li, Le Sorgho rouge (Hong gao liang, 1988), Ju Dou (1990, récemment réédité), Épouses et concubines (Dà hóng denglong gaogao guà, 1991), Qiu Ju, une femme chinoise (Qiu Ju da guan si, 1992), Zhang Yimou revient au genre wuxia pian dans lequel il s’était brillamment illustré avec Hero (Ying xiong, 2002) et Le Secret des poignards volants (Shi mian mai fu, 2004).

Shadow, en dépit d’un scénario un peu compliqué et de quelques longueurs, réussit à maintenir un juste équilibre entre l’action et l’intérêt suscité par les personnages auxquels le scénario réussit à donner une épaisseur suffisante.

Mais Shadow fascine par sa beauté formelle due à la photo de Xiaoding Zhao, complice de Zhang Yimou pour dix films, dont Le Secret des poignards volants qui lui valut une nomination aux Oscars, aux décors de Horace Ma, en particulier ceux du palais de Pei, aux costumes et aux fantastiques armures créés par Minzheng Chen.

Shadow laissera, par-dessus tout, le souvenir du traitement particulier de la couleur. Les personnages, vêtus dans un dégradé de gris, ressortent sur un fond monochrome, dans un camaïeu de gris, occasionnellement de sépia. La beauté de ce faux noir et blanc est si envoûtante qu’elle fait oublier les quelques faiblesses du film.

Shadow (116 minutes) et ses très maigres suppléments tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un digibook.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en mandarin, avec sous-titres optionnels (idéalement placés à cheval sur la bande noire), au format audio Dolby Atmos, compatible avec le Dolby TrueHD 7.1 et dans un doublage en français DTS-HD Master Audio 5.1.

Une édition 4K UHD est sortie aux USA en août 2019.

À l’intérieur du digibook, un livret de 20 pages (et non 16 comme annoncé au dos du digibook), non-détachable, joliment illustré, intitulé Jeux d’ombres propose le synopsis, une brève revue de la filmographie de Zhang Yimou, suivie d’un court entretien avec lui, dans lequel il révèle que l’idée du double, peu exploitée, lui a donné l’envie de réaliser le film. Le style visuel, obtenu avec la complicité du chef-opérateur Zhao Xiaoding et du directeur artistique Kwong Wing Ma, propose « une palette monochrome contrastée » inspirée par les lavis à l’encre, pour créer « une interaction entre la lumière et l’obscurité (…), entre le bien et le mal ». Il souligne aussi la contribution de Huen Chiu Ku à la chorégraphie des combats et de Digital Domain pour les effets numériques. Le livret évoque ensuite le palmarès des principaux acteurs, Deng Chao (Ziyu et Jingzhou), Sun Li (Xiao-ai, l’épouse de Ziyu), Zheng Ryan (le roi de Pei), Wang Qianyan (Tian Zhan).

La portion congrue avec un teaser (1’30”), une bande-annonce (1’) et, accessoirement, la bande-annonce de quatre films du genre nouveau wuxia pian, Bodyguards & Assassins (Shi yue wei cheng, Teddy Chan, 2009), Le Grand magicien (Daai mo seut si, Derek Yee, 2011), Le Règne des assassins (Jianyu, Su Chao-Pin, 2010) et Shaolin - La légende des moines guerriers (Xin shao lin si, Benny Chan, 2011).

L’image numérique (2.39:1, 1080p, AVC), finement résolue, fermement contrastée, avec des blancs lumineux et des noirs d’encre (de Chine), met parfaitement en valeur le travail effectué sur les couleurs, délibérément désaturées à l’extrême, des costumes, des décors et des paysages.

Le son Dolby Atmos de la version originale (testé sous le format compatible Dolby TrueHD 7.1), se distingue par l’ouverture de sa bande passante, sa dynamique et une répartition idéale du signal sur les sept canaux qui créée une impressionnante sensation d’immersion dans l’action, dans laquelle le caisson de basse n’oublie pas son rôle. La puissance ne nuit pas à la clarté des dialogues, ni à la finesse de l’accompagnement musical, notamment à la pureté cristalline des cordes pincées du guzheng, un instrument traditionnel, cousin de la cithare, faussement désigné « luth » par les sous-titres.

Le doublage en français, au format DTS-HD Master Audio 5.1, s’en sort assez bien techniquement, mais souffre du débit monotone des dialogues qui gomme la tonalité de drame shakespearien de la version en mandarin.

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