Blue Collar (1978) : le test complet du Blu-ray

Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par Paul Schrader
Avec Richard Pryor, Harvey Keitel et Yaphet Kotto

Édité par Elephant Films

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Le 18/09/2020
Critique

Le premier film du scénariste de Taxi Driver, longtemps indisponible, nous revient parfaitement restauré, avec d’intéressants compléments.

Blue Collar

Trois amis, ouvriers de l’industrie automobile à Detroit, travaillent dans la même usine. Deux Afro-Américains, Zeke, père de trois enfants et Smokey, célibataire, et Jerry, d’origine polonaise. Peinant à joindre les deux bouts, ils cambriolent le local du syndicat. Le butin se limite à 600 dollars, mais le coffre abritait un cahier avec une longue liste de prêts illégaux consentis à des ouvriers à des taux usuraires. L’idée leur vient de soumettre la restitution du cahier au versement d’une somme de 10 000 dollars…

Blue Collar, salué par le Grand prix au Festival de Paris en 1978, est le premier des deux douzaines de films réalisés par Paul Schrader qui s’était fait connaître comme critique de cinéma, comme auteur de Transcendental Style in Film: Ozu, Bresson, Dreyer, publié en 1972, et, surtout, comme signataire du scénario de Yakuza (The Yakuza, Sidney Pollack, 1974), de Taxi Driver (Martin Scorsese, 1976) et d’Obsession (Brian De Palma, 1976).

Blue Collar

You’re my friend Jerry, but you’re thinking white!

Centré sur la fragile amitié interraciale de trois laissés pour compte du rêve américain, deux noirs marginaux - Smokey a fait un séjour en prison, Zeke s’est inventé trois enfants supplémentaires pour réduire ses impôts - et Jerry, un immigrant polonais, Blue Collar est aussi une chronique sociale, avec une observation documentaire du travail à la chaîne sous les ordres d’un contre-maître garde-chiourme, et, aussi, une dénonciation des pratiques douteuses d’un syndicat. L’autre thème du film, le cambriolage, bouclé en quelques minutes, ne sera qu’un prétexte pour déclencher l’engrenage conduisant à la rupture de l’amitié entre Zeke et Jerry, le premier reprochant au second, bien qu’ils soient dans la même mouise, « de penser blanc ».

Blue Collar, la première oeuvre d’un des membres de la « movie brat generation » (les garnements du cinéma, avec Steven Spielberg, Martin Scorsese, Francis Ford Coppola, George Lucas, Brian De Palma et d’autres), moins connue qu’American Gigolo (1980) ou La Féline (Cat People, 1982), moins achevée que Mishima, une vie en quatre chapitres (Mishima: A Life in Four Chapters, 1985), nommé pour la Palme d’or ou que First Reformed (Sur le chemin de la rédemption) (First Reformed, 2017), sélectionné pour l’Oscar du meilleur scénario en 2019.

Blue Collar, devenu introuvable, méritait cette réédition en haute définition par Elephant Films, enrichie de deux bonus inédits. Elle dépasse celle sortie aux USA fin 2019, avec, pour seul bonus, le commentaire audio du réalisateur, sans toutefois égaler l’édition anglaise qui ajoute trois heures de bonus vidéo. On aurait cependant bien aimé qu’Elephant Films y adjoigne le commentaire de Paul Schrader.

Blue Collar

Présentation - 3,5 / 5

Blue Collar (114 minutes) et ses suppléments (75 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé, dans cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9 (avec le même contenu), dans un boîtier au format Blu-ray, glissé dans un fourreau, avec une jaquette réversible reproduisant l’affiche originale du film.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master audio 1.0.

Une édition DVD single est sortie simultanément.

À l’intérieur du boîtier, un livret illustré de 12 pages écrit par Stephen Sarrazin, intitulé Darkness on the Edge of Town (titre d’un album de Bruce Springsteen). Après un bref rappel des débuts de Paul Schrader comme critique et scénariste et des premiers rôles des trois acteurs principaux, le livret résume l’intrigue du film qu’il rapproche de Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter) de Michael Cimino, sorti la même année.

Blue Collar

Bonus - 4,0 / 5

Le film par Jean-Baptiste Thoret (49’, Elephant Films, 2020). Paul Schrader a reçu une stricte éducation calviniste, qu’il évoquera dans le film qui suivra, Hardcore, en 1979. S’étant fait connaître en tant que scénariste, marqué par le cinéma européen, par « la tension croissante et le final apocalyptique de La Horde sauvage (The Wild Bunch, Sam Peckinpah, 1969) », le scénario de Blue Collar part d’une idée originale du journaliste Sidney Glass. Il a dû être tourné dans une petite fabrique de taxis en raison de son contenu sulfureux rappelant celui de Sur les quais (On the Waterfront, Elia Kazan, 1954), de Rocky (John G. Avildsen, 1976) de F.I.S.T. (Norman Jewison, 1978), et le documentaire Harlan County U.S.A. (Barbara Kopple, 1976), Oscar du meilleur documentaire en 1977. D’une chronique sociale, le film évolue vers « une sorte de métaphore de la machine oppressive américaine », chaque initiative des trois personnages dégradant leur sort au lieu de l’améliorer. Loin d’être un film à thèse, il « éclaire la réalité » comme le fait Norma Rae (Martin Ritt, 1979), avec une fin plus optimiste. Jean-Baptiste Thoret évoque ensuite les trois acteurs et personnages principaux, l’évolution de Zeke et Jerry vers l’individualisme, le « chacun pour soi ». Il souligne le « style invisible » de la réalisation, cher à Sidney Lumet qu’il avait analysé dans son complément à Point limite (Fail-Safe, 1964), sorti récemment.

Les Hommes du syndicat, par Julien Comelli (24’, Argentic Films & Elephant Films, 2020). Bien qu’encensé par Spike Lee at par Bruce Springsteen, sorti dans sa seule version originale, Blue Collar est peu connu en France (le premier doublage sera effectué pour l’édition DVD de 2013). Situé à Detroit, au début du déclin de l’industrie automobile il a, aux USA, été éclipsé par Norma Rae qui valut à Sally Field l’Oscar de la meilleure actrice. Il évoque un « trio d’acteurs hétéroclite » au sein duquel Richard Pryor « tient le rôle de sa vie », puis la filmographie de Paul Schrader dans laquelle il distingue Auto Focus (2002). Il met en parallèle Blue Collar avec Roger et moi (Roger & Me), le documentaire de Roger Moore, la brillante série Sur écoute (The Wire) créée par David Simon, et Detroit de Kathryn Bigelow, sorti en 2017.

Bande-annonce.

Blue Collar

Image - 4,5 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC), débarrassée de toute marque de dégradation de la pellicule, affiche des couleurs naturelles. Stable, bien contrastée, elle serait parfaite sans un occasionnel manque de densité dans les plans les plus sombres.

Son - 5,0 / 5

Le son DTS-HD Master audio 1.0 mono de la version originale, très propre lui aussi, avec une bande ouverte, notamment vers les aigus et une surprenante dynamique, plonge avec efficacité le spectateur dans le vacarme de l’usine, tout en assurant une correcte priorisation des dialogues. (Le menu du disque et la jaquette mentionnent, à tort, un format stéréo. La piste mono est celle de la sortie du film en salles).

Le doublage en français, peu convaincant artistiquement, n’est pas techniquement à la hauteur : il estompe pratiquement l’ambiance. Il n’a pas été pris en compte pour l’attribution de la note.

Crédits images : © Éléphant Films

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 18 septembre 2020
Salué par le Grand prix au Festival de Paris en 1978, ce premier film de Paul Schrader, le scénariste de Taxi Driver, nous revient enfin en haute définition, dans une édition enrichie d’intéressants bonus inédits.

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Blue Collar
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