Passeur d'hommes (1979) : le test complet du Blu-ray

The Passage

Réalisé par J. Lee Thompson
Avec Anthony Quinn, James Mason et Malcolm McDowell

Édité par Sidonis Calysta

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Le 08/12/2020
Critique

La seconde contribution de Lee Thompson au film de guerre : casting de haut vol et violence graphique très impressionnante.

Passeur d'hommes

Toulouse puis Montagnes des Pyrénées, pendant l’occupation nazie durant la Seconde guerre mondiale. La résistance française organise l’évasion du savant Bergson et de sa famille afin que l’ennemi ne puisse bénéficier de ses connaissances scientifiques. Un passeur basque, rude et expérimenté, est engagé pour leur faire traverser, en quatre jours et à pieds en passant par la montagne en plein hiver, la frontière vers l’Espagne. Le jeune capitaine SS von Berkow, aux méthodes de tortionnaire et qui agit sur ordre direct de la plus haute hiérarchie SS allemande, a l’autorisation de mettre en oeuvre n’importe quel moyen pour les en empêcher. Une poursuite impitoyable, d’une brutalité inouïe, est alors déclenchée.

Passeur d’hommes (The Passage, GB 1978) de Jack Lee Thompson (1914-2002) est l’autre grand film de guerre du cinéaste des Les Canons de Navarone (GB 1961) avec lequel il entretient un certain lien narratif puisque, dans les deux cas, il s’agit d’une opération commando : simplement celui de 1978 est réduit au minimum puisque seuls deux combattants le composent (joués par Anthony Quinn et Marcel Bozzuffi) mais le niveau de suspense est parfois équivalent, voire même parfois encore supérieur en raison d’une violence graphique dont les déchaînements sont l’occasion de brusques accès de terreur et de folie. Bien sûr Lee Thompson avait inclu de brillantes et parfois très brutales séquences de guerre dans divers films relevant d’autres genres (films d’aventures, films d’espionnage et films fantastiques notamment) durant les années 1960 et 1970 mais on peut dire que c’est ici la seconde et dernière fois qu’il traite ce genre à part entière.

Passeur d'hommes

Le casting est dosé d’une manière intelligente et intéressante : Lee Thompson mélange acteurs âgés mais valeurs sûres au box-office (Patricia Kneale, James Mason, Christopher Lee, Anthony Quinn) à une génération intermédiaire (Michael Londsale, Marcel Bozzuffi) et à une troisième plus jeune (Kay Lenz, Malcolm McDowell). McDowell déclara par la suite (en 1995) qu’il avait voulu insérer dans sa manière de jouer son rôle de SS certains aspects de l’art de la pantomime, afin de rendre encore plus inquiétant ce personnage qui incarnait, selon lui, l’essence de la tyrannie sous la forme d’une perversion qu’il souhaitait mettre en relief: le sadisme. Certains acteurs (notamment Bozzuffi et Lee) sont utilisés à contre-emploi, ce qui contribue à déstabiliser le spectateur et à augmenter mécaniquement son angoisse : ils sont d’ailleurs, tous deux, ici assez étonnants.

Passeur d'hommes

Le producteur associé Maurice Binder avait été le créateur des génériques d’ouverture des premiers James Bond de la série cinéma anglaise durant la période 1960-1970 mais il n’a pas conçu celui-ci, classique mais plastiquement assez ample. Le directeur de la photographie Michael Reed avait travaillé sur plusieurs importants Hammer Films de l’âge d’or du cinéma fantastique anglais (certains signés à la mise en scène par Terence Fisher) : Reed sait parfaitement composer un plan en clair-obscur et le rendre inquiétant. Il est autant à l’aise en intérieurs dans les studios de la Victorine de Nice qu’en extérieurs naturels dans les montagnes. Le traitement de la couleur est typique des années 1975-1980 avec ses dominantes bleues et ocres automnales. La neige qui est la chose la plus difficile à filmer, l’est ici remarquablement. Le romancier (qui participa au scénario) a probablement lu le philosophe français Henri Bergson (1859-1941) car il réutilise son nom pour baptiser le savant joué par James Mason mais la ressemblance s’arrête à cette homonymie.

Reste à mentionner une fin sanglante, surréaliste et démesurée, jouant sur une sorte d’étrange distortion entre phantasme et réalité. En réalité, trois fins distinctes auraient été écrites : Lee Thompson allia certains éléments des trois au montage de la fin définitive (il existe aussi une fin alternative visible en supplément sur le Blu-ray américain édité en 2016), lui conférant ainsi ce cachet assez cauchemardesque. Ce thème du cauchemar supplantant (presque) la réalité est récurrent chez Lee Thompson qui l’illustra assez régulièrement durant sa carrière : qu’on songe, par exemple, au final de Les Nerfs à vif (Cape Fear, USA 1961) ou à l’ouverture de Le Justicier braque les dealers (Death Wish 4 : the Crackdown, USA 1987).

Passeur d'hommes

Présentation - 3,0 / 5

1 Blu-ray région B édité par Sidonis Calysta, le 03 novembre 2020. Image couleurs au format 2.35 compatible 16/9 région B encodé en 1080p Full HD. Son VF, VO et VOSTF à la norme DTS HD Master audio 2.0. Durée du film : 101 min. environ sur Blu-ray. Suppléments : documentaire sur l’acteur Anthony Quinn, présentation du film par Patrick Brion, film-annonce.

Bonus - 2,5 / 5

Documentaire : Anthony Quinn, un original (USA 1990, VF, durée : 55 min. environ) : documentaire standard assez riche puisque l’acteur Anthony Quinn lui-même apporte de nombreux détails autobiographiques : récit attachant de son enfance mexicaine, de son arrivée enfant aux USA, savoureuse anecdote de son premier jour de tournage avec le cinéaste Cecil B. DeMille, et bien d’autres choses. Nombreux témoins de première main ici convoqués : deux des enfants de Quinn, les actrices Giuletta Massina, Gina Lollobrigida, Julie Harris, les acteurs Anthony Franciosa, Giancarlo Gianini, les cinéastes Jack Lee Thompson, Stanley Kramer, Martin Ritt. On apprend évidemment beaucoup de choses (notamment tout ce qui concerne la première partie de sa carrière, assez mal connue en France) mais un défaut technique rédhibitoire : la plupart des extraits de films tournés après 1953 en écran large (1.66, 1.85 et 2.35) sont ignoblement recadrés au format 1.37, ce qui délave automatiquement leurs couleurs (lorsqu’ils sont en couleurs) et ce qui diminue automatiquement leur définition (qu’ils soient couleurs d’origine ou N&B d’origine : le résultat est le même techniquement : la définition diminue). Je ne supporte plus de voir des extraits de films tournés en Scope 2.35 d’origine et signés par des cinéastes esthètes tels que Vincente Minnelli ou Jean Delannoy ainsi massacrés par le recadrage 1.37. Seules les photographies (de tournage ou de plateau) au format 1.37 d’origine bénéficient d’une bonne définition générale mais… même pas toujours non plus !

Présentation du film par Patrick Brion (durée 5 min. environ) : Brion brosse brièvement la carrière du cinéaste Jack Lee Thompson, relate une ou deux anecdotes de tournage. Bien illustré en incrustation de nombreuses affiches et de quelques photos de plateau mais l’ensemble est très léger sur le film lui-même.

Film-annonce original (VO sans STF, 2.35 compatible 16/9, durée 3 min. 15 sec. environ) : un peu trop long mais néanmoins efficacement monté; état argentique correct et définition vidéo assez bonne.

Édition spéciale certes honnête mais on en apprend bien davantage sur le film lui-même (à condition d’être anglophone car rien n’est sous-titré) dans l’édition américaine Kino Lorber sortie en 2016 qui contient notamment un entretien avec McDowell, une fin alternative et quelques autres suppléments.

Passeur d'hommes

Image - 4,0 / 5

Restauration Full HD 1080p au format original 2.35 respecté, en couleurs, compatible 16/9. Copie argentique en bon état général, au grain assez bien préservé. Le transfert vidéo haute définition en fait, sans difficulté, l’édition française de référence : les palettes colorimétriques (à dominantes bleues et ocres, comme souvent durant la période 1975-1980), les dégradés des scènes nocturnes, la photo de Michael Reed : tout cela est restitué correctement. Photo originale qui privilégie parfois une opposition de sujets sombres au sein d’un même plan, diminuant du coup la luminosité au maximum (cachette au-dessus du bordel, couloir du train de nuit, etc.) : la sensibilité de la pellicule et les choix d’éclairage de 1978 sont ici aussi restitués, sans tentative d’arrangement numérique en laboratoire : au fond, tant mieux. Autre intérêt : il s’agit d’une copie intégrale non censurée, donc une copie « unrated » comme disent les Américains. S’agissant d’un tel film, la précision n’est pas inutile.

Passeur d'hommes

Son - 4,0 / 5

VO, VOSTF et VF d’époque en DTS-HD Master audio 2.0 sur le Blu-ray : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. Comme d’habitude, la VO est mieux équilibrée que la VF d’époque mais cette dernière est remarquable sur le plan dramaturgique et ses voix sont bien adaptées aux personnages. La musique symphonique ample du générique d’ouverture souffre de quelques distortions sur la piste sonore VF. Une séquence, dont le doublage est perdu, est intégrée en VOSTF dans la continuité VF. On peut privilégier néanmoins sans regret cette VF d’époque car la voix française de McDowell lui convient mieux que sa véritable voix anglaise (le cas est récurrent : la voix française de John Wayne lui convenait nettement mieux que sa voix originale) et on entend les véritables voix de Bozzuffi et de Lonsdale, toujours agréables à auditionner.

Crédits images : © Hemdale, Passage Films, Monday Films, General Film, United Artists

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
Note du disque
Avis

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francis moury
Le 8 décembre 2020
La seconde grande contribution de Lee Thompson au film de guerre : casting de haut vol, suspense millimétré et très impressionnante violence graphique.

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