Réalisé par Julien Duvivier
Avec
Françoise Arnoul, Charles Aznavour et Maurice Biraud
Édité par Coin de Mire Cinéma
France 1962 : le diable décide de prouver qu’il est toujours capable de tenter les hommes et de les faire renoncer facilement aux dix commandements de l’Ancien et du Nouveau Testament. Il s’attaque successivement au vieux gardien blasphémateur d’un couvent, à un jeune homme amoureux d’une strip-teaseuse, à une mondaine fascinée par les bijoux, à un prêtre dont la soeur est devenue victime d’un proxénète trafiquant de drogue, à une famille paysanne adoratrice d’une idole, à un étudiant découvrant que ses parents lui mentent, à un caissier complice d’un vol et, enfin, à un évêque coupable, en plein dimanche, d’avoir oublié ces 10 commandements.
Le Diable et les 10 commandements (Fr.-Ital. 1962) de Julien Duvivier (1896-1967), sorti au cinéma à Paris le 14 septembre 1962, est un étonnant et, par son ampleur, un assez curieux film à sketches. Il est ici présenté en version intégrale (ce qui porte sa durée à 145 minutes environ) car muni d’un sketch supplémentaire restauré qui était inédit (Oeuvre de chair ne désireras qu’en mariage seulement) mais est ici réintégré dans la continuité : c’est celui avec la primesautière Dany Saval dans le rôle d’une accorte strip-teaseuse. Destiné à concurrencer commercialement les films à sketches italiens - en général des comédies lorgnant autant vers l’érotisme que vers un humour noir ravageur, parfois saupoudré de critique sociale - qui remportaient alors beaucoup de succès, Le Diable et les 10 commandements y réussit sans peine, porté par un casting de stars, des dialogues savoureux (très bien écrits par Henri Jeanson, René Barjavel et Michel Audiard) et des histoires relevant de genres assez variés (une d’elles est même inspirée par les auteurs américains Richard Levinson et William Link qui contribuaient notamment à la série Alfred Hitchcock présente), sans oublier un beau format FranScope bien employé en N&B. Les 10 commandements eux-mêmes sont illustrés par 7 histoires + 1 histoire restaurée dans cette version intégrale = 8 sketches au total. Pourquoi pas 10 histoires ? C’est que certaines d’entre elles illustrent simultanément deux ou trois commandements alors que d’autres n’en illustrent qu’un seul ; le compte y est donc bien.
Le Diable et les 10 commandements s’insère, sur le plan filmographique, dans la lignée de Un Carnet de bal (Fr. 1937) et Obsessions (Flesh and Fantasy, USA 1943), les deux remarquables films à sketches antérieurs de Duvivier (*), dans la mesure où s’y manifeste une même ambition sous couvert de divertissement luxueux donné pour tel. Le meilleur sketch est probablement le seul franchement dramatique car relevant directement du film noir policier (je veux parler de celui avec Charles Aznavour, Lino Ventura, Maurice Biraud) mais il ne faut pas négliger les autres pour autant. Certains sont des comédies dramatiques ou des comédies avec un soupçon d’érotisme (rivalité séductrice sur fond de Place Vendôme, marivaudage au parfum légèrement incestueux entre une actrice et son fils dont elle ignore au début l’identité alors que le spectateur la connaît). Il y a aussi une assez curieuse et (presque) fantastique parabole se déroulant dans le Puy-de-Dôme, à la chute inattendue. Un pessimisme lucide, une misanthropie parfois virulente (des constantes du cinéma de Duvivier) et un surréalisme ravageur s’y manifestent aussi occasionnellement. Sans oublier les apparitions du serpent (discourant en voix-off !) rompant brusquement le réalisme méticuleusement construit de chaque histoire. Et sans doute faut-il aussi, pour bien apprécier ce titre, tenir compte non seulement de tous ces éléments mais encore se souvenir que, dans la filmographie de Duvivier, on trouve une belle vie de Jésus, à savoir [PROGRAM(golgotha)] (Fr. 1935) et, last but not least, que le projet qui lui tint le plus à coeur fut celui d’une trilogie sur Lourdes, Jérusalem et Jésus dont il ne put jamais mener à bien l’exécution complète.
Un point intéressant d’histoire du cinéma : contrairement à ce qu’écrivent le site internet d’Unifrance (dans sa fiche qui ignore l’existence du sketch restauré) et la note liminaire à la filmographie de Duvivier (incluse dans le boîtier de cette édition), ce n’est évidemment pas lui qui a « créé le genre du film à sketches » (sic). Qu’on se souvienne des classiques de l’histoire du cinéma mondial que sont Le Cabinet des figures de cire (All. 1924) de Paul Leni et Intolérance (USA 1916) de D.W. Griffith, tournés respectivement 13 ans et 19 ans avant Un Carnet de bal ! Peut-être ne s’agissait-il, dans l’idée des rédacteurs, que de l’histoire française du cinéma, pas de celle du cinéma mondial ? Encore eût-il fallu le préciser mais, de toutes façons et même dans ce cas, je ne suis nullement certain que l’assertion serait vérifiée.
1 digibook combo contenant 1 Blu-ray BD50 + 1 DVD9 + 1 livret, 1 affiche et 10 photos, édité par Coin de Mire et TF1 le 04 septembre 2020. Image 2.35 N&B en Full HD 1080p au format original FranScope respecté compatible 16/9 et 21/9 sur Blu-ray, compatible 16/9 sur DVD. Son DTS-HD Master Audio 2.0 mono (sur Blu-ray) et Dolby mono (sur DVD) en VF d’époque + VFSTF sourds et malentendants. Durée du film sur Blu-ray: 119 min, sur DVD : 114 min. environ. Suppléments : 1 affiche + 10 photos française N&B d’exploitation réparties dans deux étuis du digibook, affiche imprimée et glissée dans un étui à part du digibook, livret reproduisant intégralement le dossier presse 1962 (textes et illustrations), reproductions d’affiches diverses, couvertures de magazines, filmographie de Julien Duvivier, actualités Pathé, publicités Jean Mineur, bandes-annonces de titres édités dans la même collection, y compris celle du film.
Livret et documents imprimés joints : le dossier presse 1962 intégralement reproduit en miniature, ses illustrations complètes, filmographie de Julien Duvivier, une dizaine de photos françaises d’exploitation N&B de 1958 contenant les plus célèbres du film (14,5 x 11,5 cm) réparties en deux fois 6 photos rangées dans deux étuis, l’affiche d’époque (23 x 29 cm), extrait d’un roman-photo tiré du film, une photo en couleurs de Françoise Arnoul, une filmographie de la collection Coin de mire comprenant déjà une trentaine de titres, mentionnant la trentaine d’autres titres prévus.
Séance cinéma de 1962 (optionnelle : on peut aussi visionner le film directement si on le souhaite) : actualités Pathé (la visite du général de Gaulle en République Fédérale d’Allemagne, le salon aéronautique d’Angleterre, la situation en Algérie, etc.), publicité Jean Mineur (caramels Dupont d’Isigny vendus avec la photo d’un acteur ou d’une actrice célèbre, le meilleur moyen de se rafraîchir sur une plage bondée, etc.).
Bandes-annonces de la collection, y compris celle du film de référence de 1962. Les bandes-annonces (VF) sont en état argentique variable, en général assez bon ou bon, toutes compatibles 16/9 sur Blu-ray.
Bonus vidéo soignés, certes peu originaux par eux-mêmes car le principe de la « séance » contemporaine du film est une vieille bonne idée (Warner, par exemple, l’utilisait déjà il y a quinze ans sur certains DVD, sans même remonter à La Dernière séance d’Eddy Mitchell à la télévision française du siècle dernier).
Format original FranScope 2.35 N.&B. respecté et compatible 16/9 et 21/9 (sur Blu-ray en Full HD 1920x1080p 24 images / secondes) ou 16/9 seulement (sur DVD en 720x576p 25 images / secondes). Image argentique très bien restaurée à partir d’un négatif restauré 4K et d’un négatif son ayant permis de reconstituer un sketch inédit à partir des meilleurs éléments disponibles. Sur les 145 minutes que dure le titre en Blu-ray (sa durée cinéma réelle étant donnée la vitesse de défilement de l’image), aucun défaut relevé : belle performance sur une aussi longue durée. Direction photo signée Roger Fellous aussi à l’aise dans les intérieurs des studios parisiens que dans les extérieurs naturels des montagnes de l’Auvergne. Parfait équilibre entre préservation du grain et lissage numérique. Dorénavant l’édition de référence en Full HD.
VF d’époque en DTS-HD Master Audio 2.0. mono (sur BRD) et Dolby mono (sur DVD) + VFSTF sous-titrage français pour sourd et malentendants. Offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. Son net, piste techniquement bien nettoyée, sans effet de souffle particulier. C’est l’acteur Claude Rich, non crédité au générique, qui prête sa voix-off au diable.
Crédits images : © Coin de Mire Cinéma - TF1 Droits Audiovisuels