Réalisé par Fatih Akin
Avec
Jonas Dassler, Margarete Tiesel et Hark Bohm
Édité par Extralucid Films
Dans un appartement crasseux, au dernier étage d’un petit immeuble, un homme glisse le cadavre d’une femme dans un sac poubelle. Le bruit du corps sur les marches de l’escalier réveille les voisins : l’homme se ravise, remonte le cadavre chez lui pour le découper. Il s’appelle Fritz Honka, un habitué d’un bar miteux de Hambourg, Zum goldenen Handschuh (Au Gant d’or), où il rencontre des femmes seules…
Golden Glove (Der goldene Handschuh) est l’adaptation, écrite et réalisée par Fatih Akin, du roman éponyme publié en 2016 par l’écrivain allemand Heinz Strunk, assez fidèlement inspiré des faits et gestes d’un personnage bien réel, Fritz Honka, surnommé « le tueur de Sankt-Pauli », auteur de plusieurs assassinats, au moins quatre, commis à Hambourg, de 1971 à 1974.
Golden Glove, sélectionné pour l’Ours d’or à la Berlinale de 2019, sorti dans nos salles en juin 2019, est le dixième long métrage du réalisateur, scénariste et acteur Fatih Akin. Né en Allemagne d’ascendants turcs, son premier long métrage, L’Engrenage (Kurz und schmerzlos, 1998), traitait du crime organisé dans le milieu d’immigrés turcs. Comptent particulièrement dans sa filmographie, Head-On (Gegen die Wand, 2004), salué par l’Ours d’or et le Prix FIPRESCI à Berlin, De l’autre côté (Auf der anderen Seite, 2007), Prix du meilleur scénario à Cannes, et Soul Kitchen, Prix spécial du jury à la Mostra de Venise en 2009.
Golden Glove, s’il exploite un thème commun à L’Étrangleur de Rillington Place (10 Rillington Place, Richard Fleischer, 1971), Schizophrenia (Angst, Gerald Kargl, 1983), Henry - Portrait d’un serial killer (John McNaughton, 1986), dessine aussi le tableau de la misère dans l’environnement du tueur, pas seulement celle résultant de la pauvreté, mais surtout du vide intellectuel et culturel des habitués du bistrot Zum goldenen Handschuh, l’asile de désoeuvrés abrutis par le schnaps au point de s’assoupir en fin de soirée sur le comptoir ou sur les tables, de désaxés, comme Norbert, un nostalgique ancien officier SS.
Golden Glove illustre crûment cette misère avec le décor du petit appartement mansardé, d’une saleté repoussante, dans lequel Fritz attire ses victimes, des prostituées âgées, dont les restes pourrissent dans une niche, derrière une planche de contreplaqué. Le même réalisme sordide imprègne les scènes de mise à mort et de découpage des corps. Les détails ont beau rester hors champ, leur horreur, soulignée par la bande son, ne fait guère de doute.
Le film doit beaucoup à l’interprétation de Jonas Dassler qu’avait révélé le passionnant film de Lars Kraume, La Révolution silencieuse (Das schweigende Klassenzimmer, 2018). Après un inquiétant maquillage, devenu plus effrayant que son modèle, il communique pleinement l’étrangeté et l’ambiguïté d’un personnage frustre, complexé et apeuré, derrière lequel se cache un dangereux prédateur.
Golden Glove dérangeant, mais inoubliable est sorti par Extralucid Films, une nouvelle société d’édition vidéo. Ouvert en février 2020, son catalogue propose aujourd’hui une douzaine de films venus du monde entier, tous inédits, à une exception près.
Golden Glove (110 minutes) tient sur un Blu-ray BD-50 logé, pour cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9, dans un boîtier de 14 mm, glissé dans un fourreau.
Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en allemand, avec sous-titres optionnels, au format audio DTS-HD Master Audio 5.1.
Entretien avec François Cau (6’), critique au magazine Mad Movies. Le multiculturalisme, le mélange entre la culture allemande et turque, annoncé par son premier film, L’Engrenage, marque l’oeuvre de Fatih Akin. Tout comme sa réaction face à l’immobilisme de la société devant le racisme, « l’injustice systémique » et la violence. Golden Glove est « la version négative et cauchemardesque de cette approche », une excroissance monstrueuse de la noirceur de son film In the Fade, sorti en 2017.
Le tournage (3’), un document assez superficiel, avec quelques extraits du film.
Fiction et réalité (3’). Un bref rappel du vrai Fritz Honka.
Réaction de la salle (1’) : « choquant, laisse des traces, jamais vu ça au cinéma… »
Time laps (1’) : en accéléré, le maquillage de Jonas Dassler qui durait trois heures.
Clip Honka Honka (3’) par le groupe OST+Front.
Bande-annonce (1’27”).
L’image (1.85:1, 1080p, AVC), parfois un peu trop douce, propose des couleurs naturelles, agréablement saturées, soigneusement étalonnées, faisant ressortir avec réalisme l’état sordide et la crasse de l’appartement de Fritz Honka, la banale laideur du bistrot.
Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (la jaquette mentionne à tort le format Dolby Atmos de la sortie en salles) assez dynamique, restitue clairement les dialogues et, avec une réelle présence, l’ambiance, un élément important du film. Une répartition équilibrée du signal sur les cinq canaux immerge le spectateur dans l’action, y compris dans les scènes d’intérieur, en lui permettant de suivre les déplacements hors champ des personnages.
Crédits images : © Bombero International, Warner Bros. Film Productions Germany, Pathé