Au nom du père (1993) : le test complet du Blu-ray

In the Name of the Father

Édition Collector Blu-ray + DVD

Réalisé par Jim Sheridan
Avec Daniel Day-Lewis, Emma Thompson et Pete Postlethwaite

Édité par L'Atelier d'Images

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Le 02/09/2021
Critique

Une poignante reconstitution de la violation délibérée des droits de la défense pour livrer à l’opinion publique des coupables sur mesure.

Au nom du père

Belfast, 1974. Gerry Conlon, 20 ans, un petit cambrioleur, pour échapper à une possible arrestation, se réfugie dans une petite communauté de hippies à Londres. Dénoncé comme membre de l’IRA par un des résidents, arrêté avec trois amis par la police, soumis à de fortes pressions et à des brutalités pendant plusieurs jours, Gerry finit par reconnaître avoir été l’auteur des attentats à la bombe de deux pubs de Guilford, dans la grande banlieue de Londres, qui firent 5 morts et 65 blessés graves. Gerry et ses trois amis sont condamnés à la prison à vie, son père et six membres de sa famille, tenus pour complices, à de lourdes peines de prison. Aidé d’une avocate, Gerry est déterminé à prouver son innocence, à réhabiliter l’honneur de son père, mort en prison, et à mettre au grand jour l’erreur judiciaire dont ses proches et lui-même furent les innocentes victimes.

Au nom du père (In the Name of the Father), l’adaptation de l’ouvrage autobiographique, Proved Innocent: The Story of Gerry Conlon of the Guildford Four, publié en 1990 par Gerry Conlon, est le troisième long métrage de Jim Sheridan, après My Left Foot, un biopic sorti en 1989 qui révéla le talent de Daniel Day-Lewis, et The Field, jamais édité en France, sur l’acharnement à conserver sa terre d’un patriarche incarné par Richard Harris, dans une de ses meilleures performances.

Au nom du père

L’Irlande avait accédé à son indépendance en 1922 après une farouche rébellion brillamment illustrée au cinéma par Huit heures de sursis (Odd Man Out, Carol Reed, 1947) et Le Vent se lève (The Wind That Shakes the Barley, Ken Loach, 2006). La ségrégation dont a souffert la minorité catholique dans l’Ulster, la partie nord de Irlande restée rattaché au Royaume Uni, suscitera, à partir de la fin des années 60, un violent conflit ponctué d’attentats terroristes en Angleterre, pudiquement appelé « The Troubles ». Il fut évoqué par plusieurs films, dont Hidden Agenda (Ken Loach, 1990) The Crying Game (Neil Jordan, 1992, récemment ressorti par ESC Éditions), et Hunger, l’inoubliable premier long métrage de Steve McQueen, sorti en 2008.

Une loi d’exception, Prevention of Terrorism Acts, promulguée en 1939, réactivée en 1974, allongeait à sept jours la garde à vue des personnes suspectées d’actes terroristes. Une scène presqu’insoutenable d’Au nom du père donne une claire idée du sort des suspects, privés de toute assistance, livrés à l’entière merci des policiers.

Au nom du père est une convaincante dénonciation d’une erreur judiciaire délibérée, avec une pièce « à ne pas communiquer à la défense », un vice de procédure qui peut rappeler celui de l’affaire Dreyfus, évoquée en 2019 par Roman Polanski dans J’accuse. Grâce à un scénario habilement construit et des dialogues qui sonnent juste, le film soutient l’attention du spectateur sans aucun relâchement de la tension dramatique pendant plus de deux heures.

À cet atout essentiel s’ajoutent la photographie de Peter Biziou, Oscar de la meilleure photo pour Mississippi Burning (Alan Parker, 1988), le talent du scénariste Terry George qui écrira et réalisera en 2004 le remarquable Hotel Rwanda, mais aussi et surtout, l’extraordinaire performance de Daniel Day-Lewis qui sortait du tournage de deux grands films, Le Dernier des Mohicans (The Last of the Mohicans, Michael Mann, 1992) et Le Temps de l’innocence (The Age of Innocence, Martin Scorsese, 1993). Le courant passe entre lui et Pete Postlethwaite, justement salué par l’Oscar du meilleur second rôle.

Au nom du père n’était plus disponible depuis l’épuisement de l’édition Universal de 2013. On appréciera d’autant plus sa ressortie par L’Atelier d’Images que le film est, cette fois, accompagné d’utiles compléments.

Au nom du père

Présentation - 4,5 / 5

Au nom du père (133 minutes) et ses suppléments (53 minutes) tiennent, pour cette édition combo, sur un BD-50 et un DVD-9 logés dans un boîtier, non fourni pour le test, effectué sur check disc du seul Blu-ray.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 5.1 (les sous-titres écorchent continuellement l’orthographe de Giuseppe en « Guiseppe »).

L’Atelier d’Images sort simultanément une édition Blu-ray + DVD de The Boxer, le troisième et dernier film que tournera Jim Sheridan avec Daniel Day-Lewis, et, en exclusivité FNAC, un coffret incluant les deux films.

Bonus - 4,0 / 5

Sur le seul Blu-ray :

Une affaire de famille, un entretien exclusif avec Jim Sheridan (16’). Le projet a été initié par Gabriel Byrne, producteur du film, et par le scénariste Terry George. Le réalisateur a été séduit par le thème de la relation père-fils (le film est une forme d’hommage à son père, mort pendant la promotion). Daniel Day-Lewis était chaudement soutenu par Universal après le succès de Le Dernier des Mohicans, vite retiré des salles pour une édition DVD qui assurait de meilleurs revenus au studio (100 millions de disques furent vendus !). Johnny Depp avait été envisagé pour le rôle de Giuseppe, finalement attribué à Pete Postlethwaite, recommandé par Daniel Day-Lewis qui avait tissé avec lui des liens d’amitié. Une partie de la presse anglaise s’est déchaînée sur le film auquel elle reprochait d’avoir noirci la police avec des entorses à la vérité et d’avoir fait l’apologie de la violence de l’IRA. Jim Sheridan admet que Gerry et Giuseppe n’ont pas partagé la même cellule et que Gareth Pierce n’a pas plaidé la défense des accusés lors du procès en révision et que certains des personnages sont fictifs, mais confirme la sincérité du rapport de l’erreur judiciaire fait par le scénario. Une scène fictive dans laquelle un membre de l’IRA transforme en torche vivante un gardien de prison atteste que le film ne fait pas l’apologie du terrorisme.

Au nom du père

Sur le Blu-ray et le DVD :

Jim Sheridan et Daniel Day-Lewis : au nom de l’Irlande (30’). Philippe Guedj, critique (Le Point Pop), rappelle que le film (avec un budget de 7 millions de dollars, le plus important alloué jusqu’alors à Jim Sheridan) a été tourné à Dublin (Belfast aurait été un terrain trop sensible) et à Liverpool, où la police a dû assurer la protection des équipes. Au nom du père s’inscrit parmi les meilleurs films sur le conflit nord-irlandais qui fit 3 400 morts de 1969 jusqu’à l’accord du Vendredi saint, signé en 1998. Suivant ses habitudes, Daniel Day-Lewis s’est intensément préparé à son rôle, en rencontrant Gerry Colon, en séjournant en Irlande pour se familiariser avec l’accent, en se soumettant à des interrogatoires musclés.

Analyse d’une séquence (5’), un pertinent commentaire par Philippe Guedj de la séquence introductive.

Deux utiles compléments au film apportés par Philipe Guedj !

Bande-annonce (2’)

Espace découverte, avec les bandes-annonces de The Boxer, Les Evadés de Maze (Maze, Stephen Burke, 1977), L’Anglais (The Limey, Steven Soderbergh, 1999) et A la rencontre de Forrester (Finding Forrester, Gus Van Sant, 2007).

Au nom du père

Image - 5,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC), finement résolue, lumineuse et agréablement contrastée, avec des noirs denses, déploie des couleurs naturelles, soigneusement étalonnées.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 assure une parfaite intelligibilité des dialogues, dans un bon équilibre avec l’accompagnement musical de Trevor Jones et avec l’ambiance. Une bande passante largement ouverte et une répartition cohérente du signal sur les cinq canaux immerge le spectateur dans l’action, avec une sollicitation efficace du caisson de basses pour les deux explosions de Guilford.

Ces remarques valent pour le doublage en français : au même format (il avait été limité au DTS 5.1 pour l’édition Universal de 2013), il manque de naturel.

Crédits images : © Universal Pictures, Hell’s Kitchen/Gabriel Byrne

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

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Philippe Gautreau
Le 2 septembre 2021
Cette terrible relation d’une erreur judiciaire orchestrée pour donner en pâture à l’opinion publique des innocents faussement accusés d’actes terroristes, devenu indisponible, nous revient, pour la première fois accompagnée de bonus. Une poignante mise en garde contre les dangers des lois d’exception.
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Franck Brissard
Le 13 juin 2013
Pas de commentaire.

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