L'Aventure c'est l'aventure (1972) : le test complet du Blu-ray

Réédition spéciale, cinquante ans après sa sortie en salles, d’un des plus gros succès populaires de Claude Lelouch.

Des voyous de la vieille école délaissent leurs méthodes traditionnelles de truands, devenues démodées, afin de se recycler dans les affaires et la politique. Ils se lancent dans de plus rentables kidnappings de stars du show-biz, diplomates et autres leaders suprêmes.

L’Aventure c’est l’aventure, sorti en 1972, est un des gros succès populaires de Claude Lelouch (pas loin de 4 millions d’entrées) après qu’il se fût acquis une notoriété planétaire en 1966 avec Un homme et une femme, salué par la Palme d’or (ex-aequo avec Signore & signori (Ces messieurs dames) de Pietro Germi), par deux Oscars, celui du Meilleur film étranger et du Meilleur scénario original et par le BAFTA Award du Meilleur film. Un succès qui défiait les augures : Les Cahiers du cinéma, en 1961, dans une critique de son premier film, Le Propre de l’homme, affirmaient : « Claude Lelouch, retenez bien ce nom : vous n’en entendrez plus jamais parler. » Une prédiction qui fait encore sourire, 61 ans et une soixantaine de films plus tard. Une fille et des fusils avait, en 1965, attiré l’attention d’une certaine critique, qui a, dans son l’ensemble, gardé ses distances vis-à-vis de sa filmographie. Elle a pourtant rallié certains, par exemple Yves Alion, coauteur avec Jean Ollé Laprune de Claude Lelouch, mode d’emploi (Calmann-Lévy, 2005).

À la fin du générique, le nombre 38.982 s’inscrit sur l’écran. C’est le numéro du visa de contrôle cinématographique, et aussi, précise le plan suivant, « le 38.982ème coucher de soleil de l’histoire du cinéma ». Ce qui ferait remonter sa naissance à… 1865 ! Ou l’inventeur de l’idée est fâché avec l’arithmétique, ou il faudra renvoyer dos à dos les frères Lumière et Thomas Edison pour avoir usurpé l’invention d’un petit génie de la génération précédant la leur.

Marxistes, tendance Groucho

L’Aventure c’est l’aventure part de l’idée que les cinq malfrats, à leur sortie de prison, après avoir assisté à un congrès de prostituées clamant que les trottoirs leur appartenaient, réalisent que la délinquance doit s’adapter aux idées du début des années 70, après la sérieuse remise en cause des valeurs traditionnelles en mai 1968. Après un laborieux apprentissage de la dialectique, leur reconversion dans la politique s’avère rémunératrice. L’enlèvement d’Ernesto Juarez, meneur d’une révolution en Amérique latine, permet de jouer sur plusieurs tableaux : de promettre la restitution de l’otage aux révolutionnaires contre rançon, et sa vente au dictateur local et, pour faire bonne mesure, aux USA, soucieux de maintenir la barre à droite dans la région. Le rôle d’Ernesto Juarez est tenu par Juan Luis Buñuel, fils de Luis Buñuel, qui s’efforça à se faire un prénom, en réalisant notamment Au rendez-vous de la mort joyeuse, un de ses films les moins oubliés.

L’Aventure c’est l’aventure, s’il bénéficie des talents de photographe de Claude Lelouch, le plus souvent derrière l’objectif (il est ici assisté par Claude Pinoteau), et de l’accompagnement musical de Francis Lai, traîne en longueur. Le scénario décousu et un montage mou peinent à soutenir la tension dramatique qui chute à plusieurs reprises, par exemple dans la trop longue scène, pourtant qualifiée de « culte » par certains, dans laquelle Aldo Maccione enseigne à ses complices la marche du dragueur.

L’Aventure c’est l’aventure garde un atout dans sa manche, le cabotinage de Lino Ventura, Charles Denner, Jacques Brel, Aldo Maccione et Charles Gérard (le seul survivant de la bande), pas toujours bien servis par des dialogues convenus et sans finesse.

Metropolitan Vidéo a récemment réédité, en version remasterisée, de nombreux films de Claude Lelouch et mis les petits plats dans les grands pour cette édition du 50ème anniversaire de L’Aventure c’est l’aventure et pour trois autres éditions spéciales : , Les Uns et les autres et Itinéraire d’un enfant gâté. À signaler, également, le coffret Claude Lelouch / Jean-Paul Belmondo : Un homme qui me plaît + Itinéraire d’un enfant gâté + Les Misérables.

L’Aventure c’est l’aventure (121 minutes) et ses maigres suppléments (9 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50, logé dans un digipack à trois volets, glissé dans un étui.

Le menu fixe et musical propose le film au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono.

Sous-titres pour malentendants. Si l’on active cette fonction, la rencontre sur les routes d’Italie de Lino et d’Aldo, avec des dialogues en italien sans sous-titres, apparaît sous-titrée, mais dans la langue du Dante.

À l’intérieur de l’étui, un livret de 56 pages, facsimile d’un extrait du numéro 15, sorti en mai 2015, du magazine trimestriel Schnock, « la revue des vieux de 27 à 87 ans », lancée en 2011. C’est un film sur les cons, titre la première partie qui contient une interview de Claude Lelouch par Bruce Toussaint recueillie en 2014, quelques anecdotes sur le tournage du film, le rappel des premiers pas avec la réalisation de scopitones, la revue de ses premiers films, la consécration d’Un homme et une femme… Suit le dico de L’Aventure c’est l’aventure, avec une vingtaine d’entrées, surtout des répliques du film, allant de « Analyse historique » à « Ze end », en passant par « Marxisme ». Le livret se referme sur Aldo, la classe, sur la paternité de la marche du dragueur, une interview de Charles Gérard, « devenu connu à 50 ans », et On s’est souri et on ne s’est plus quittés, un entretien avec Jacques Brel sur sa rencontre pendant le tournage avec Maddly Bamy qui allait être sa dernière compagne.

Une édition DVD est disponible, sans le livret.

Bande-annonce (2’52”).

Reportage (6’). « C’est le portrait de cinq salopards, sympathiques et dangereux (…), un film qui ne se prend pas au sérieux, dédié aux gens qui se prennent au sérieux », dit Claude Lelouch. Pour Lino Ventura, c’est un mélange des Trois mousquetaires et des Pieds nickelés. Quelques moments du tournage de la scène de la cour d’assises et les congratulations de Jacques Brel et Lino Ventura complètent ce court document.

L’image (1.66:1, 1080p, AVC), soigneusement nettoyée en 2015 pour la première édition Blu-ray, est stable, lumineuse et agréablement contrastée, dans une palette de couleurs saturées. Le gain de résolution apporté par le transfert en haut définition a préservé le grain du 35 mm.

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 mono (d’origine), très propre lui aussi, sans souffle, assure la clarté des dialogues dans un bon équilibre avec l’ambiance et l’accompagnement musical.

Crédits images : © Les Films 13, Films Ariane