L'Aventurier (1934) : le test complet du Blu-ray

Édition Collector Blu-ray + DVD

Réalisé par Marcel L'Herbier
Avec Victor Francen, Blanche Montel et Henri Rollan

Édité par Pathé

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Le 31/08/2022
Critique

L’édition de ce film peu connu de Marcel L’Herbier vient enrichir le catalogue des films de patrimoine soigneusement restaurés par Pathé.

L'Aventurier

Étienne Ranson, après une jeunesse dissipée, a fait fortune en Tunisie en exerçant différents trafics et en revendant l’exploitation d’une mine de sel qu’il a dû protéger contre une attaque d’indigènes en faisant 30 morts dans les rangs des assaillants. L’événement provoqua en France un tollé de l’opposition qui réussit à renverser le gouvernement conservateur. Étienne, à son retour à Grenoble, revoit sa cousine Geneviève dont il était secrètement amoureux. Mais il est mal reçu par les siens, jusqu’à ce que son oncle, propriétaire d’une ganterie au bord de la faillite, réalise que sa fortune pourrait sauver l’entreprise familiale.

L’Aventurier fut réalisé en 1934 par Marcel L’Herbier qui avait, au temps du muet, réussit, en créant sa société de production, à s’imposer comme un créateur d’avant-garde, indépendant des studios, avec L’Inhumaine (1924) et L’Argent (1928), encore vus aujourd’hui comme des marqueurs importants de l’histoire du cinéma. Il négocia sans difficultés majeures le virage du parlant et son renom, après la déconfiture de sa société de production, ouvrit les cordons de la bourse des studios. Le succès commercial de ses premiers films parlant, Le Mystère de la chambre jaune (1930) et Le Parfum de la dame en noir (1931) conforta la confiance des producteurs qu’il parvint cependant à décourager en menant une fronde pour l’indépendance absolue du réalisateur et dut se contenter de réaliser pour la télévision à partir de 1953.

L’Aventurier est l’adaptation assez libre d’une pièce à succès écrite en 1914 par Alfred Capus, auteur dramatique oublié, élu à l’Académie Française, précédemment adaptée par Gaumont, en 1916, avec, dans le rôle principal Louis Leubas (l’affreux banquier Favraux du Judex de Louis Feuillade), puis par Maurice Mariaud et Louis Osmont en 1924, pour Pathé.

L'Aventurier

Marcel L’Herbier a obtenu les moyens qui lui ont donné le temps exigé pour une mise en scène stylée, de s’assurer la contribution, pour la photographie, d’Armand Thirard qui sera le chef-opérateur de plusieurs chefs-d’oeuvre (Hôtel du Nord, Marcel Carné, 1938, La Fin du jour, Julien Duvivier, 1939, Le Salaire de la peur, Henri-Georges Clouzot, 1953…), pour les décors, de Lucien Aguettand (Les Deux orphelines, Maurice Tourneur, 1933) et, pour les costumes, celle de Jacques Manuel, un de ses fidèles collaborateurs depuis L’Argent en 1928.

Le budget alloué par Pathé permit aussi de réunir une solide distribution. Étienne Ranson est interprété par Victor Francen, devenu, après une belle renommée acquise sur les planches sous le patronage de Lucien Guitry, une vedette du cinéma parlant français, avant qu’il ne poursuivre sa carrière à Hollywood où il tiendra des seconds rôles dans une trentaine de films, de 1941 à 1967. Marcel L’Herbier l’emploiera dans six autres films, dont Forfaiture, en 1937, et Abel Gance l’avait placé en tête de distribution de La Fin du monde et de J’accuse (version de 1938). En face de lui, une débutante, Gisèle Casadesus à 20 ans, au moment où elle entre à la Comédie Française (elle nous a quittés en 2017 à l’âge de 103 ans !), amoureusement filmée dès sa première apparition, en léger ralenti, courant dans le parc, vêtue d’une robe de mousseline blanche. Avec un peu d’attention, on découvrira, parmi les ouvriers de la ganterie, un autre débutant, poussé au tout début de sa carrière par le réalisateur, Jean Marais, pour la première fois crédité au générique sous le nom de Maray.

L’Aventurier a un autre atout, la musique de Jean Wiener, compositeur de l’accompagnement musical de plus de 160 films, parmi lesquels plusieurs chefs-d’oeuvre universels, tels Les Bas-fonds de Jean Renoir en 1936, Au hasard Balthazar et Mouchette de Robert Bresson en 1966 et 1967.

Pour toutes ces raisons, L’Aventurier méritait d’apparaître enfin dans le catalogue de Pathé qui poursuit, année après année, parallèlement à l’édition de nombreux films récents, celle de films de notre patrimoine, magnifiquement restaurés, tels, dernièrement, La Roue (Abel Gance, 1923) ou Belphégor (Henri Desfontaines, 1927).

L'Aventurier

Présentation - 2,5 / 5

L’Aventurier (95 minutes) et son supplément (43 minutes) tiennent, dans cette édition combo, sur un Blu-ray BD-50 et sur un DVD-9 logés dans un digipack, non fourni pour le test, effectué sur le seul Blu-ray.

Le menu animé et musical propose le film au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono.

Piste d’audiodescription DTS-HD MA 2.0.

Sous-titres pour malentendants et sous-titres anglais.

Restauration 4K opérée en 2021 par L’Image Retrouvée, Paris-Bologne.

Bonus - 3,5 / 5

« Créer, c’est adapter » (43’, Pathé, 2022), un credo de Marcel L’Herbier, pour qui le cinéaste devait transformer le matériau d’inspiration pour en faire une oeuvre nouvelle. Alain Carou, conservateur des bibliothèques et chercheur du cinéma, Marie Martin, maîtresse de conférences en études cinématographiques, et Didier Griselain, spécialiste du cinéma français des années 1930 à 1960, expriment leurs vues sur le film et, plus généralement, sur le réalisateur qui voulait utiliser le cinéma, mode d’expression moderne, comme un art d’avant-garde, alors qu’il fut souvent contraint d’adapter des pièces du théâtre bourgeois. Les trois chroniqueurs soulignent les libertés qu’il s’arrogea dans son adaptation de la pièce : il modifia sa structure et accentua le cynisme d’Étienne Ranson, devenu une sorte d’Henri de Monfreid. Il fait aussi écho à l’actualité, à la crise économique, au scandale et aux troubles déclenchés par l’affaire Stavisky. Ils évoquent ensuite « la mise en film » de Marcel L’Herbier, l’attention qu’il portait à la composition des cadres, aux angles de prises de vue, aux mouvements de caméra, aux décors et aux costumes. Ils présentent enfin les acteurs principaux, Victor Francen, Blanche Montel, Gisèle Casadesus et Lucien Pascal.

L'Aventurier

Image - 4,5 / 5

L’image (1.37:1, 1080p, AVC), après élimination des marques de dégradation de la pellicule, affiche des blancs lumineux, des noirs denses et un agréable dégradé de gris bien étalonné. L’étonnant piqué d’ensemble laisse supposer que la restauration a été, pour l’essentiel, effectuée après scan du négatif nitrate original, à l’exception de quelques plans plus doux. Le grain du 35 mm a échappé à une réduction excessive.

Son - 3,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 mono, bien débarrassé des bruits parasites dus à la vétusté de la pellicule, mais pas d’un souffle assez persistant, est, de temps à autre, affecté par le timbre étouffé des dialogues, par exemple dans le tête-à-tête entre Étienne et Geneviève à 82 minutes. Quelques saturations et stridences dans le bel accompagnement musical de Jean Wiener.

Crédits images : © 1934 - PATHE FILMS

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 1 septembre 2022
L’Aventurier, un film assez méconnu de Marcel L’Herbier, méritait d’apparaître enfin dans le catalogue de Pathé qui poursuit, année après année, parallèlement à l’édition de nombreux films récents, celle de films de notre patrimoine, magnifiquement restaurés, tels, dernièrement, La Roue d’Abel Gance, 1923) ou Belphégor d’Henri Desfontaines.

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