Les Chiens de guerre (1980) : le test complet du Blu-ray

The Dogs of War

Édition Collector

Réalisé par John Irvin
Avec Christopher Walken, Tom Berenger et Colin Blakely

Édité par L'Atelier d'Images

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Le 21/09/2022
Critique

Le premier film cinéma de John Irvin : casting riche, scénario adapté d’un livre documenté de Forsyth, réalisation sophistiquée à l’ampleur régulièrement spectaculaire.

Les Chiens de guerre

Amérique centrale puis New York, Londres, Europe et Afrique de l’Ouest, en 1980 : le mercenaire Shannon est approché par l’agent d’une d’une riche société minière, afin de renverser le sanguinaire dictateur africain Kimba. On voudrait installer à sa place le colonel exilé Bobi, davantage accommodant. Shannon effectue une première mission de reconnaissance : il est soupçonné, arrêté, emprisonné aux côtés du docteur Okoyé (principal opposant), torturé, expulsé. Son rapport confirme qu’une opération militaire est non seulement tactiquement possible mais indispensable. Elle est clandestinement organisée depuis Londres, Paris et l’Espagne. L’assaut africain a lieu mais Shannon modifie, d’une manière inattendue, sa finalité.

Les Chiens de guerre (The Dogs of War, USA-GB 1980) de John Irvin adapte, d’une manière ambitieuse, un roman de 1974 au titre homonyme écrit par Frederick Forsyth. On raconte que Forsyth s’était introduit dans les milieux des mercenaires et des marchands d’armes, en prétendant qu’il préparait un coup d’état en Guinée équatoriale. C’est celui des marchands d’armes qui l’aurait le plus impressionné. Le titre du générique d’ouverture est composé de deux panneaux, un d’introduction et un en forme de titre principal (ils sont repris comme slogan sur les affiches originales) qui sont, en réalité, une citation de William Shakespeare, La Tragédie de Jules César, Acte III, scène 2, vers 273 : « Criez « Pas de quartier ! » et lâchez les chiens de guerre (…) ».

Les Chiens de guerre

Outre les scénaristes crédités, on sait que Michael Cimino travailla (non crédité) au script. Lorsque le distributeur United Artists (Artistes Associés) insista pour qu’un acteur américain fût en tête d’affiche, on évoqua Sylvester Stallone, Burt Reynolds, Sean Connery mais le réalisateur John Irvin voulait un profil moins connu, au physique plus discret et dont le jeu dramatique pût démentir occasionnellement l’apparence, produisant un effet de surprise sur le spectateur. Cimino lui proposa alors Christopher Walken qu’il avait lui-même employé dans Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter, USA 1978). Les producteurs (parmi lesquels figure le cinéaste Norman Jewison) soutinrent le choix de Irvin et Cimino : le distributeur s’y résigna à contre-coeur, ce qui se traduisit par une baisse du budget de plusieurs millions. Walken se révéla pourtant admirable : il conféra au rôle (peut-être son meilleur) son romantisme et sa puissance. C’est aussi à Cimino qu’on devrait la modification du caractère du colonel Bobi, le conspirateur africain exilé à Londres : dans le livre de Forsyth, c’est une brute épaisse alors que Cimino le transforma en homme élégant, raffiné, cultivé mais non moins fondamentalement criminel que Kimba. En revanche l’acteur Tom Berenger se plaignit qu’une bonne moitié de ses séquences tournées, notamment celles avec l’actrice Helen Shaver qui jouait le rôle de son épouse, aient été supprimées au montage final : lorsque Jewison lui proposa d’aller au Japon faire la promotion du titre, Berenger refusa pour ces raisons. Le cinéaste John Irvin mit, pour sa part, à profit son expérience de documentariste relativement au combat armé : il avait filmé la guerre du Viêt-Nam mais il se révéla tout aussi à l’aise dans la peinture sociologique et psychologique des scènes annexes, souvent filmées d’une manière pointilliste et sophistiquée.

Les Chiens de guerre

Sur le plan documentaire, l’armement montré est riche, historiquement comme militairement crédible. Le spectaculaire lance-grenade appartient à la famille des Manville Gun (inventé en 1935 par Charles J. Manville) . Sa production cessa en 1943 mais Les Chiens de guerre raviva considérablement l’intérêt de l’industrie militaire pour son concept : le MGL Milkor d’Afrique du Sud et le Hawk MM1 américain produits dans les années 1980 en furent des versions modernisées, directement inspirées par le film de Irvin. Une disparité fugitivement repérable par l’amateur d’armes honnête connaisseur : sur le pont du navire, lors de la séquence d’instruction collective au tir du pistolet-mitrailleur Uzi, quelques soldats sont munis du pistolet-mitrailleur Ingram Mac-10. Ce n’est cependant pas invraisemblable sur le plan logistique, dans la mesure où les premiers lots de Ingram MAC-10 avaient été chambrés en 9mm Parabellum, également calibre du Uzi. La devise prononcée par le comédien Jean-François Stévenin (« Vive la guerre, vive la mort, vive le sacré mercenaire ! ») est une adaptation poétique par Forsyth de celle de la Légion étrangère (« Vive la guerre, vive la mort, vive la Légion étrangère ! ») : sa rime finale est poétiquement préservée.

Les extérieurs naturels furent filmés aux Caraïbes, plus précisément au Belize, qu’il s’agisse de la séquence d’ouverture en Amérique centrale ou encore des séquences censées se dérouler en Afrique de l’Ouest. Sur le plan de la censure cinématographique, plusieurs versions furent exploitées, au cinéma comme plus tard en reprise vidéo VHS, y compris aux USA et en Angleterre : leurs durées oscillaient entre 102 et 118 minutes. La version longue (montage international / international cut) est bien la fameuse version intégrale originale de 119 minutes (durée cinéma sur le Blu-ray) mais je préfère, pour ma part, la version courte 104 minutes (montage américain / US cut) exploitée à la sortie du film en France : elle perd en psychologie ce qu’elle gagne en rythme et en puissance générale. Notez, enfin, que John Irvin dirigea lui-même la séquence de la bataille finale au lieu de s’en remettre à son directeur de seconde équipe, comme c’était alors souvent l’usage à Hollywood. Elle demeure d’une remarquable intensité.

Les Chiens de guerre

Présentation - 4,0 / 5

1 Blu-ray BD50 région B, édité par L’Atelier d’images le 06 septembre 2022. Image couleurs au format original 1.85 compatible 16/9. Son DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo VOSTF + VF d’époque. Durée du film : 104 min. (version américaine exploitée cinéma en France à la sortie du film) + 119 min. (version longue montage international). Suppléments : version longue 119 min. + présentation du film par Philippe Lombard + bande-annonce originale + 3 bandes-annonces d’autres titres. L’illustration de la jaquette reprend le visuel de la plus belle affiche française d’exploitation d’époque, d’ailleurs autrefois reprise par la jaquette de l’ancienne VHS éditée par Warner France : un autre bon point !

Bonus - 4,0 / 5

Présentation par Philippe Lombard(durée 13 min. environ) : brève mais bonne remise en situation historique du titre au sein de la catégorie (le film de mercenaires) et du genre auquel il appartient (le film de guerre), rappel des véritables mercenaires des années 1960-1980, évocation du roman original et de sa genèse, enfin quelques brefs commentaires sur le cinéaste John Irvin issu du documentaire de guerre et sur le casting. Illustrée par quelques extraits et une ou deux affiches.

Version longue (VOSTF, durée 118 min. 45 sec.) : c’est la version dite « international cut ». On peut y découvrir quelques séquences inédites en France au moment de la sortie du film  : Shannon assiste en tant que parrain au baptême du fils d’un de ses soldat tués au combat en Amérique centrale mais il doit subir les reproches de la mère désormais veuve ; la partie avec son ex-femme, avec laquelle il voudrait renouer en vain, est augmentée de plusieurs séquences ; la douane espagnole contrôle sévèrement le navire et sa cargaison avant son départ ; un des trafiquants français de munitions a peur de livrer la marchandise au dernier moment mais Shannon le fait changer d’avis. La version dite « US cut » (version exploitée distribuée aux USA et en France en 1980) avait préféré couper tout cela : son rythme est plus nerveux, plus intense. Certains critiques anglo-saxons considèrent que la version longue augmente l’ampleur psychologique et sociologique du scénario, ce qui est vrai, mais je préfère néanmoins la version courte dont l’efficacité me semble, au total, syntaxiquement supérieure en raison de brutalité un cran plus glacée. Sur le plan technique, les séquences inédites de cette version longue ont tendance à être davantage poussiéreuses que les autres mais, pour le reste, sont encore en assez bon état argentique.

Bande-annonce originale (VOSTF, durée 2 min. 25 sec.) : très bien montée, donnant une excellente idée du film de référence, en assez bon état argentique.

Bandes-annonces de Le Train (USA-Fr.-Ital. 1964) de John Frankenheimer (en N&B d’origine au format 1.66 respecté compatible 16/9, cliquable au menu à partir de l’image de l’édition collector française Coin de mire), Sanglantes confessions (True Confessions, USA 1981) de Ulu Grosbard, F/X effets de choc (USA 1986) de Robert Mandel.

Très bonne édition spéciale, présentant pour la première fois en France sur un même disque la version standard exploitée au cinéma chez nous et la version longue inédite chez nous, y compris dans les anciennes éditions françaises numériques. Le cinéphile anglophone souhaitant une édition collector munie de bonus nettement plus amples, se tournera vers l’édition Blu-ray américaine Scorpion de 2020, riche en témoignages de première main.

Les Chiens de guerre

Image - 4,0 / 5

Full HD 1080p AVC, au format large original 1.85 compatible 16/9, en couleurs. Copie argentique restaurée techniquement supérieure aux éditions numériques antérieures. Aucune rayure visible mais quelques poussières négatives et positives sur un certain nombre de plans. Master vidéo doté d’une bonne définition générale et d’un excellent report colorimétrique, notamment durant les scènes nocturnes très savamment éclairées par le grand directeur photo anglais Jack Cardiff (1914-2009) qui avait autrefois signé, comme réalisateur à part entière, un autre classique du film de guerre appartenant à la même catégorie, à savoir Le Dernier train du Katanga (The Mercenaries, USA-GB 1968). On retrouve ici sa maîtrise de l’écran large et des couleurs : souvenons-nous, concernant ce second aspect, que Cardiff avait été considéré comme l’un des grands directeur photos du procédé Technicolor dès les années 1945.

Les Chiens de guerre

Son - 5,0 / 5

DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo en VOSTF et VF d’époque : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. Le film était Dolby Stéréo au moment de sa sortie et le traitement des effets sonores y était parfois très ample : il est ici bien restitué, quelle que soit la piste sélectionnée. La VF d’époque est dramaturgiquement soignée, la voix française de Christopher Walken lui convient remarquablement bien ; les comédiens français Jean-Pierre Kalfon et Jean-François Stévenin se doublent évidemment eux-mêmes. Dynamique riche en effets sonores, notamment durant les séquences d’ouverture et de fin. Musique signée Geoffrey Burgeon, capable d’une sourde puissance et de belles envolées lyriques (par exemple durant le générique de fin). Attention à la traduction écrite du terme « end user » dans la VOSTF : il s’agit d’un terme technique d’import-export relatif à la présentation aux douanes et à l’administration d’un certificat d’utilisateur final. Signalons aussi qu’on discute encore aujourd’hui, parmi les anglo-saxons cinéphiles ayant lu le livre de Forsyth en anglais dans le texte, du sens technique exact du terme « 9mm Quad » exigé par un des associés de Shannon lorsqu’il discute à Paris son contrat de fourniture de munitions près de l’Hôtel Meurice. Plusieurs interprétations en sont proposées : aucune ne fait l’unanimité.

Crédits images : © Juniper Films, United Artists

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
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francis moury
Le 22 septembre 2022
Le premier film cinéma de John Irvin : casting riche, scénario adapté d’un livre documenté de Forsyth, réalisation sophistiquée à l’ampleur régulièrement spectaculaire. Ici présenté, pour la première fois en France, dans sa version exploitée cinéma chez nous et dans une version longue inédite.

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