Men (2022) : le test complet du Blu-ray

Une jeune femme traumatisée est harcelée par plusieurs hommes. Réalité ou hallucination ? Un film étrange à découvrir…

Harper, frappée par son mari après lui avoir annoncé son intention de divorcer, lui demande de quitter l’appartement. Peu après, elle le voit tomber d’un étage supérieur et s’empaler sur une grille. Pour se remettre du choc et effacer un sentiment de culpabilité, elle quitte Londres pour s’isoler dans un vieux manoir en pleine campagne. Au cours de sa première sortie en forêt, il lui semble qu’un homme étrange la suit…

Men, sorti dans nos salles en juin 2022, après avoir été présenté à Cannes par La Quinzaine des réalisateurs (devenue La Quinzaine des cinéastes), est le troisième long métrage d’Alex Garland, révélé en 2014 par Ex Machina, sorti sous un déluge de nominations et de récompenses, dont le Grand prix du Festival d’Avoriaz, loué aussi pour son scénario, écrit par le réalisateur. Accessoirement, il remporta l’Oscar des meilleurs effets visuels et consolida la renommée naissante d’Alicia Vikander. Son second film, Annihilation, sorti en 2018, moins bien reçu par la critique, est une autre histoire fantastique, avec Natalie Portman et Jennifer Jason Leigh. Avant de devenir réalisateur, il s’était fait connaître en 2002 par le scénario de 28 jours plus tard (28 Days Later…, Danny Boyle).

Men met en images un scénario subtil. Harper, alors qu’elle tente de chasser l’idée qu’elle pourrait être responsable de la mort de son mari, est confrontée à l’agressivité de plusieurs hommes qui la considèrent coupable. Les faits qui se déroulent sous ses yeux, explicables, donc naturels au début du film, apparaissent de plus en plus étranges, surnaturels. Le fantastique s’invite-t-il dans la réalité, ou Harper est-elle victime d’hallucinations ? Le dernier plan du film ne répondra pas à cette question.

Men, dans le magnifique environnement de Cheltenham, dans le Hertfordshire, servi par la belle photographie de Rob Hardy chef-opérateur des deux autres films d’Alex Garland, bénéficie surtout de la remarquable prestation des deux acteurs principaux.

Jessie Buckley, une actrice sensible, au jeu naturel, communique avec justesse le trouble et la fragilité de Harper. Elle affirme un talent remarqué depuis son interprétation de Lorna Bow, un des personnages récurrents de la série Taboo, de Marya Bolkonskaya de la série Guerre & Paix (BBC) (War and Peace, Tom Harper, 2016), d’une jeune femme oppressée par sa famille dans l’émouvante minisérie Jersey Affair (Beast, 2017) et de Rose-Lynn dans Wild Rose (Tom Harper, 2018). Elle fut nommée à l’Oscar du meilleur second rôle pour The Lost Daughter (Maggie Gyllenhaal, 2021), pas sorti dans nos salles, mais qu’on aimerait voir éditer en vidéo.

L’autre acteur, c’est Rory Kinnear, formé sur les planches au sein de la Royal Shakespeare Company. On l’avait remarqué dans la série Penny Dreadful. Avec Men, il relève brillamment le défi d’interpréter six ou sept personnages, dont l’homme vert et un inquiétant pasteur. Avec un maquillage souvent discret, il réussit, par une modification de ses attitudes et de sa voix, à faire croire à la présence de plusieurs acteurs.

Men, un film étrange, juxtaposant scènes délicates et excès grandguignolesques, s’avère être un subtil et envoûtant mélange de réel et d’imaginaire. On aimerait donc voir la suite de la filmographie d’Alex Garland, Devs, la minisérie qu’il a créée en 2020, 13 fois nommée (disponible sur la plateforme myCANAL), et l’on guettera la sortie de son prochain long métrage, Civil War, aujourd’hui en postproduction.

Men (100 minutes) et ses suppléments (28 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier noir.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 5.1.

Piste d’audiodescription DTS 2.0.

Sous-titres pour malentendants.

Rebirth : making of Men (24’). Alex Garland estime qu’on peut raconter à peu près tout ce qu’on veut, à condition que le sujet soit finement maîtrisé. C’est pourquoi il a soumis le scénario à son équipe avant le tournage. Un élément central du film est l’agressivité envers les femmes dont sont capables les hommes, incarnés par « l’homme vert » (Green Man), une figure mythique qui a inspiré de nombreuses sculptures dans les églises médiévales de Grande Bretagne. Plus qu’à régler minutieusement la position de chaque objet dans le cadre ou les éclairages, Alex Garland tient à donner aux acteurs la liberté dont ils ont besoin pour entrer dans la peau de leur personnage. Sa scène préférée est celle, sans dialogues, où Harper découvre la forêt et le tunnel d’une voie ferrée désaffectée, près du manoir découvert sur le site Airbnb. Il justifie le côté grotesque de certains effets visuels. (Avec la participation de Jessie Buckley et Rory Kinnear).

Bandes-annonces de Men (1’35”) et d’une belle sélection d’autres longs métrages « pas comme les autres » distribués par Metropolitan Films : Midsommar (Ari Aster, 2019), Hérédité (Hereditary, Ari Aster, 2018), L’Internat (Boarding School, Boaz Yakin, 2018), The Lodge (Severin Fiala, Veronika Franz, 2019), It Follows (David Robert Mitchell, 2014), Les Crimes du futur (Crimes of the Future, David Cronenberg, 2022) et Lucky Day (Roger Avary, 2019).

L’image numérique (1.85:1, 1080p, AVC), lumineuse, agréablement contrastée, avec des noirs denses, finement résolue, déploie, dans les plans larges de paysages comme dans les plans rapprochés en intérieur, des couleurs naturelles, bien étalonnées, sous toutes les conditions d’éclairage.

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 assure une parfaite clarté des dialogues. La dynamique et l’ouverture de la bande passante donnent une bonne présence à l’ambiance, mais le cantonnement sur le plan frontal limite l’impression d’immersion, surtout sensible pour l’accompagnement musical, finement délivré.

Le doublage en français, acceptable, au même format, place des dialogues au spectre étroit en retrait de l’ambiance et de l’accompagnement musical, phénomène très rare. Il n’a pas été pris en compte pour l’attribution de la note.

Crédits images : Kevin Baker © Men Film Rights LLC.