Réalisé par Luis Buñuel
Avec
Silvia Pinal, Francisco Rabal et Fernando Rey
Édité par Films sans Frontières
Dans l’Espagne franquiste, Viridiana, retirée dans un couvent,
va rendre visite à son oncle, un fétichiste hanté par le
souvenir de sa femme, à laquelle Viridiana ressemble comme
une goutte d’eau. Troublée, la jeune femme décidera de rester
dans la maison familiale après le suicide de son oncle. Elle
se tournera vers les pauvres, les accueillant dans les
dépendances de la vaste demeure occupée désormais par son
cousin, adepte des plaisirs de la vie.
C’est une charge sans concession à l’encontre de la religion
que Buñuel nous livre avec ce film. La douce et pieuse
Viridiana se révèle être une bigote ridicule, voire une
pharisienne, effrayée par le contact des pis (phalliques)
d’une chèvre, et se promenant suivie de ses pauvres comme le
Roi Soleil suivi par sa cour (des miracles).
Elle utilise son statut pour recueillir des mendiants, sans
chercher pour autant à les réintégrer en leur offrant du
travail ; elle se contente de les entraîner dans les champs
telle une bergère menant son troupeau. Dans un montage
parallèle, d’une grande portée cynique, Buñuel opposera les
mendiants qui prient au soleil et les ouvriers qui travaillent
d’arrache-pied à la restauration de la villa.
Le film se termine sur un banquet de mendiants (que ne
renieraient pas les Rolling Stones), quand les gueux,
recueillis par Viridiana, décident de s’offrir une soirée dans
le luxe de la grande maison. Bien que leurs intentions ne
soient pas mauvaises, l’alcool aidant, ils vont se livrer à un
jeu de destruction sur la riche salle à manger. Buñuel se
garde de charger les miséreux ; la critique pointe en
direction de Viridiana, qui leur a étalé tout ce luxe sous le
nez, sans leur offrir une seule chance d’en profiter ou de se
réintégrer dans la vie active.
On a ici l’oeuvre d’un esprit libre, en avance sur son temps,
une de ces figures fortes du cinéma qui n’a jamais hésité à
coucher ses opinions sur la pellicule. Chapeau bas, monsieur
Buñuel !
L’affiche du film avec ses visages gris et marqués est
envoûtante. Un menu fixe et muet, un photomontage aux couleurs
artificiels mais vifs comme les opinions que nous inspirent le
film.
Chaque page possède des curseurs de navigation qui leur sont
propres, dont le plus étonnant est celui du chapitrage qui
représente une femme couchée, comme morte (pauvre Ophélie !).
Didactiques : une filmographie sélective de Luis Buñuel et des notes de productions. Un reportage sur Buñuel aurait été le bienvenu…
A l’exception de quelques puces blanches, on a droit ici à un
excellent master ; la pellicule originale a été conservée avec
soin. Des noirs profonds, aux blancs éclatants, toute une
palette de nuances s’offrent à vous.
La compression frise la perfection, hormis quelques
panoramiques difficiles. Image en 16/9 anamorphique.
Un mono de bonne qualité, généralement très clair, tout juste
notera-t-on quelques effets de saturation sur certaines
répliques.
Pour un film qui date du début des années Soixante, il est
étonnant qu’il n’ait pas été doublé, et s’il l’a été, pourquoi
cette version ne figure t’elle pas sur le disque. Avec un DVD,
le consommateur doit être libre de choisir la langue dans
laquelle il souhaite visionner le film, non ?