La Nuit des morts vivants (1968) : le test complet du 4K UHD

Night of the Living Dead

Édition collector limitée - 4K Ultra HD + Blu-ray - Boîtier SteelBook

Réalisé par George A. Romero
Avec Duane Jones, Judith O'Dea et Karl Hardman

Édité par Studiocanal

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Le 15/05/2023
Critique

Un des jalons du cinéma d’épouvante, un choc en 1968, méritait les honneurs d’une édition UHD enrichie d’intéressants compléments.

La Nuit des morts vivants

Barbra et son frère Johnny sont venus fleurir la tombe de leur père en Pennsylvanie. Un homme au comportement étrange les attaque et tue Johnny. Barbra réussit à s’enfuir jusqu’à une maison isolée où se sont réfugiés une jeune femme, un couple et leur fillette, ainsi que Ben, un Afro-américain. La radio leur apprend que, dans tout le pays, des hordes d’hommes et de femmes tuent tous ceux qu’ils rencontrent avant de les dévorer. Les morts, à leur tour, deviennent des meurtriers…

La Nuit des morts vivants (Night of the Living Dead) sorti en 1968 (en France en janvier 1970), est le premier long métrage de George A. Romero (1940-2017) qui s’était fait la main en réalisant, au sein de la société The Latent Image qu’il avait fondée à Pittsburgh avec le producteur Russell Streiner, des films publicitaires, souvent récompensés. Une bonne idée lui est un jour venue d’exploiter l’expertise acquise pour se lancer dans la réalisation pour le cinéma.

C’est en 1967 que George Romero entreprit le tournage de La Nuit des morts vivants avec les moyens du bord : une équipe essentiellement constituée de collaborateurs de la société de production de films publicitaires, des acteurs peu connus, voire amateurs, un matériel léger, dans des décors naturels. Le film, d’un coût de 114 000 dollars, en rapportera 5 millions en quelques années.

La Nuit des morts vivants

George Romero, producteur de La Nuit des morts vivants, jouissait d’une totale liberté pour l’écriture du scénario original. Pas sûr que les studios auraient vu d’un bon oeil des hommes et des femmes se gaver de la chair et des entrailles des victimes qu’ils venaient d’assassiner, ou un Noir tabasser sans ménagement un Blanc, au plus fort des tensions entraînées par la lutte pour l’égalité des droits ! Le rôle principal, celui du Noir, est intensément tenu par Duane Jones, au sommet d’une carrière qui sera interrompue par une mort prématurée à 51 ans.

They’re coming for you, Barbra!

L’approche titubante d’un homme vêtu de noir, en arrière-plan au fond du cimetière, inquiète Barbra que son frère taquine en lui disant que les morts vont la poursuivre. Cette première scène reste, après plus d’un demi-siècle, gravée dans la mémoire de tous ceux qui ont vu le film à sa sortie.

La Nuit des morts vivants est devenu la bible des zombies, appelés « goules » (ghouls) dans le film. À partir d’un mythe puisé dans le folklore haïtien, George Romero, comme l’avait fait Bram Stoker pour les vampires, a brodé la mythologie des zombies cannibales, des créatures qu’on ne peut tuer que par le feu ou par une destruction de leur cerveau. En filigrane de cette fantaisie, se profile une évocation de la violence qui secouait les USA pendant les années 60 et se manifestait par le racisme, la lutte pour l’égalité des droits, l’assassinat de John et Bob Kennedy et de Martin Luther King, la guerre au Viêt Nam…

La Nuit des morts vivants

La Nuit des morts vivants fit l’effet d’une nouveauté à sa sortie, avant d’acquérir le statut mérité de classique du cinéma d’épouvante. Certains ont dit qu’il avait été précédé par Le Carnaval des âmes (Carnival of Souls, 1962), un autre premier film fait avec très peu de moyens et dont le succès, surtout dû au bouche à oreille, fut surprenant. Mais, à mon avis, la comparaison s’arrête là : le film de Romero a une autre valeur artistique, une autre portée sociologique et, surtout, évite les quelques baisses de tensions et maladresses qui émoussent l’impact du film de Herk Harvey.

La Nuit des morts vivants a stimulé l’imagination des cinéastes. Parmi les innombrables variations sur le thème, avec un bon lot de navets, figurent en très bonne place celles aussi réalisées par George Romero, Zombie (Dawn of the Dead, 1978) et Le Jour des morts vivants (Day of the Dead, 1985) avec son inattendue dimension féministe. Mais on compte d’autres belles réussites, toujours dans le genre apocalyptique : 28 jours plus tard (28 Days Later… , Danny Boyle, 2002), Shaun of the Dead, dans le registre de la parodie (Edgar Wright, 2004), Dernier train pour Busan (Busanhaeng, Sang-ho Yeon, 2016)… La télévision n’a pas à rougir avec la saga The Walking Dead (2010-2022, 177 épisodes) créée par Frank Darabont et The Last of Us, dont la saison 1 doit très bientôt sortir sur DVD, Blu-ray HD et UHD.

La restauration, utilisée pour l’édition Criterion sortie en février 2018, avait été commanditée par le Museum of Modern Art et The Film Foundation et opérée par Audio Mechanics, à 99% à partir d’un scan 4K du négatif original 35 mm. Elle avait été supervisée par George Romero peu avant sa disparition, et par le coscénariste John A. Russo, l’ingénieur du son Gary R. Streiner et le producteur Russell W. Streiner.

La Nuit des morts vivants

Présentation - 3,0 / 5

La Nuit des morts vivants (97 minutes) et ses généreux suppléments (226 minutes) tiennent sur trois disques : un Blu-ray BD-100 4K UHD et deux Blu-ray BD-50, un avec le film et un supplément, et l’autre avec les bonus. Les trois disques sont logés dans un boîtier SteelBook, magnifiquement sérigraphié en noir et blanc.

Le menu propose le film dans sa version originale, l’anglais, avec sous-titres optionnels, au format audio Linear PCM 2.0 mono, et dans deux doublages, en français et en allemand, au même format. Tous les suppléments sont sous-titrables dans les deux langues.

Bonus - 5,0 / 5

Sur le disque 4K UHD :

Raising the Dead (Raising the Dead: Re-Examining Night of the Living Dead, 2020, 36’). Des critiques et des membres de l’équipe soulignent l’aspect terrifiant et subversif du film qui marqua les débuts du thème cinématographique de l’apocalypse des zombies mangeurs de chair humaine. Il devint la bible zombiesque, révolutionna le cinéma d’épouvante avant de devenir un classique. Ils évoquent la liberté d’esprit de George Romero, sa créativité, sa patience avec les acteurs, ses talents de scénariste, son sens de l’humour, sa générosité. Pour eux, la plupart des remakes sont une corruption du genre créé par Romero. La violence du film était en résonnance avec celle des années 60.

Ce supplément inédit est également disponible sur le Blu-ray de bonus.

Sur le Blu-ray du film :

Présentation de Night of Anubis (7’, Criterion, 2018) par le producteur Russell Streiner. Night of Anubis fut le nom donné au film sur une copie en 16 mm. La pellicule argentique donnait au film « quelque chose d’organique » et obligeait le réalisateur à constamment « évaluer son travail », les corrections ne pouvant être faites, comme aujourd’hui, en quelques clics. Le montage, opéré par George Romero, s’opérait sur une réduction du film en 16 mm pour préserver le négatif original. Elle donnait cependant une bonne idée de ce que pourrait être le film qui s’est appelé The Monster Flick, puis Night of the Flesh Eaters, titre abandonné parce qu’il avait été déposé par une société de production. Fut choisi, Night of Anubis, le dieu égyptien des morts, avant que le titre définitif ne soit imposé par le distributeur.

La Nuit des morts vivants

Night of Anubis (85’, 1080p, AVC avec sous-titres optionnels, LPCM 2.0 mono), la copie de travail du film, une réduction à 16 mm utilisée pour le montage de l’image et du son, plus court de 12 minutes que le montage final. Une image surexposée et peu contrastée, avant étalonnage.

Sur le Blu-ray des bonus, une reprise partielle des suppléments de l’édition Criterion :

Raising the Dead (36’), aussi sur le disque 4K UHD (voir l’analyse plus haut).

Images inédites du tournage en 1967 (3’, muet) d’une des scènes finales, l’assaut par une milice de la maison-refuge.

Présentation de Dead Relics par l’ingénieur du son Gary Streiner (4’, Criterion, 2017). Le montage, en réduction à 16 mm, de quatre bobines de la fin du métrage qui servit de version de travail et à la présentation du film aux distributeurs.

Dead Relics : clip promotionnel du film (18’, muet).

Light in the Darkness : le rayonnement de La Nuit des morts-vivants (24’, Criterion, 2017). Le petit film d’horreur réalisé avec des ressources minimales est devenu un classique, une oeuvre inspirante pour les cinéastes Robert Rodriguez, Frank Darabont et Guillermo del Toro. Il a démontré qu’un film d’horreur pouvait être, pour un esprit indépendant, un moyen efficace pour mettre en lumière les problèmes de société des USA. Romero a réussi à refléter « l’anxiété sociale et raciale » des années 60 en situant l’action en Pennsylvanie et avec une mise en scène évitant tout effet spectaculaire.

La Nuit des morts vivants

Walking Like the Dead (2017, 13’). Des amateurs racontent comment ils ont étés amenés à jouer les zombies, avec leurs propres vêtements, à apprendre à tituber après avoir été très rapidement maquillés.

Tones of Terror : interview de Jim Cirronella sur la musique du film (11’, Criterion, 2017). Les morceaux sont extraits d’une collection préenregistrée dix ans plus tôt, « Capitol H-Q Library », une pratique alors courante pour une illustration musicale à moindre coût. Le choix de George Romero, concentré dans la section science-fiction, fut cohérent et bien adapté à l’image, ce que démontre le commentateur avec plusieurs extraits du film.

Venus Probe : la sonde Vénus (0’33”).

Limitations into Virtues : le film examiné par Tony Zhou et Taylor Ramos (12’, 2017). Le film est un modèle d’efficacité pour une production à petit budget, un bel exemple « de transformation de contraintes en atouts ». La caméra devait, quand elle était raccordée à un synchroniseur du son (blimp), être fixée sur un trépied, une limitation qui participe au style du film, finement analysé dans cet intéressant complément.

Learning from Scratch : entretien avec le coscénariste John A. Russo (12’, Criterion, 2017). John A. Russo raconte son expérience acquise à Latent Image, installée dans un local loué pour 50 dollars par mois. Il démontre les talents de caméraman et de monteur de George Romero, extraits de films à l’appui.

L’édition Criterion sortie aux USA en février 2018, avec des bonus supplémentaires d’une durée cumulée de 78 minutes et deux commentaires audio du film enregistrés en 1994, reste l’édition de référence.

La Nuit des morts vivants

Image - 4,5 / 5

L’image 4K HEVC - SDR (1080p, AVC sur le Blu-ray BD-50), au ratio original de 1.37:1 (la jaquette indique 1.33:1), a été débarrassée des marques de dégradation de la pellicule par une soigneuse restauration. Le grain d’origine, heureusement épargné, manque occasionnellement d’homogénéité. On apprécie particulièrement les blancs lumineux, la densité des noirs, la fermeté des contrastes et la finesse du dégradé de gris. Le choix du SDR est défendable pour un film tourné il y a près de 60 ans avec des moyens rudimentaires.

La Nuit des morts vivants

Son - 5,0 / 5

Le son direct mono d’origine, encodé au format Linear PCM 2.0 sur les deux disques, est d’une surprenante propreté. Les dialogues sont restitués avec une clarté sans failles, dans un bon équilibre avec l’ambiance, dont la présence est soutenue par une bonne dynamique. Très peu de saturations dans l’accompagnement musical.

Le doublage en français, correct, est légèrement affecté par du souffle et un timbre un peu étouffé.

Crédits images : © Market Square Productions - Studiocanal - Tous droits réservés.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

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Philippe Gautreau
Le 16 mai 2023
Réalisé pour une poignée de dollars, La Nuit des morts vivants fit l’effet d’une bombe lors de sa sortie, il y a plus de cinquante ans. Il révolutionna le cinéma d’horreur, inspira plusieurs cinéastes, avant d’être reconnu comme un classique du genre. Chargée de bonus, cette première édition en Ultra HD exploite la dernière restauration du film, supervisée par le réalisateur avant sa disparition.

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