Réalisé par Michel Viotte
Édité par ARTE ÉDITIONS
« De Superman à Spiderman » est ce qu’on pourrait définir
une quête « archétypique » au plus profond des âmes des super-
héros américains, et donc - par ricochet - à l’intérieur de
nous-mêmes.
Dans son genre, ce documentaire franco-canadien étonne pour
son ampleur de moyens : Stan Lee, John Romita, Dave Gibbons,
Neal Adams, Joe Quesada, et une bonne brochette des demi-Dieux
qui ont fait et font les comics Marvel et DC, y sont
longuement interviewés. Un document colossal aussi pour ses
images et clips de répertoire : les dessins et les griffes
caractéristiques d’un Jack Kirby ou Steve Ditko, les bandes-
annonces ou extraits des incarnations sur grand ou petit écran
des super-héros, mais aussi des clips d’archives, comme les
rares serial « cliffhanger » Republic des années ‘40.
Et pourtant - comment réussir à transposer un demi-siècle
d’icônes et mythes urbains, des débuts de « Superman » et
« Batman » dans les années ‘30 aux déclinaisons ultra-dark
d’aujourd’hui, dans l’espace d’à peine 100 minutes ? Le
documentaire de Michel Viotte est donc obligé de synthétiser
et généraliser. Et pourtant, il trouve le temps de s’attarder
sur les étapes importantes, comme la censure et la création du
« Comics Code » dans les 50’s, ou la différence entre les
griffes Marvel et DC dans les 60’s.
On peut reprocher à « De Superman à Spiderman » quelque parti
pris, mais son approche non-fan est aussi l’élément qui fait
sa force. Car il devient un impressionnant outil ludo-
pédagogique, une invitation au voyage dans les bulles (avec
super pouvoirs), qui pourra se poursuivre parmi ses bonus de
choix…
Et toute honnêté, les menus du disque sont plutôt moches. Et
il s’agit à peu près du seul reproche qu’on peut avancer à
l’encontre de ce DVD, qui va s’imposer comme l’un des petits
modèles du genre.
100 minutes pour parler des super-héros sont beaucoup et pas
assez. Ainsi, « De Superman à Spiderman » est complété par une
riche dotation en bonus (plus d’une heure 30), composés pour
la plupart de « chutes » de son long tournage.
Dernier complément de choix : ce DVD d’Arte Vidéo offre à la
fois la VF (avec sous-titrage non imposé, qui se limite aux
extraits concernés) et une piste audio anglaise, qui pourra
élargir la diffusion de la galette au delà des frontières
nationales.
Juste un conseil : attention au rédoutable écran de sélection
des langues, qui fait redemarrer le DVD de son splash screen.
Mis à part la rencontre avec Moebius, chaque supplément est
composé en fait des « chutes » non utilisées pendant le montage
du documentaire. Mais quel choix de contenus !
Par qui commencer ? Par une interview de Moebius
(6’10”), qui s’est laissé tenter par les super-héros Marvel,
ou par les propos du « Man » Stan Lee (15’, en plusieurs
segments) ? Le choix des armes vous appartient.
Moebius tient une conversation presque psychanalytique sur les
archétypes des super-héros US, accompagnée par de nombreuses
planches de sa propre version du Silver Surfer et de Galactus.
Le DVD donne clairement beaucoup d’amplitude à la rencontre de
Stan Lee, repartie en dix questions/réponses. On est
physiologiquement tentés de commencer par le chapitre sur Jack
Kirby, pour espérer d’entendre le mot final sur la rivalité
qui opposa les deux hommes, mais Stan Lee se tiendra à sa
version de toujours. En revanche, les parties sur Spider-Man,
les X-Men et sur la violence, sont toujours intéressantes.
Bien sûr, ceux qui pensent que « The King » était le Dieu de
leur enfance, commenceront le tour des bonus par ce
portrait très intéressant de Jack Kirby (15’ - VOST),
signé par sa fille et par l’un de ses anciens collaborateurs.
De nombreuses illustrations de la griffe de Kirby accompagnent
le document.
L’atelier est véritablement la section qui transforme
ce DVD en une pièce de collection. Six sections (dédiées à
Bill Sienkewicz, John Romita Sr, Dave Gibbons, Joe Kubert,
Steve Buscema et Travis Charest), ou plutôt six cours de
dessins, où chaque artiste dessine en temps quasi-réel le
super-héros dont il a la responsabilité, sous les yeux de la
caméra. S’il fallait encore une raison pour acheter de DVD, la
voici.
Le reste :
- L’île des super-héros : un reportage/clip de 3’ sur
l’homonyme parc d’attraction qui se trouve en Floride.
Intéressant pour ceux qui n’étaient pas au courant de son
existence (dont votre serviteur).
- Une riche galerie de couvertures américaines de « Spider-
Man », de sa première apparition au numéro réalisé après les
attentats du 11 septembre. Quelques notes contextuelles (nom
de l’artiste, résumé de l’histoire) accompagnent chaque
planche. Dommage juste que les touches directionnelles ne
permettent pas d’avancer automatiquement dans la galerie.
- La traditionnelle bande-annonce de
Spider-Man, en VF et - hélas - au format 4/3 et en
simple 2.0, et les Crédits du DVD bouclent le tout.
Une vidéo 4/3 plein écran claire et nette, qui prend toute son importance, car le documentaire est enrichi par plusieurs planches et dessins pour illustrer les propos. L’état de santé des extraits vidéo varie selon les cas : paradoxalement, les clips les plus anciens sont parfois ceux en meilleur état.
Encore une fois, une stéréo claire et intelligible, que ce soit en VF comme en VO. Le documentaire est accompagné par un bon choix musical.