Réalisé par Pier Paolo Pasolini
Avec
Paolo Bonacelli, Giorgio Cataldi et Umberto Paolo Quintavalle
Édité par Carlotta Films
Sur une plage d’Ostie, le 2 novembre 1975, Pier Paolo Pasolini
mourait roué de coups, à l’âge de 53 ans. Fin
brutale et tragique d’une vie hors du commun : premier recueil
de poésie à 19 ans, de nombreux romans, 25 films réalisés
depuis « Accattone » (1961), une carrière fantastique, dont les
plus beaux jalons sont « Mamma Roma » (1962), « Il vangelo
secondo Matteo » ( (1964), « Uccellacci e uccellini » (1966),
« Teorema (1968), Le Décaméron » (1970),
Les Contes de Canterbury (1971), portant tous la marque
lumineuse d’un poète libéré de toute contrainte, provoquant.
« Salò o le 120 giornate di Sodoma » est une évocation assez
libre du roman du « divin » marquis de Sade, transposé dans le
nord de l’Italie, vers la fin de la seconde guerre mondiale là
où, reculant devant les forces américaines, le régime
mussolinien trouva son dernier refuge.
Quatre notables du pouvoir fasciste se sont retirés dans un
château où ils soumettent huit jeunes « victimes » de chaque
sexe, quatre « épouses-esclaves », et quatre « soldats », raflés
ici et là, à tous leurs fantasmes et aux rigueurs d’un code
qu’ils ont méticuleusement élaboré.
Trois « histoires » dans le film, chacune racontée, après un
court exorde, selon la structure de l’enfer du Dante, par une
des mères maquerelles : girone delle manie, girone della
merda, girone del sangue. Une montée progressive de
l’humiliation, de la violence et de l’horreur, qui conduira
inexorablement à l’épilogue : le massacre des victimes,
auxquelles seront infligés d’effroyables supplices.
Evocation très forte des réflexions de Pasolini sur le pouvoir
et ses dangers. Ou comment l’on peut, en instituant des
valeurs fausses et aliénantes, soumettre les corps et
manipuler les consciences.
Un choc qui ne peut laisser indifférent, dévastateur,
impossible à oublier… N’attendez plus si ce film manque dans
votre « filmothèque » ! Si vous n’avez jamais vu Salò, offrez
vous cet objet mieux que rare : UNIQUE !
Un beau coffret à tirage numeroté, enrichi
par le dossier de presse de l’époque. Le film est divisé en 8
chapitres, (deux pour le prologue et deux pour chacun des
trois « cercles »), repérés par un titre et une vignette animée.
Deux chapitres par page, sur un fond présentant les quatre
pièces dans lesquelles se déroulent l’action.
On peut changer de langue (italien ou français), activer ou
désactiver les sous-titres à la volée.
A ajouter, sans plus tarder, à votre collection !
Bande-annonce originelle du film en VOST.
Version « officielle » française, dont on nous dit
qu’elle aurait été choisie par Pasolini ; bien que le doublage
soit flatteur (voix de Michel Piccoli, Micheline Boudet,
Anouck Ferjac), cette version, à mon humble avis, ne sonne pas
si juste que la version italienne, plus paroxystique. De plus,
si vous n’avez pas besoin des sous-titres, il ne vous sont pas
imposés !
Salò, d’hier à aujourd’hui : ce passionnant montage en
VOST de 32’, en noir et blanc et en couleurs, réalisé en 2002
par Amaury Voslion, rassemble tournages de scènes, interviews
d’acteurs et de Jean-Claude Biette, assistant réalisateur et,
surtout, une fascinante déclaration de Pasolini sur le fil
rouge du scénario : représenter ce que le pouvoir peut faire
de l’individu, comment il peut annihiler sa personnalité
jusqu’à le réduire à l’état de chose. On ne peut qu’être ému
de voir et d’entendre Pier Paolo Pasolini sachant que sa vie
allait toucher à sa fin, la veille du doublage de son film en
français.
Enfants de Salò (18’27”, également réalisé par Amaury
Voslion). Ce documentaire, moins intéressant que le premier,
recueille les fortes impressions laissées par Salò sur quatre
réalisateurs français qui ont pu, eux aussi, choquer le public
avec au mois l’un de leurs films : Claire Denis (avec
Trouble Every Day), Catherine Breillat (avec
Romance), Bertrand Bonello (avec Le Pornographe)
et Gaspar Noé (avec Irréversible).
Un Diaporama de photos de plateau, sonorisé sur fond de
suite pour violoncelle de Bach, complète la liste généreuse
des suppléments.
L’image n’est pas parfaite, mais d’une qualité tout à fait
acceptable et incomparablement meilleure que celle de
l’édition antérieure du British Film Institute (dans un beau
boîtier, mais aux bonus indigents), qui souffre d’un mauvais
étalonnage des couleurs et de sous-titres imposés.
Peut-on espérer, pour une prochaine fois, une remastérisation
impeccable que mériterait un film d’une telle importance ?
Un honnête son mono, assez propre.