Réalisé par William Friedkin
Avec
Matthew McConaughey, Emile Hirsch et Juno Temple
Édité par Pyramide Vidéo
Chris, 22 ans, minable dealer de son état, doit trouver 6 000 dollars ou on ne donnera pas cher de sa peau. Une lueur d’espoir germe dans son esprit lorsque se présente à lui une arnaque à l’assurance vie. Celle que sa crapule de mère a contractée pour 50 000 dollars. Mais qui va se charger du sale boulot ?
Killer Joe est appelé à la rescousse. Flic le jour, tueur à gages la nuit, il pourrait être la solution au problème. Seul hic : il se fait payer d’avance, ce qui n’est clairement pas une option pour Chris qui n’a pas un sou en poche. Chris tente de négocier mais Killer Joe refuse d’aller plus loin. Il a des principes… jusqu’à ce qu’il rencontre Dottie, la charmante soeur de Chris.
Certains jeunes cinéastes devraient en prendre de la graine ! Agé de 77 ans, William Friendkin démontre avec Killer Joe, adaptation sulfureuse d’une pièce de théâtre éponyme écrite par Tracy Letts en 1991, qu’il en a encore sous le capot !
En 2007, le metteur en scène mythique de French Connection et L’Exorciste, avait par ailleurs déjà adapté l’une des pièces du dramaturge américain avec Bug. L’histoire se déroule à la Nouvelle Orléans dans des décors poisseux, où vit une famille de losers, le père (Thomas Haden Church) avec son fils (Emile Hirsch), sa fille (Juno Temple) et sa nouvelle femme (Gina Gershon). Un jour, afin d’aider le rejeton menacé de mort par un trafiquant, la famille complote l’assassinat de la mère grâce à l’aide de Killer Joe, policier le jour et tueur à gages la nuit, diaboliquement incarné par Matthew McConaughey, décidément ressuscité depuis La Défense Lincoln, Magic Mike et Paperboy.
Comme il a l’habitude de le faire, avec sa virtuosité toujours intacte, son goût pour l’outrance et des personnages souvent oubliés dans l’Amérique contemporaine, son humour vénéneux allié aux séquences violentes et presque insoutenables (la scène d’humiliation avec le pilon de poulet est déjà culte), William Friedkin fait part de sa vision pessimiste de la nature humaine, n’épargne rien ni personne, pas même les spectateurs parmi lesquels certains risquent de détourner momentanément le regard, notamment durant le dernier quart d’heure. Une des grosses baffes de l’année 2012.
La jaquette reprend le visuel de l’affiche du film. Le menu principal est élégant, animé et musical. A noter également la présence d’une édition spéciale FNAC qui comprend un DVD supplémentaire proposant la masterclass de William Friedkin enregistrée au Festival de Deauville en 2012.
En plus d’un lot de bandes-annonces, le DVD du film dispose également d’entretiens autour de Killer Joe avec William Friedkin et ses acteurs, dans un module intitulé Portrait d’une Amérique peu aimable (34’). Lors de sa venue en France pour la sortie de Killer Joe dans nos contrées, William Friedkin, avec sa verve habituelle et le franc-parler qui le caractérise, évoque sa collaboration avec le dramaturge Tracy Letts, et la façon dont ils sont fascinés tous deux par des personnages cupides, idiots et irresponsables que la plupart aimeraient croire purement fictifs. Le réalisateur raconte aussi ses rencontres avec les comédiens (il compare Emile Hirsch à James Dean), son travail méticuleux de direction d’acteurs et son rapport à la censure. Parallèlement, les acteurs apportent leur éclairage sur le tournage de Killer Joe et leur collaboration avec le cinéaste. Quelques images de tournage viennent également illustrer ce segment.
Comme nous l’indiquions dans la section des Généralités, l’édition spéciale FNAC comprend un DVD supplémentaire proposant la magistrale masterclass de William Friedkin enregistrée au Festival de Deauville en 2012 (1h30). Lors de cette rencontre animée par Jean-François Rauger, William Friedkin parle de ses débuts à la télévision et de sa fascination pour Citizen Kane ainsi que pour l’oeuvre d’Alfred Hitchcock, dont il raconte la rencontre. Il évoque son passage du documentaire au long métrage de fiction ainsi que sa passion pour les séquences d’action et plus précisément de courses-poursuites. Il parle également des figures récurrentes de sa filmographie et de son obsession pour la noirceur des personnages qu’il filme. La discussion s’articule autour de certains longs métrages majeurs du cinéaste : French Connection, The People vs. Paul Crump, L’Exorciste, Le Convoi de la peur, Police fédérale Los Angeles. Le réalisateur rappelle enfin les règles fondamentales de la mise en scène : bien choisir son sujet et son casting, créer une atmosphère propice au tournage et se concentrer à tout prix sur le montage de son film. Indispensable.
Le master SD restitue habilement les partis-pris esthétiques de la photo signée par le chef opérateur américain Caleb Deschanel, qui avait déjà collaboré avec William Friedkin sur Traqué. La colorimétrie est froide et tranchante, la gestion des contrastes solide et la luminosité fort appréciable. Si les séquences nocturnes ne sont pas aussi détaillées qu’espérées et le piqué légèrement émoussé par endroits, les détails sont sympathiques et les noirs denses. Du bel ouvrage.
Quatre mixages au choix, deux Stéréo et deux Dolby Digital 5.1 anglaise et française. N’hésitez pas à sélectionner immédiatement la version originale Dolby Digital 5.1 qui créé une immersion totale dès la première séquence avec l’orage qui éclate aux quatre coins de votre salon. Le caisson de basses rugit à bon escient, les latérales n’ont de cesse de délivrer leurs effets avec conviction, tandis que les frontales rivalisent d’efficacité, à l’instar du clic-clac entêtant du zippo de Killer Joe. Les dialogues demeurent solidement plantés sur la centrale. A titre de comparaison, la piste française n’a souvent rien à envier à son homologue, si ce n’est un côté plus artificiel qui irrite. Les Stéréo contenteront largement ceux qui ne seraient pas équipés sur les arrière. Le changement de langue est impossible pendant le visionnage.