Exhibition

Exhibition (1975) : le test complet du DVD

Réalisé par Jean-François Davy
Avec et Claudine Beccarie

Édité par Filmedia

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Le 16/03/2015
Critique

Photo Exhibition

Le cinéaste Jean-François Davy s’est fait inviter en 1975 sur le plateau du tournage des scènes pornographiques du film de Paul Vecchiali, Change pas de main. Des deux heures de rushes, est sorti un documentaire sur le cinéma X et sur une de ses vedettes, Claudine Beccarie.

Trois garçons et trois filles, entre deux prises de vue, se découvrent, au propre comme au figuré, devant la caméra. Ils répondent aux questions de Jean-François Davy, hors cadre. Exhibition dirige les projecteurs sur Claudine Beccarie, une égérie du cinéma pornographique des années 70 qui apparut aussi dans quelques autres films, tels France, société anonyme d’Alain Corneau ou Calmos de Bertrand Blier.

Exhibition a marqué l’histoire du cinéma en France. Contenant de nombreuses scènes de sexe non simulé, le film a pu obtenir son autorisation de sortie en juin 1975 à la suite de la suppression de la censure cinématographique par Valéry Giscard d’Estaing et Michel Guy, alors ministre de la culture. Exhibition fut également retenu dans la sélection des Perspectives du Cinéma Français au Festival de Cannes et dans la sélection officielle du Festival du film de New York 1975 et du Festival de Los Angeles 1976. Le film fit plus de 3 millions d’entrées en France.

Un nouveau souffle de libéralisme avait permis la sortie en juin 1974 du film Emmanuelle. Les producteurs de films pornographiques n’attendirent pas pour saisir l’opportunité et redoubler d’activité. Retour de pendule : un décret du 30 octobre 1975 et les articles 11 et 12 de la loi de finances du 30 décembre 1975, s’ils ne reviennent pas sur la suppression de la censure, taxent plus lourdement les films pornographiques, leur interdisent affichage et publicité et les excluent de toute subvention publique, tout comme les salles qui les diffusent.

Autre curiosité : classé X, Exhibition fut le seul film à être restauré dans la catégorie  » Art et essai  » à la demande du réalisateur, en 1983, quand Jack Lang devint ministre de la culture.

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Claudine Beccarie a beaucoup à dire et elle le dit bien. Sur une adolescence traumatisante : viol à 14 ans par un oncle, fugue, maison de correction jusqu’à sa majorité, prostitution en Espagne, puis percée en France dans l’univers du cinéma pornographique.

Elle parle aussi beaucoup du cinéma pornographique que son expérience la pousse, en réponse à une question, à distinguer radicalement de la prostitution. Elle et ses collègues admettent volontiers la médiocrité des films pornographiques qui se cantonnent, sauf exception confirmant la règle, au genre  » gonzo  » : une succession d’actes sexuels en plans (très) rapprochés, avec des dialogues débiles sur un scénario pouvant tenir sur un ticket de métro. Apparemment les amateurs du genre, interrogés à la sortie d’un cinéma X, n’en demandent pourtant pas plus.

Jean-François Davy a ajouté au métrage de 1975, deux nouvelles rencontres avec Claudine Beccarie tournées en 1979 et en 1983.

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Présentation - 3,5 / 5

Filmedia, qui a pris la suite d’Opening, ressort un clone des deux éditions précédentes, de 2007 et 2008. Les deux disques, celui du film et celui des suppléments, sont dans un boîtier cristal inséré dans un étui, avec le même visuel épuré qu’en 2008.

Le film (114’) démarre automatiquement après insertion du disque dans le lecteur. Un passage par le menu serait inutile : une seule version audio est disponible (Dolby Digital 2.0), sans sous-titres.

Le deuxième DVD s’ouvre sur un menu musical original : sur deux bandes de pellicule, de huit images chacune, apparaissent des extraits animés du film et des bonus.

Bonus - 5,0 / 5

Les bonus, une fois n’est pas coutume, dépassent en intérêt le film :

Passons vite sur la présentation du film à Cannes et sur la bande annonce.

Dans Claudine au porno (56’), Jean-François Davy nous parle, avec beaucoup de candeur, de ses heurs et malheurs avec le cinéma, du succès commercial de trois films pornos au titre emblématique, Bananes mécaniques, Prenez la queue comme tout le monde et Q,  » le meilleur des trois « , dont les bénéfices lui ont permis de financer Exhibition, puis un autre documentaire dans la même veine, Les Pornocrates. Il avoue volontiers son attirance pour le genre, rappelle son ambition, souvent contrariée, de réaliser des films différents, ainsi que ses activités de producteur (il a produit, notamment, La Meilleure façon de marcher de Claude Miller, L’Acrobate de Jean-Daniel Pollet). Il reconnaît ne pas avoir su saisir au mieux la chance que lui donnait le succès d’Exhibition. Il n’a jamais cherché à dissimuler son attraction pour les formes et l’esprit de Claudine Beccarie, se souvenant de ce que disait d’elle Jean-Louis Bory :  » Elle ouvre aussi gentiment son coeur qu’elle écarte les cuisses « .

Viennent ensuite des Images d’archives (8’), un extrait de l’émission Ciné Parade de France 3 du 3 mars 1982 avec une interview de Jean-François Davy et un extrait du journal télévisé de France 2 du 13 juillet 1983, annonçant la reclassification d’Exhibition dans la catégorie  » Art et essai « .

Tout, tout, tout, vous saurez tout sur le porno… en regardant la suite : Quatre regards sur le sexe et le cinéma, des entretiens conduits par le critique de cinéma Yves Alion qui demande à chacun de ses interlocuteurs de conclure en avouant quel est son film pornographique préféré.

Gérard Lenne (13’), critique et auteur de plusieurs ouvrages sur le cinéma, dont  » Érotisme et cinéma  » (La Musardine), rappelle la levée de l’interdiction qui avait frappé le film Emmanuelle, moins pour ce qu’il montrait que pour les idées qu’il véhiculait : le roman d’Emmanuelle Arsan était alors interdit de publicité et d’affichage. Pour la première fois, les spectateurs se ruaient sur les salles des Champs-Élysées pour voir un film ouvertement érotique. Puis ce fut le succès, peu de temps après, d’Exhibition. Une courte libéralisation à laquelle mit fin la  » Loi X  » qui sonna le glas du cinéma érotique en France, le condamnant à la médiocrité en tarissant ses ressources financières. Gérard Lenne triche en déclarant préférer deux films, Traci, I Love You, avec Traci Lords et The Devil in Miss Jones de Gerard Damiano.

Philippe Rouyer (28’), critique à Positif et à France Inter, universitaire, auteur de plusieurs ouvrages sur le cinéma, rappelle que la loi ne donne aucune définition du cinéma pornographique X. La pénétration non simulée n’est pas, à elle seule, un critère suffisant : L’Empire des sens de Nagisa Ôshima a, en effet, échappé à la classification X qui frappa néanmoins en 2000 le film de Virginie Despentes, Baise-moi. L’alternative au X était une interdiction aux moins de 16 ans à laquelle n’avait pas consenti la majorité de la commission de classification. Il fut mis fin à l’absurdité par le rétablissement de l’interdiction aux moins de 18 ans. Le critère différenciant le X est probablement à rechercher dans les intentions de l’auteur : s’il ne vise qu’à exciter sexuellement le spectateur, le film est classé X. Ce qui le ghettoïse en limitant sa distribution aux salles spécialisées. L’interdiction aux mois de 18 ans est déjà une sanction sévère, les films ne pouvant être diffusés à la télévision que par les chaînes payantes et seulement entre minuit et 5 heures du matin. Philippe Rouyer avoue préférer Les Putes de l’autoroute de Michel Ricaud.

Intervient ensuite Jacques Zimmer (14’), critique, rédacteur en chef pendant 20 ans de La Revue du cinéma, auteur de plusieurs livres dont Le Cinéma X (La Musardine). Remontant aux origines du cinéma, il oppose  » l’école Lumière « , celle du documentaire, du réel, à  » l’école Méliès « , celle de la fiction, de l’imaginaire. Il associe à la première le cinéma pornographique sans scénario, le  » gonzo  » industriel, avec ses acteurs et auteurs souvent anonymes et ses gros plans qui s’imposent comme des preuves de la réalité. Il relève la difficulté de certains auteurs à assumer la  » paternité  » de films érotiques : Catherine Breillat a cru nécessaire de justifier Romance X en assurant que Caroline Ducey n’avait pas été pénétrée par Rocco Siffredi, comme si cela pouvait changer la nature du film. Jacques Zimmer a jeté son dévolu sur un classique du genre : Derrière la porte verte avec Marilyn Chambers.

Enfin, Henri Gigoux (14’), responsable d’acquisition des programmes pour adultes par Canal+, rappelle que le film pornographique est apparu dès les débuts du cinéma, dans les maisons closes, et que chaque pays a sa propre production et sa propre censure. En France, paraissaient en 2007 une douzaine de films pornographiques scénarisés, une trentaine avec un semblant d’ambition artistique et une cinquantaine dans la tranche  » gonzo « . Il rappelle qu’Exhibition est le premier film pornographique diffusé par Canal+ dans sa case pour adultes.

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Image - 4,0 / 5

L’image du film (1.66), comme celle du DVD de bonus, est dans l’ensemble propre, avec des couleurs chaudes (c’est bien la moindre des choses !) correctement étalonnées et une définition suffisante pour les plans souvent assez rapprochés.

Son - 3,0 / 5

Le son est parfois altéré par quelques craquements et, très occasionnellement, par un parasitage plus marqué, mais jamais au point de gêner la compréhension des dialogues.

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Crédits images : © Filmedia

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 16 mars 2015
La chair est triste… dans les films pornographiques. Ce que confirme ce documentaire qui fit date dans l’histoire de la censure cinématographique.

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