Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle (1947) : le test complet du DVD

Édition Collector

Réalisé par Kenneth Anger
Avec Kenneth Anger, Bobby Beausoleil et Donald Cammell

Édité par Potemkine Films

Voir la fiche technique

Avatar Par
Le 10/08/2015
Critique

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Le coffret contient neuf courts ou moyens métrages du cinéaste américain Kenneth Anger, regroupés sous le titre The Magick Lantern Cycle, évocateur de son contenu : des films fantasmagoriques, magiques, en hommage au cinéma muet, inspirés, de l’aveu de leur auteur, par l’oeuvre du romancier et poète symboliste Aleister Crowley (1875-1947), lui-même disciple d’un mage sataniste anglais.

Ces neuf films, réalisés sur une période d’un peu plus de vingt ans, de 1947 à 1969 peuvent être vus comme un manifeste sur l’écriture cinématographique. Avec le seul appui d’un accompagnement musical, Kenneth Anger libère l’image en lui donnant une place exclusive que ne lui disputent ni des dialogues, inexistants, ni un scénario qui indiquerait le chemin à suivre.

The Magick Lantern Cycle fait surgir sur l’écran un univers merveilleux, bariolé, poétique. D’un fond noir sortent des personnages fantastiques, magiciens, divinités, démons, venus de tous horizons, qui se rencontrent, s’assemblent dans des surimpressions, se fragmentent et se reconstituent à travers les prismes d’un kaléidoscope.

Trois films ont été tournés en noir et blanc, Fireworks (1947, 14’), la première réalisation de Kenneth Anger. Puis, teintés en bleu, Rabbit’s Moon avec Pierrot, Colombine, Arlequin et un lapin blanc (version longue, 1950, 16’ et version remaniée en 1979, 7’) et Eaux d’artifice (1953, 12’) qui suit l’errance d’une femme dans le dédale d’un étrange jardin.

Un film se distingue des autres, Scorpio Rising (1964, 28’) ouvrant les portes du monde des bikers et de leurs rituels : entretien maniaque des machines, habillage méticuleux du motard, blue jeans, blouson de cuir, foulard, bottes et, touche finale, le métal des chaînes. Ce lent processus alterne avec le montage accéléré d’images psychédéliques. Kustom Kar Kommandos (1965, 3’) suit à peu près le même schéma.

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Kenneth Anger, avec les frustres moyens dont il disposait, une caméra 16 mm, a ressuscité la magie du cinéma des origines, celle créée par Méliès, qu’il a voulu pousser plus loin, laissant le rêve imposer son emprise.

Tous les éléments du cycle tendent vers Lucifer Rising (1966, 27’), le film le plus achevé et le plus emblématique que Kenneth Anger a considéré comme son adieu au cinéma. oeuvre ésotérique, incantatoire, hallucinée, avec deux personnages de la mythologie égyptienne, Isis et Osiris, à côté de Lucifer et Lilith, interprétée par Marianne Faithfull.

La musique tient un rôle important. Classique, avec Vivaldi, Janacek et Respighi. Pop, avec, parmi beaucoup d’autres, Bobby Beausoleil, Mick Jagger, Elvis Presley, Ricky Nelson…

Les recherches stylistiques de Kenneth Anger ont influencé de nombreux cinéastes dont Jean Cocteau (qui l’a pris un temps son aile), Rainer Werner Fassbinder, David Lynch, Alejandro Jodorowsky, Martin Scorsese…

Grâce à Potemkine/agnès b., The Magick Lantern Cycle, sorti sur DVD aux USA en 2007, puis au Royaume Uni en 2011, nous arrive enfin en France dans une édition aussi remarquable par sa présentation que par la qualité des suppléments.

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Présentation - 5,0 / 5

Les trois disques (le DVD du cycle, le DVD des suppléments et un CD Audio de la musique originale de Lucifer Rising, composée par Bobby Beausoleil) sont présentés dans un digipack à trois volets, illustré de photos et inséré dans un étui cartonné.

L’étui contient aussi un livret de 88 pages sur fond noir, composé de trois parties. Des extraits du livre d’Olivier Assayas, Éloge de Kenneth Anger. Puis le story-board de Puce Women, un film inachevé dont seuls ont été tournés des fragments constituant une des pièces du cycle, Puce Moment (1949, 6’). Enfin, le générique artistique et technique des neuf films.

Le menu principal est animé et musical, tout comme celui du DVD des suppléments.

Bonus - 5,0 / 5

Les suppléments sont logés sur un deuxième DVD :

River of Anger (1.33:1, 38’), réalisé par Antoine Barraud en 2007, recueille des propos sous-titrés de Kenneth Anger, retranscrits pendant le premier quart d’heure sur un écran noir furtivement habité par des images peu contrastées, quasi-fantomatiques, puis, jusqu’à la fin du document, par un film de très mauvaise qualité technique (avec des sous-titres souvent mangés par l’image) dans lequel le réalisateur apparaît en gros plan. En dépit de ses déficiences techniques, ce document donne une aide précieuse à la lecture de l’oeuvre.

Les sortilèges de Kenneth Anger (1.33:1, 15’) où il fait ses confidences (enregistrées par Pip Chodorov en 2003 à Los Angeles, son lieu de naissance). Il évoque ses premiers essais avec une caméra, à l’âge de douze ans, son long séjour à Paris à partir de 1950. Là, il rencontra Jean Cocteau et collabora à la Cinémathèque, alors sur l’avenue de Messine, à l’invitation d’Henri Langlois qui l’aida à financer Rabbit’s Moon. Il révèle le fil rouge de Scorpio Rising, etc.

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Le Dialogue entre Kenneth Anger et Gaspar Noé (1.78, 35’) a été enregistré à la Cinémathèque Française en juin 2013. Kenneth Anger rappelle qu’il a été poussé à quitter Hollywood pour Paris devant la menace du Maccarthisme et exhibe le nom de Lucifer tatoué en gros caractères sur la poitrine. Il dit son admiration pour Michael Powell et Eisenstein, dont il a, à la demande d’Henri Langlois, monté Que viva Mexico en suivant fidèlement le scénario. Il évoque ses films perdus, dont une adaptation d’Histoire d’Ô qu’il avait commencé à tourner…

La Discussion entre Olivier Assayas et Jean-Baptiste Thoret (2015, 1.78:1, 36’) diffuse un éclairage fort utile à la découverte de tout ce que contient le cinéma de Kenneth Anger : beaucoup de choses cachées dans une oeuvre très courte par un cinéaste qui  » veut mettre le plus de choses possible dans le plus petit espace possible « . Olivier Assayas ressent la présence de la mort dans le cinéma d’Anger, hanté par les fantômes des acteurs du cinéma muet. Il salue au passage l’influence novatrice d’Andy Warhol. En conclusion, Olivier Assayas estime que l’histoire du cinéma gagnerait à être repensée pour donner à Kenneth Anger la place qu’il y mériterait.

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Image - 4,0 / 5

Une restauration entreprise en 2006 par UCLA permet de visionner tout le cycle avec une image stable, aux couleurs éclatantes, saturées à l’extrême par le choix du réalisateur, avec des noirs très denses. La définition est satisfaisante pour un tournage en 16 mm avec les moyens du bord.

L’image a été correctement débarrassée des taches et rayures. Subsiste dans certaines séquences plus sombre un fourmillement assez visible qui n’aurait probablement pu être réduit qu’au prix d’un discutable lissage.

Son - 4,0 / 5

La restauration a donné au son (Dolby Digital 2.0) une grande propreté et ravivé son dynamisme, lui permettant de donner une belle présence à l’accompagnement musical des films.

Kenneth Anger : The Magick Lantern Cycle

Crédits images : © Potemkine Films

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

4,0
5
0
4
1
3
0
2
0
1
0

Je donne mon avis !

Avatar
Philippe Gautreau
Le 11 août 2015
Le Magick Lantern Circle, une collection de neuf courts et moyens métrages, nous ouvre les portes de l’univers fantasmagorique de Kenneth Anger. Malgré son impact, ce manifeste sur l’écriture cinématographique était encore inédit en France. Il nous arrive enfin avec plus de deux heures de bonus et de précieuses clés pour la découverte d’une œuvre inclassable.

Lire les avis »

Multimédia

Proposer une bande-annonce

Du même auteur
(publicité)

(publicité)