Le Pionnier de l'espace (1959) : le test complet du DVD

Dirigeant le programme anglais de conquête spatiale, le Commandant Charles Prescott envoie son frère, l’indiscipliné lieutenant Dan Prescott, dans l’espace, à bord du premier avion supersonique jamais construit. Par esprit de défi, ce dernier n’obéit pas aux recommandations de sa hiérarchie, et s’éloigne de plus en plus de la Terre, traversant une nuée de rayons cosmiques. A son retour en catastrophe, Dan a subi une étrange mutation, et se transforme petit à petit en monstre végétal particulièrement horrible.

Quel plaisir de redécouvrir ces classiques vintage de la science-fiction britannique ! Le Pionnier de l’espace - First Man into Space, réalisé par Robert Day en 1959, n’a absolument rien perdu de son charme et demeure un formidable divertissement. A l’origine de cette pépite, il y a deux scénarios distincts, le premier écrit par Charles F. Vetter (La Poupée du diable), le second provenant d’un script intitulé Satellite of Blood écrit par Wyott Ordung (Robot Monster). Devant ces deux histoires, le producteur Richard Gordon (La Tour du diable) décide de les réunir pour en faire un seul film qu’il parvient à vendre à la MGM et pour lequel il obtient un budget plutôt conséquent de 100 000 ₤. Le cinéma britannique lorgne alors sur les longs métrages américains et Le Pionnier de l’espace, même si tourné principalement en Angleterre, a des allures de film US.

Aujourd’hui, Le Pionnier de l’espace fonctionne encore autant dans sa première partie, plutôt documentaire dirons-nous avec la séquence du décollage de la navette, des diverses tâches spécifiques aux navigateurs et tout ce qui touche à la conquête spatiale, que la seconde évidemment plus singulière avec la traque de la créature hideuse venue du ciel, avide de sang frais et à la respiration hésitante. Le réalisateur Robert Day (Une bombe pas comme les autres, La Déesse de feu) s’en sort admirablement bien derrière la caméra et regorge d’imagination, ne serait-ce que pour faire croire que les séquences tournées dans la campagne anglaise sont supposées se dérouler à Central Park ! Néanmoins, quelques scènes ont réellement été tournées près de Brooklyn, mais également au Nouveau Mexique.

Popularisé grâce à la série Daktari, le comédien Marshall Thompson tourne alors depuis une quinzaine d’années quand on lui propose le rôle principal du Pionnier de l’espace. Il interprète le Commandant Chuck Prescott, qui traque tout d’abord la créature venue d’un autre monde, avant de comprendre que Dan, son propre frère (Bill Edwards), se trouve coincé dans cette carapace innommable, tranchante, opaque aux rayons infra-rouge et aux rayons X, qui a fait de lui un monstre seulement animé par l’instinct de survie.

Les effets spéciaux possèdent encore une magie poétique, à l’instar de l’avion révolutionnaire qui s’élève dans l’espace à une hauteur de plus de 600.000 pieds, ainsi que le costume monstrueux qui «  recouvre  » le personnage de Dan après que son personnage ait traversé un nuage de météorites. Le dernier acte participe également à la grande réussite du film en se recentrant sur la relation entre les deux frères. Le Pionnier de l’espace se clôt sur une scène inattendue car quasi-intimiste qui laisse une belle part à l’émotion.

Un grand classique !

Glissé dans un superbe fourreau, le magnifique slim digipack cartonné renferme un DVD à la sérigraphie élégante et au menu fixe et musical. Artus Films livre un petit objet de collection aux visuels fort attractifs. Egalement disponible dans cette édition, un livret de 60 pages richement illustré, signé Alain Petit La Science-fiction anglaise.

Grand défenseur du cinéma bis et fantastique, Alain Petit (24’) reste fidèle à Artus Films et réalise un bel exposé sur la science-fiction britannique au cinéma dans les années 1950-1960, propos que l’on peut d’ailleurs retrouver de manière encore plus détaillée dans le livre (dont nous tenons compte dans la note) inclus dans cette édition. Notre interlocuteur replace le cinéma anglais dans son contexte à la fin de la Seconde Guerre mondiale, et donne quelques titres les plus marquants du genre, du Triangle à quatre côtés à Spaceways, tous deux réalisés par Terence Fisher, en passant par Devil Girl from Mars, Le Monstre, Satellite in the Sky et X the Unknown. Alain Petit en vient ensuite au film qui nous intéresse, en parlant de la genèse du Pionnier de l’espace, les thèmes abordés, la carrière du réalisateur Robert Day, le casting et le succès du film à sa sortie en France.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et un large diaporama d’affiches et de photos d’exploitation.

Jusqu’alors inédit en DVD en France, Artus Films offre un master au format original 1.37 (16/9 compatible 4/3) un peu fatigué, bien que l’encodage tente de consolider l’ensemble. La gestion des contrastes est aléatoire, la copie laisse encore passer de nombreuses poussières, scories, rayures verticales, raccords de montage, surtout durant la première partie et les divers stock-shots. Le piqué est donc médiocre, mais les noirs ne manquent pas de concision et la copie est lumineuse sur les séquences diurnes. Si le grain demeure hasardeux, (re)découvrir Le Pionnier de l’espace, même avec une image tachetée, rajoute un charme vintage non négligeable.§

Au jeu des comparaisons, la version française s’en tire mieux que son homologue. Cette dernière s’accompagne de resonances et de craquements plus appuyés. La piste française apparaît plus vive et dynamique, les grésillements sont plus atténués et l’ensemble est tout simplement plus propre.

Crédits images : © Artus Films