Réalisé par Philippe Lesage
Avec
Edouard Tremblay-Grenier, Pier-Luc Funk et Vassili Schneider
Édité par Blaq Out
Félix, 10 ans, le dernier des trois enfants d’un couple, n’est pas bavard, mais très attentif à tout ce qui se dit, à tout ce qui se passe. Et il a peur de tout : d’une séparation de ses parents, des maniaques qui s’attaquent aux petits garçons comme lui, des voisins bizarres, d’attraper le sida… et d’avouer son amour pour Rebecca, sa prof de gym.
Les Démons, ceux qui habitent les pensées de Félix et ses cauchemars, est le premier long métrage de fiction du Québécois Philippe Lesage, venu au cinéma par la réalisation de documentaires, le premier étant Pourrons-nous vivre ensemble ?, en 2006, avec le sociologue Alain Touraine, sur l’intégration sociale des jeunes de la région parisienne, suivi en 2010 par Ce cœur qui bat, un reportage sur l’Hôtel Dieu de Montréal, et par How Can You Tell If the Little Fish Are Happy?, sur la vie des faubourgs de Beijing.
Peut-être cette expérience de documentariste explique-t-elle les choix scénaristiques de Philippe Lesage pour Les Démons. Aucun besoin de l’artifice d’une voix off pour communiquer les pensées de « Félix le taiseux » : il suffit de l’observer pour tout comprendre, ses questionnements, ses peurs, sa fascination pour Rebecca, trahie par son regard médusé dans la cour du collège. Quand il propose à son copain Mathieu de jouer « au mari et femme », on devine le but du jeu avant même qu’il ne lui attribue son rôle : « Tu t’appelles Rebecca, OK ? ».
À l’économie de mots, s’accorde une économie des mouvements de caméra. Hormis quelques rares panoramiques et travellings, toutes les scènes sont prises en plans fixes.
Quelques scènes cèdent la priorité aux dialogues, notamment, celle, très tendre, où sa grande sœur Emmanuelle assure Félix qu’il n’a pas pu attraper le sida en jouant au papa et à la maman avec Mathieu.
Les Démons traite avec justesse et délicatesse de la découverte progressive, au cours de la préadolescence, de l’autonomie, de la sexualité, du décryptage du comportement des adultes, des rapports possibles avec les enfants du même âge, du rejet à l’empathie… des codes de la vie en société.
Les Démons joue essentiellement sur le registre de la comédie jusqu’à ce que, aux deux tiers de sa durée, un fait divers dramatique (l’influence du documentaire, là encore ?) vienne surprendre le spectateur au point de lui faire se demander si le scénario n’aurait pas gagné à n’en pas faire état. Puis, après réflexion, on finit par admettre que les démons de Félix, ses peurs d’enfant, peuvent n’être pas qu’imaginaires et que les causes du drame qui surgit ont probablement leur origine dans un traumatisme subi pendant l’enfance.
La prestation étonnamment naturelle d’Édouard Tremblay-Grenier dans le rôle de Félix et, dans ceux de ses parents, de Pascale Bussières et Laurent Lucas, la justesse de l’observation de l’enfance, la qualité du scénario et des dialogues, concourent à placer Les Démons au rang des films les plus achevés sur le monde de l’enfance, aux côtés, par exemple et en restant dans le domaine de la fiction, du Tomboy réalisé par Céline Sciamma en 2011.
Les Démons (113 minutes) et son supplément (11 minutes) tiennent sur un DVD-9 logé, comme les autres titres édités par Blaq Out, dans un fin digipack (7 mm). Le menu fixe et musical propose le film en version originale, sous deux formats, Dolby Digital 5.1 et 2.0.
Aux sous-titres français optionnels, parfois utiles pour la compréhension des dialogues (pas tant en raison de l’accent québécois que pour quelques défaillances dans l’articulation et dans la prise de son) s’ajoutent des sous-titres pour malentendants.
En supplément, un entretien avec le réalisateur (11’). Philippe Lesage commente les thèmes de son film, les peurs de l’enfant, les proportions exagérées qu’il peut donner à des évènements mineurs, sa découverte des autres et sa socialisation, etc., sans rien dire sur la genèse ou le tournage du film.
L’image (2.35:1) propose des couleurs naturelles, bien étalonnées, avec de bons contrastes. Une belle précision dans les plans rapprochés, mais un léger manque de netteté dans les plans larges et un peu de bruit vidéo dans les scènes de nuit.
Le son (Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo, au choix), propre, bénéficie d’une bonne dynamique et d’une bande passante assez large. Le format 5.1 donne une sensation réaliste d’immersion dans l’ambiance et les deux voies sont bien séparées dans la version stéréo.
Crédits images : © Blaq Out