L'Arbre aux sabots (1978) : le test complet du DVD

L'Albero degli zoccoli

Réalisé par Ermanno Olmi
Avec Luigi Ornaghi, Francesca Moriggi et Omar Brignoli

Édité par Carlotta Films

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Le 23/08/2017
Critique

L'Arbre aux sabots

Lombardie, à la fin du XIXe siècle, près de Bergame. Une grande ferme abrite cinq familles de métayers. Les paysans sont contraints à un dur labeur qui leur laisse à peine de quoi survivre. Le récit de leur quotidien commence en automne, avec la récolte du maïs, à la main, épi par épi.

Avec L’Arbre aux sabots (L’Albero degli zoccoli), Palme d’or en 1978, Ermanno Olmi, héritier du néoréalisme, a fait de son film une chronique authentique de la vie de paysans au long de quatre saisons, inspirée par les histoires racontées par ses grands-parents et jouée par des paysans bergamasques qui s’expriment dans leur patois, apparemment sans remarquer la présence de la caméra.

Un choix de scénario pas fait pour enthousiasmer les producteurs. Le réalisateur a dû attendre une dizaine d’années pour réaliser son projet en assurant lui-même l’essentiel de son financement. Mais un choix cohérent dans l’œuvre d’Ermanno Olmi : sur 85 films, de court ou long métrage, les deux tiers sont des documentaires.

Dans L’Arbre aux sabots, aucun commentaire sur l’état de misère dans lequel sont maintenus les paysans. Ce choix, que certains thuriféraires de la critique ont reproché au réalisateur, donne pourtant au film tout son impact : mieux vaut montrer que démontrer. Montrer, par exemple, que la famille Batisti ait à choisir entre envoyer un des fils à l’école, distante de six kilomètres, ou s’assurer les services d’une sage-femme pour l’enfant à naître, suffit à faire ressentir le dénuement des familles. Tout comme la polenta qui fait leur ordinaire, servie dans une vaisselle dépareillée, avalée autour de l’âtre les soirs d’hiver, l’entassement de toute la famille pour la nuit dans une seule chambre, le désespoir à l’idée que la mort de la vache prive la famille de lait…

L'Arbre aux sabots

L’Arbre aux sabots, loin de sombrer dans le misérabilisme, donne une belle place aux joies simples des paysans, à la liesse de la kermesse avec son carrousel, ses jeux de massacre, son mat de cocagne, à la chaleur des veillées où les enfants sont médusés par les histoires de sorcières ou de revenants contées par les aînés, à l’émerveillement d’une fillette à la découverte des tomates plantées par son grand-père tout près d’un mur qui leur donne abri et chaleur, mûres avant toutes les autres…

Le film souligne aussi le mysticisme des paysans : ave Maria et pater noster s’égrènent maintes fois, même en duo (la femme récite la première partie de la prière, le mari reprend la suite) et les miracles prêchés par le curé, s’ils envoûtent les paroissiens, laissent un champ libre à la jeteuse de sort, la donna del segno.

L’Arbre aux sabots, à côté des scènes de la vie de tous les jours, nous invite à une escapade : nous suivons Maddalena et son jeune époux dans leur voyage de noces à Milan, sur une barge portée à bonne allure par le courant de la rivière. Fidèle à son choix de montrer la vie, sans chercher à l’expliquer, le film ne fait alors qu’une discrète référence au massacre de Milan, que le jeune couple ne fait qu’entrevoir, sans en percevoir l’horreur, en croisant par hasard une colonne d’hommes enchaînés qui défilent dans une rue, encadrés par des soldats. Pourtant, la répression d’un soulèvement contre la hausse des prix et la famine qui a agité tout le pays (protesta dello stomaco) fit, ce 6 mai 1898 à Milan, autour de 400 morts !

L’Arbre aux sabots, au-delà de son intérêt documentaire, fascine par la beauté de sa photographie, plan après plan, dans le cadre intimiste du 1.37:1. Une réussite très personnelle d’Ermanno Olmi, tout à la fois auteur du scénario, réalisateur, chef opérateur, monteur et producteur du film, qui mériterait largement une édition plus élaborée.

L'Arbre aux sabots

Édition - 6,5 / 10

L’Arbre aux sabots (177 minutes), présenté de façon spartiate, tient sur un DVD-9 logé dans un boîtier épais de 14 mm. Le menu animé et musical propose le choix entre version originale et doublage en français, les deux au format Dolby Digital 2.0.

Pas de bonus vidéo, juste une bande-annonce.

L’image (au format d’origine 1.37:1) a, depuis la précédente édition de 2007, bénéficié d’une restauration. Bien que le résultat laisse une impression générale acceptable, des progrès restent à faire pour une version de référence. Les couleurs ont été délicatement ravivées, dans une palette légèrement désaturée à dominante ambrée, rappelant les photographies sépia. Les contrastes mettent en valeur les clairs-obscurs, avec des noirs assez denses, mais tendant à se boucher. Le bât blesse avec le bruit vidéo, surtout gênant sur les grandes surfaces unies. La stabilité est parfois affectée par quelques sautillements et une luminosité occasionnellement scintillante. Des taches blanches n’ont pas été toutes effacées, mais restent assez discrètes pour être vraiment gênantes.

Le son (Dolby Digital mono d’origine) est mieux loti. Avec un spectre inévitablement étroit, surtout pauvre en graves, il est propre, avec un souffle très atténué et une dynamique plutôt surprenante pour un film tourné il y a quarante ans avec l’équipement rudimentaire du 16 mm. En contrepoint de l’image, les pièces pour orgue de Bach (ou la suite pour violoncelle accompagnant la descente de la rivière) sont rendues avec une bonne clarté. Peu de distorsions, sauf une, désagréable, au passage de la troupe à cheval sur les pavés. Le doublage en français, place les dialogues beaucoup trop en avant, au détriment de l’accompagnement musical, très étriqué.

L'Arbre aux sabots

Crédits images : © 1978 Aguila Films

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
6,5 / 10
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Philippe Gautreau
Le 23 août 2017
L’Arbre aux sabots, au-delà de son intérêt documentaire, fascine par la beauté de sa photographie, plan après plan, dans le cadre intimiste du 1.37:1. Une réussite très personnelle d’Ermanno Olmi, tout à la fois auteur du scénario, réalisateur, chef opérateur, monteur et producteur du film, qui mériterait largement une édition plus élaborée.

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