Wrong Elements (2016) : le test complet du DVD

Édition Digibook Collector + Livret

Réalisé par Jonathan Littell
Avec Geofrey, Nighty et Mike

Édité par Blaq Out

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Le 01/03/2018
Critique

Wrong Elements

1989. Joseph Kony, un jeune rebelle illuminé, crée l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA, Lord’s Resistance Army) avec pour ambition de faire tomber le président ougandais Yoweri Museveni et d’imposer un régime théocratique. L’armée se développe 25 ans durant par l’enlèvement de plus de 60 000 adolescents, dont une partie arrive à s’échapper. Jonathan Littell analyse la reconstruction psychologique de quatre d’entre eux, Geofrey, Nighty, Mike et Lapisa. Il les accompagne sur les lieux qui ont marqué leur jeunesse, tout en suivant la traque des derniers rebelles de la LRA menée par l’armée ougandaise dans la forêt centrafricaine. Une exploration historique poignante sur le destin des enfants soldats qui rappelle la frontière ténue entre la position de la victime et celle du bourreau.

Wrong Elements, présenté hors compétition à Cannes en 2016, est, à ce jour, le seul film de Jonathan Littell, écrivain franco-américain distingué par le Prix Goncourt en 2006 pour son roman Les Bienveillantes, l’histoire d’un personnage fictif, Maximilien Aue, un officier SS témoin et acteur de massacres perpétrés par les nazis.

La guerre doit débarrasser la société de tous ses mauvais éléments

Cette déclaration d’Alice Lakwena, « médium » et chef de la première rébellion mystique du Nord Ouganda en 1987, citée par un des cartons du film, plonge immédiatement le spectateur dans l’idéologie fumeuse qui a, pendant 25 ans, engendré l’horreur dans le pays, tout en empiétant sur le territoire des états voisins, la République Centrafricaine, le Soudan et la République Démocratique du Congo.

Sur les 60 000 enfants et adolescents enlevés, certains à peine âgés de dix ans, moins de la moitié d’entre eux ont survécu, traités en esclaves, forcés de tuer, sous peine d’être battus, voire exécutés, passant ainsi de l’état de victime à celui de bourreau.

On n’oublie jamais tout : c’est comme une cicatrice qui reste sur la peau

Wrong Elements

Wrong Elements ne fait pas étalage en images de l’horreur, auquel se limitent quelques séquences d’archives extraites d’une cassette VHS filmée par un des membres de la LRA. Les abominations commises par les rebelles et les jeunes qu’ils entraînèrent dans leur folie meurtrière nous sont rappelées par les quatre jeunes, Geofrey, Nighty, Mike et Lapisa, que la caméra a accompagnés dans des lieux qu’ils ont fréquentés après avoir été embrigadés par la LRA. Elle saisit leurs conversations, fréquemment entrecoupées de rires. Si l’on sent parfois que les quatre jeunes gens tiennent un rôle, conscients de la présence de la caméra, ils semblent, le plus souvent, l’oublier.

Une bonne idée scénaristique qui permet de ressentir la façon dont les enfants ont vécu leur enlèvement et l’aventure dans laquelle ils ont été entraînés, en les écoutant évoquer la séparation d’avec leur famille, les sévices infligés à leurs compagnons d’infortune, qu’ils ont aussi subis, puis, à leur tour, infligé à d’autres, dans le sillage ensanglanté de Joseph Kony et de ses sicaires, responsables de 100 000 assassinats.

Wrong Elements s’interroge aussi, sans position dogmatique, sur les traces laissées à l’âge adulte, certainement de profondes blessures. Ont-elles définitivement altéré le sens des responsabilités ou pourront-elles cicatriser avec le temps ? L’analyse des propos enregistrés, et aussi des silences, ne donne pas de réponse claire à cette question.

Tous, tour à tour victimes et bourreaux, semblent persuadés de leur innocence, disant n’avoir fait qu’obéir sous la menace, l’un d’entre eux, Mike, confiant pourtant : « je me suis habitué à tuer ». Tous ont été amnistiés, à l’exception de quelques-uns qui ont assumé des fonctions de commandement à un échelon suffisamment élevé. C’est le cas de Dominic Ongwen : bien qu’il fût enlevé à l’âge de 10 ans, mais devenu un des commandants de la LRA, il est visé par 70 chefs d’accusation dont il devra répondre devant la Cour internationale pénale.

Wrong Elements

Présentation - 5,0 / 5

Wrong Elements (133 minutes) et ses suppléments (43 minutes) tiennent sur un DVD-9 logé dans la couverture d’un digibook de 96 pages.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, au format Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo, avec sous-titres imposés (en français ou en anglais) placés trop haut.

Sous-titres pour malentendants.

Le livret s’ouvre sur une interview de Jonathan Littell par Blaq Out. C’est lorsqu’il travaillait pour Action pour la faim en 1997 au Zaïre qu’il a, pour la première fois, entendu parler de Joseph Kony. En 2011, il a pu rencontrer, dans le sud du Soudan, d’anciens membres de la LRA ralliés au gouvernement. Les informations recueillies auprès d’eux, le visionnage de nombreux films sur l’Afrique lui ont donné l’idée de tourner Wrong Elements, avec le soutien de la société de production Le Pacte et d’ARTE France. Il explique son choix du format 1.33:1, « pour éviter l’effet National Geographic », l’illustration musicale par des compositions de Jean Sébastien Bach et, surtout, de Heinrich Ignaz von Biber, l’importance qu’il attache au son et pas seulement à la musique, comment il a trouvé les quatre personnages et les a convaincus de participer au film. Il évoque la situation des anciens de la LRA, de ceux, maintenant en petit nombre, qui sont restés dans la rébellion. Il a eu la chance de se trouver au bon moment à Kampala pour pouvoir filmer la décision d’extradition à La Haye de Dominic Ongwen dont le procès, ouvert en décembre 2016, va durer des années.

Suit La guerre des signes, un reportage de Jonathan Littell pour Le Monde. L’article relate la traque par les escadrons de l’armée ougandaise des tueurs de la LRA, un ennemi caché dans le bush, les marécages ou la forêt, la rencontre du réalisateur avec d’anciens LRA, dont l’image ne correspond pas au cliché répandu d’un groupe de fanatiques religieux et de psychopathes, la féroce répression exercée par Museveni, élu président de la République d’Ouganda en 1986.

Le livret se poursuit avec L’Armée de Résistance du Seigneur, une brève histoire, par Kristof Titeca, professeur de l’Université d’Anvers, avec photos et cartes, et se referme sur une brève chronologie allant de 1962, date de l’indépendance de l’Ouganda, auparavant colonie de l’Empire britannique, à 2017, l’année où les forces ougandaises et américaines se sont retirées de la RCA, mettant fin à l’opération anti-LRA.

Wrong Elements

Bonus - 3,5 / 5

Scènes coupées (34’). Nighty et Lapisa, enlevées à l’âge de 10 ans se souviennent de leur enlèvement, de leur endoctrinement, de l’obligation d’oublier leurs parents, d’avoir été « données à des vieux » pour des relations sexuelles, d’avoir vu des enfants battus à mort parce qu’ils avaient cherché à échapper à leurs ravisseurs, une fillette tuée à coups de baïonnette. Elles sont aujourd’hui amères de voir, alors qu’elles vivent dans des huttes, d’anciens membres de la LRA mener une vie tranquille « dans des maisons avec des toits en tôle ».

Archives (9’). Au début de l’année 1998, un des rebelles a filmé un long raid de la LRA dans le Nord de l’Ouganda. On voit Joseph Kony haranguer ses troupes devant lesquelles il se vante d’avoir, lors d’un raid visant une école, enlevé 300 filles et 200 garçons, « tous morts en route peu après », tient devant des adolescents un discours sans queue ni tête qui se termine par : « Que vous suiviez Dieu ou Satan, si vous obéissez à votre chef, vous vaincrez ! ».

Wrong Elements

Image - 4,0 / 5

L’image (1.33:1), bien définie, stable, avec des couleurs naturelles, soigneusement étalonnées, bien contrastée, est parfaitement lisible dans toutes les conditions d’éclairage, occasionnellement un peu moins dans quelques scènes tournées en faible lumière, apparemment sans éclairage artificiel.

Son - 4,0 / 5

Le film est proposé dans sa seule version originale, avec le choix entre deux formats, Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo.

Très propre, le son restitue clairement les dialogues et l’ambiance avec une certaine finesse et donne une belle ampleur à l’accompagnement musical.

L’encodage 5.1 peut être très immersif, par exemple dans la séquence de la lente progression dans la forêt, au tout début du film, ou se limiter à un timide effet stéréo dans d’autres scènes.

Wrong Elements

Crédits images : © 2014-2015 Bénédicte Kurzen © 2016 Veilleur de nuit - Zero One Film - Wrong Men

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
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Philippe Gautreau
Le 1 mars 2018
La caméra recueille les confidences de quatre jeunes Ougandais survivants d'un embrigadement forcé dans les hordes de la rébellion mystique de la LRA. Alors qu’ils n’étaient encore que des enfants, ils furent réduits à l’esclavage, entraînés à tuer, contraints à satisfaire l’appétit sexuel des adultes. Un documentaire poignant de Jonathan Littell (lauréat du Prix Goncourt en 2006 pour son roman Les Bienveillantes), présenté à Cannes en 2016.

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