Argent amer (2016) : le test complet du DVD

Ku Qian

Réalisé par Wang Bing
Avec et Ling Ling

Édité par ARTE ÉDITIONS

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Le 15/01/2019
Critique

Argent amer

À peine sortis de l’adolescence, Xiao Min, Ling Ling et Lao Yeh ont des rêves plein la tête. Quittant leur village du Yunnan, ils partent grossir la main d’oeuvre de Huzhou, une cité ouvrière florissante des environs de Shanghai. Soumis à la précarité et à des conditions de travail éprouvantes, ils veulent quand même croire en une vie meilleure.

Argent amer (Ku Qian), est le quinzième long métrage du documentariste Wang Bing qui réalisa aussi, en 2010, Le Fossé (Jiabiangou), un documentaire-fiction sur les camps de « rééducation par le travail » sous la dictature de Mao Zedong, édité en 2012 dans le coffret Le Deux films de Wang Bing : Le fossé + Fengming : Chronique d’une femme chinoise.

Argent amer, le montage de rushes tournés entre 2014 et 2016, suit quelques jeunes migrants, venus de l’Ouest du pays grossir les rangs d’une main d’oeuvre exploitable sans contraintes, de sept heures à minuit (avec quand même quelques heures pour dormir !), payée à la pièce, au rabais, souvent avec retard, entassée dans la promiscuité de dortoirs, licenciable à merci… le combustible du miracle économique chinois.

Un phénomène d’ampleur, nous confirme le message qui s’affiche à la fin du film : « À Huzhou, exercent 18 000 petites entreprises de confection où travaillent plus de 300 000 ouvriers venus des zones rurales d’autres provinces, Yunnan, Guizhou, Jiangxi, Anhui et Henan ». Une situation précaire : ces petites entreprises connaissent de graves difficultés poussant leurs patrons à délocaliser leurs activités dans d’autres pays de l’Asie du sud-est, là où les salaires sont encore plus bas !

Argent amer livre des images brutes, sans commentaires du réalisateur qui laisse le soin au spectateur de juger ce qu’il voit en l’immergeant dans un environnement peu accueillant : immeubles en béton brut défraîchi, ateliers exigus et bruyants aux murs lépreux en partie cachés par des tentures hétéroclites, rues et cages d’escalier jonchées de détritus, beuglement incessant des klaxons, le jour comme la nuit…

Le visionnage de ce type de documentaire soulève nécessairement une question, celle de l’influence de la caméra sur les personnes filmées. Dans quelle mesure sa présence les poussent-elles à tenir un rôle ? On peut supposer que le temps qu’a duré leur cohabitation avec la petite équipe et la légèreté des moyens mis en oeuvre a dû les aider à oublier la caméra.

Argent amer, Prix du meilleur scénario de la sélection Orizzonti à la Mostra de Venise 2016, en dépit de la longueur de certaines scènes, notamment celle du voyage du Yunnan à Huzhou, deviendra vite, au rythme actuel des changements de la Chine, avec Behemoth, tourné par Liang Zhao en 2015, un des précieux témoignages sur les conditions dans lesquelles elle aura pris son essor économique.

Édition - 7 / 10

Argent amer (156 minutes) tient sur un DVD-9 logé dans un boîtier épais de 14 mm, glissé dans un étui.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en mandarin, avec le choix entre deux formats audio : Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo.

Pas de bonus vidéo, mais un livret de 28 pages s’ouvrant sur l’extrait d’un article de Stéphane Lagarde, journaliste spécialiste de la Chine, intitulé Argent amer : Wang Bing et les petites mains du textile chinois. Suit une conversation entre Wang Bing et Alain Bergala, cinéaste et critique, au cours de laquelle le réalisateur rappelle la genèse du film, l’idée qui lui est venue de filmer tous les gens qu’il rencontrait pendant les deux ans où il est resté à Huzhou, des gens « représentatifs de la grande majorité des Chinois, en quête d’une vie meilleurs grâce au travail ». Il évoque son approche des personnes filmées : les mettre en confiance, sans rien exiger d’elles. Il dit s’être toujours arrangé pour ne pas être confronté à la censure, mais craindre que l’insertion dans la loi de ce qui n’était encore que des règlements affecte toute l’industrie cinématographique. Il souligne que l’exploitation d’une main-d’oeuvre à bas coût ne gêne pas le gouvernement, dans la mesure où elle stimule les exportations.

L’image (1.78:1) est acceptable compte tenu de la légèreté du matériel utilisé, une caméra le plus souvent portée à l’épaule, parfois une steadycam, semble-t-il. L’absence d’éclairage artificiel affecte la lisibilité de certaines scènes dans l’obscurité des couloirs ou cages d’escalier, par exemple.

Pour le son, pas de différence nettement perceptible entre les deux formats proposés, Dolby Digital 5.1 et 2.0 stéréo : l’image sonore reste centrée sur les voies frontales, avec une faible séparation des canaux gauche et droit. Le son est assez clair, avec un équilibre généralement satisfaisant entre les dialogues et les bruits extérieurs, sauf dans une scène où le vent souffle fort dans les micros (le preneur de son a dû oublier les bonnettes).

Crédits images : © House on Fire

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
7 / 10
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Philippe Gautreau
Le 16 janvier 2019
Deux fois primé à Venise, ce documentaire, tourné en Chine entre 2014 et 2016, suit quelques jeunes migrants venus de l’Ouest du pays grossir les rangs d’une main d’œuvre exploitable sans contraintes, payée à la pièce, au rabais, souvent avec retard, entassée dans la promiscuité de dortoirs, licenciable à merci… le combustible du miracle économique chinois !

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Argent amer
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