Vidéo : le J + 4 mois arrive enfin en France !
Le « seul » point de la loi Création et Internet plebiscité par le public, est désormais effectif : l’arrivée des films en DVD et Blu-ray 4 mois après leur sortie salle ! Mais la mise en place du nouveau délai se fera graduellement
Parmi les dispositions litigieuses de l’arsenal HADOPI, il y a au moins un point qui met tout le monde d’accord : l’adéquation de la France aux délais modernes de diffusion en vidéo des oeuvres cinéma. Le décret qui fixe le délai de diffusion des films en DVD et Blu-ray à 4 mois après leur sortie en salles est désormais effectif depuis la publication au Journal Officiel du 13 juin de la partie "non censurée" de la loi Création et Internet.
Pour la vidéo en France, c’est une véritable révolution. Fini l’âge sombre où les passionnés du Septième Art étaient contraints de patienter pendant six mois de leur vie pour qu’un film arrive enfin sur le petit écran. Les éditeurs de la vidéo - qui réclamaient cette évolution depuis des années - espèrent que le J+4 mois permettra de réduire le piratage et de minimiser la concurrence avec les imports trans-frontaliers.
Gran Torino, le film symbole du J+4 mois
En quoi consiste le J+4 mois ? À partir de maintenant, n’importe quel film sorti en salles depuis au moins 4 mois peut théoriquement atterrir en vidéo, et sans aucun visa de dérogation. Wolverine pourrait sortir le 29 août et Star Trek le 6 septembre… à partir du moment où le producteur et l’éditeur sont d’accord.
Le premier film à exploser l’ancien délai de 6 mois, est Gran Torino - sorti en salle le 25 février et prévu en DVD et Blu-ray pour le 3 juillet. Vrai, le délai gagné n’est pas spectaculaire, mais c’est un premier pas. Warner a pris un risque calculé — au cas où la loi n’aurait pas été approuvée dans les temps, ils n’avaient qu’à décaler la livraison de trois semaines pour être conformes aux anciennes dispositions.
Dans la pratique, le déploiement du J+4 mois sera très graduel. Les éditeurs n’ont aucun intérêt à caler leurs machines de guerre dans la période morte des sorties estivales. La lourdeur de l’infrastructure logistique (pré-ventes, fabrication, marketing…) sur les prochaines sorties déjà actives, laisse également des marges de manoeuvre très limitées.
Mais Il y a aussi une motivation plus terrienne : l’impact du nouveau délai sur le grand public. Les éditeurs sont conscients que les budgets loisirs des foyers ne sont pas extensibles. Il est parfaitement inutile d’aligner des dizaines de têtes d’affiche d’un seul coup, et de risquer de se retrouver avec des palettes d’invendus sous le coude. Le J+4 mois se fera en douceur, avec des décisions prises titre par titre.
Moins de 4 mois… ou bien davantage
La loi Création et Internet autorise aussi des sorties vidéo à 3 mois — ou plutôt à 4 mois moins 4 semaines maximum, pour être exact. Cette règle est uniquement applicable en cas de dérogation du CNC au vu des résultats d’exploitation en salles. En clair, les grosses gamelles pourront sortir 3 mois plus tard si ça arrange tout le monde.
L’inverse est aussi vrai : un film pourra arriver en vidéo avec un délai supérieur à 4 mois. Ce sera le cas pour les aléas saisonniers, les blockbusters avec une sortie planétaire et pour les oeuvres avec une durée d’affiche en salles supérieure aux attentes.
La loi fixe aussi le cadre d’application des délais de la VOD, un secteur qui privilégie les accords directs entre l’ayant droit et la plate-forme de téléchargement légal. Les parties intéressées ont un mois pour stipuler un accord. Dans le cas contraire, passé ce délai, la VOD aura les mêmes fenêtres que celles octroyées au DVD et Blu-ray.
Si le cinéma s’ouvre (enfin) aux pratiques modernes, il y a cependant un volet où la loi Création et Internet est hélas inapplicable : les délais de sortie des séries télévisées. Comme il n’y a pas de fenêtre salles, un éditeur n’a aucune contrainte légale à respecter. Mais le marché extremêment juteux des droits d’acquisition et des recettes publicitaires sur les chaînes en clair, obligent les éditeurs à attendre une première diffusion à l’antenne (et de plus en plus souvent la diffusion en clair sur les chaînes hertziennes) avant de sortir les coffrets en magasin. Tant que ce point mort perdure, il faudra s’armer d’une patience de jedi pour attendre la sortie de Dexter - Saison 1 ou de True Blood.
