Réalisé par Guillaume Brac
Avec
Vincent Macaigne, Solène Rigot et Bernard Ménez
Édité par Wild Side Video
Un rocker trop sentimental, une jeune femme indécise, un vieux père fantasque. Dans la petite ville de Tonnerre, les joies de l’amour ne durent qu’un temps. Une disparition aussi soudaine qu’inexpliquée et voici que la passion cède place à l’obsession.
Révélé par son court-métrage Le Naufragé (2009), prologue au superbe moyen-métrage Un monde sans femmes (2011), diptyque exploité comme tel au cinéma et acclamé par la critique, le réalisateur Guillaume Brac révélait également le comédien Vincent Macaigne. Tonnerre, le premier long métrage du cinéaste, les réunit à nouveau. A travers cette oeuvre magnifique, nous retrouvons ce qui faisait la moelle des films précédents de Guillaume Brac. Quelques personnages incarnés par des acteurs non-professionnels, quelques us et coutumes d’une petite commune, ici Tonnerre dans l’Yonne (où ses grands-parents ont passé une grande partie de leur vie), la complexité et la maladresse des rapports humains, à travers le portrait dressé d’un trentenaire renfermé et solitaire. Comme dans Le Naufragé et Un monde sans femmes, Tonnerre subjugue par sa pudeur, sa sincérité et son coeur énorme. Si le cinéma du metteur en scène pouvait rappeler celui d’Eric Rohmer et de Jacques Rozier, Tonnerre s’en éloigne.
Vincent Macaigne étincelle dans un rôle écrit spécialement pour lui. Après lui avoir offert un personnage timide et maladroit, le réalisateur et sa co-scénariste Hélène Ruault ont voulu l’emmener ailleurs, vers d’autres horizons en lui confiant le soin d’interpréter un homme séduisant, charismatique, beau, mais toujours aussi sentimental voire ici romanesque. N’oublions pas ses partenaires, sublime Solène Rigot, vue dans Renoir, 17 filles, Lulu femme nue, qu’on a hâte de revoir sur le grand écran, ainsi que Bernard Menez, dont la prestation atteint les sommets du mythique Maine-Océan (1986). Un véritable revival ! Si le monde est bien fait, nous devrions retrouver ce trio aux Césars en 2015.
Tonnerre allie à la fois la beauté plastique - la lumière hivernale capturée sur pellicule 16mm est un régal pour les yeux - avec une image plus stylisée et expressive que dans Un monde sans femmes, aux portraits pudiques, mélancoliques (y compris un chien cafardeux), attendrissants et parfois amers d’êtres solitaires qui vont tenter de rentrer en contact pendant quelques jours avec d’un côté une histoire d’amour quasi-impossible et de l’autre la relation entre un père et son fils, en mettant à nu certaines blessures, peurs (la solitude, le temps qui passe, l’adieu à la jeunesse) et la violence que chacun a besoin d’exprimer pour pouvoir avancer dans la vie, quitte à prendre des chemins inattendus…et la voie du polar pour Brac. Ces confrontations vont amener les personnages à se révéler peu à peu, l’un à l’autre.
Expérience de cinéma à part entière, le spectateur est invité à explorer toutes les palettes d’émotions que peuvent procurer le septième art. Drôle, poignant, beau, original, intense, tendre et noir, porté par la partition aérienne de Rover et des dialogues sublimes, Tonnerre est un véritable miracle comme il s’en produit rarement dans le cinéma français, qui capte la vie, respire l’amour du cinéma et impose définitivement Guillaume Brac comme l’un de nos plus précieux nouveaux réalisateurs.
Le test a été réalisé sur un check-disc. Le visuel de la jaquette est identique à celui de l’affiche du film. Le menu principal est quant à lui animé sur la musique de Rover.
On commence par un morceau de choix avec dix scènes coupées proposées avec le commentaire audio du réalisateur Guillaume Brac et de son monteur Damien Maestraggi en option. Après une présentation de cinq minutes des deux collaborateurs, qui indiquent que le premier montage du film durait 3h30, nous découvrons donc cette demi-heure de séquences laissées sur le banc de montage. Il est assez rare de découvrir des scènes coupées aussi belles. Vraiment. Celles et ceux qui auront aimé le film de Guillaume Brac doivent absolument les visionner. Pour prolonger ce plaisir, nous vous conseillons la lecture du scénario original présent en bonus DVD-ROM !
S’ensuit une « conversation un soir d’été sur un film d’hiver », en d’autres termes une rencontre de 25 minutes entre le réalisateur Guillaume Brac, le chef opérateur Tom Harari, la co-scénariste Hélène Ruault, le comédien Vincent Macaigne et deux jeunes cinéphiles rencontrés à l’issue d’une projection de Tonnerre. Pendant 25 minutes, mais on imagine qu’il s’agit en fait d’une bonne partie de la nuit, tout ce beau petit monde discute du film un soir de juin 2014 chez le metteur en scène. La collaboration Brac-Macaigne est évidemment abordée. Un moment très sympa.
Nous trouvons également un court segment consacré aux essais vidéo de Solène Rigot, ainsi que la bande-annonce et les credits.
L’image de Tonnerre en DVD est fidèle à celle découverte lors de leur sortie dans les salles. Le tournage a été effectué en 16mm afin de capter les variations de la lumière du soleil, l’atmosphère un peu gothique de la ville, le relief des vieilles pierres. Un peu comme une boule à neige que l’on secoue pour admirer les flocons qui tombent délicatement sur le décor. Les partis pris esthétiques originaux sont respectés, les contrastes manquent de concision surtout sur les scènes sombres où les noirs paraissent bouchés, le léger grain est flatteur, la colorimétrie un poil terne, mais la clarté, même si elle bouffe les détails, est de mise. La propreté est indéniable, tout comme la stabilité, bien que divers flous, de légers moirages et un piqué quelque peu émoussé demeurent notables tout du long.
Le spectateur a le choix entre les pistes DTS 5.1 et Dolby Digital 2.0. Notre préférence va évidemment pour la première qui instaure un confort acoustique plus plaisant, une spatialisation musicale un peu chiche mais présente et des effets latéraux, certes peu foisonnants, qui savent néanmoins rester appréciables. Le caisson de basses a peu d’occasions de briller, certaines ambiances parviennent à percer, la balance frontale toujours dynamique et équilibrée, et le report des voix solide.
Une piste Audiodescription pour aveugles et malvoyants, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.
Crédits images : © Rectangle Productions, Wild Bunch, France 3 Cinéma